« La méthanisation collective plutôt qu’une mise aux normes chère »
Chez Philippe Robichon, le lisier des laitières et la fiente des volailles partent dans une usine de méthanisation située sur la commune voisine. Il reçoit en échange du digestat liquide, un produit plus facile à valoriser.
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«Nous sommes sur une zone d’élevage avec un excédent global d’effluents par rapport aux surfaces épandables, explique Philippe Robichon, éleveur installé au Gaec de Millepieds, à Cholet (Maine-et-Loire). En 2014, une réflexion a été lancée sur la création d’une usine de méthanisation collective. Aujourd’hui opérationnelle, cette unité valorise nos effluents en injectant du gaz dans le réseau. Le digestat produit est analysé puis épandu sur nos parcelles en fonction des besoins agronomiques de chaque culture. Grâce à cette organisation, nous avons échappé à une mise aux normes sans doute plus coûteuse avec, à la clé, une meilleure maîtrise des apports organiques au champ et, à plus long terme, la perspective de dividendes financiers provenant de la production de biogaz. »
L’usine produit 50 000 tonnes par an
L’unité de méthanisation fonctionne depuis mars 2018. En tout, ce sont vingt-sept exploitations qui se sont investies dans ce projet collectif via la création de la SAS Bio-Méthane-Seg (lire encadré). Le Gaec de Millepieds en fait partie. L’exploitation a dû cloisonner sa fosse circulaire de 1 100 m3 pour créer une fosse primaire de 200 m3 où se déverse le lisier provenant du raclage. La plus grande partie est destinée désormais au digestat revenant de la méthanisation, qui se trouve à 6 km. Les transferts s’effectuent par camion-citerne et sont gérés par la SAS. Le chauffeur vient régulièrement vider sa cuve de digestat et repart avec du lisier frais. Deux cônes plongeant dans chaque compartiment ont été installés en bordure pour les opérations de pompage et de vidange.
Sur les vingt-sept exploitations adhérentes, tous les types d’élevages sont représentés : bovins lait et allaitant, volailles, porcs… L’usine produit environ 50 000 t de digestat par an, qui passent ensuite au séparateur de phase, formant 7 000 t de matière solide et 43 000 t de liquide. La SAS analyse ces digestats afin d’évaluer leur richesse en éléments minéraux. Généralement, la fraction solide se caractérise par une plus forte concentration en phosphore d’environ 7,1 unités par tonne. Une grande partie est revendue à une entreprise de compostage, afin d’équilibrer le bilan global en phosphore de l’ensemble des exploitations.
C’est donc majoritairement de la fraction liquide qui retourne dans les fermes. Ce produit possède une bonne valeur azotée avec une teneur de 3,8 unités/t, dont 1,5 unité d’azote ammoniacal directement assimilable. Toutes les exploitations reçoivent un plan de fumure réalisé par le CER. L’objectif est de restituer à chaque éleveur la quantité de produit adaptée à ses cultures.
« Chez moi, ce sont environ 1 300 m3 de liquide qui doivent être épandus »
« Chez moi, ce sont environ 1 300 m3 de liquide qui doivent être épandus, précise Philippe Robichon. Le digestat ne dégage pas d’odeur contrairement au lisier. Cela simplifie les chantiers et permet de s’approcher davantage des zones habitées. Je fais appel à l’ETA Fonteneau qui dispose de plusieurs outils spécifiques. L’épandage se fait ainsi sur le blé en sortie d’hiver avec une rampe à pendillards, à condition que les sols soient suffisamment portants. Je prévois aussi des apports sur le maïs avant le semis et à l’automne, au moment d’implanter des cultures intermédiaires. Sur chaumes, je choisis un enfouissement avec disques déchaumeurs. Cela permet de travailler le sol en même temps. L’ETA épand aussi sur prairie au printemps entre deux fauches. Dans ce cas, elle utilise des disques spécifiques pour incorporer le digestat dans le sol sans abîmer les plantes. Les tracteurs sont équipés d’un guidage RTK qui assure une répartition homogène du produit sans doublon, ni oubli. »
L’entrepreneur possède aussi du matériel d’épandage sans tonne pour passer plus facilement en sortie d’hiver ainsi que sur du maïs jusqu’au stade 8 à 10 feuilles. Pour l’instant, Philippe Robichon n’a pas encore utilisé cette technique. L’éleveur épand aussi avec son propre matériel 230 t de digestat solide, selon les préconisations du plan de fumure.
Les adhérents reçoivent 3 €/m3 de digestat
« Mes frais d’épandage s’élèvent entre 3000 et 4000 € par an selon la distance et les équipements employés, explique l’éleveur. Il est prévu que chaque année au moment du bilan, la SAS reverse aux adhérents des dividendes de 3 €/m3 de digestat épandu. Toutes les entrées et sorties de matières sont en effet pesées au pont-bascule afin de suivre la contribution de chaque exploitation. Cette somme devrait donc couvrir nos charges d’épandage. Mon objectif est également de baisser nos achats d’ammonitrate. Selon les études menées, c’est tout à fait possible dans notre cas grâce à la bonne valorisation des apports sur les différentes cultures. Une partie de la matière organique de nos effluents est utilisée dans le processus de méthanisation. C’est pourquoi les analyses de sols régulières sont indispensables afin de suivre l’évolution des taux et d’adapter nos pratiques en conséquence. À l’avenir, nous ferons peut-être plus d’enfouissement de paille ou de cultures intermédiaires pour restituer davantage de matière organique. »
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