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« JE CAPTE L'EAU DE PLUIE POUR SOULAGER LE RÉSE AU »

« Notre décision de capter l'eau de pluie soulage un réseau vieillissant dans une petite commune qui dispose de peu de moyens pour le rénover », explique Sébastien Durand.PHOTOS © JÉRÔME PEZON

En zone de montagne sèche, le captage de l'eau de toiture contribue à sécuriser les approvisionnements et à soulager le réseau pour faire face au déficit hydrique en période estivale.

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L'IDÉE DE CAPTER, PUIS DE STOCKER L'EAU DE PLUIE POUR L'ABREUVEMENT du troupeau ne vient pas de nulle part. Virginie et Sébastien Durand ont en fait remis au goût du jour une pratique traditionnelle des éleveurs lozériens. « Historiquement, dans notre secteur, chaque ferme disposait d'une citerne pour récupérer l'eau des toitures, aussi bien pour les besoins du foyer que pour ceux du troupeau, explique Sébastien. En l'absence de nappe facilement accessible pour envisager de réaliser un forage, c'est une réflexion que nous avions depuis la création de la stabulation en 2006 et qui coïncidait avec les travaux menés par la chambre d'agriculture et, après plus de deux ans d'attente, nous avons finalement été retenus comme site pilote sur le département. » Valoriser une surface de 1 500 m2 de toiture répondait bien sûr à la volonté de réduire une facture d'eau de 4 500 €/an (4 700 m2 x 0,95 €/m2), mais aussi à la nécessité de résoudre en partie un problème de ressources : « Au coeur de l'été, le débit du réseau est parfois insuffisant, souligne Virginie. Lors de la sécheresse de 2011, nous nous sommes même retrouvés temporairement sans une goutte d'eau au robinet. » Dans ce contexte, la mairie a financé une retenue collective collectant le trop-plein d'eau du bassin et où les éleveurs peuvent remplir leur tonne à eau en été. « C'est une solution d'appoint, mais elle représente du temps passé sur la route et des frais de gasoil. »

C'est donc à partir de l'été 2011 que l'installation de captage de l'eau de toiture sera opérationnelle. L'eau provenant des 95 ml de gouttières est d'abord dirigée vers une cuve de décantation enterrée de 6 m3, où la matière organique se dépose, avant que le trop-plein d'eau ne s'écoule vers une cuve en béton de 150 m3. L'ensemble représente un investissement de 32 500 €, dont 22 000 € pour la seule cuve de stockage.

« PRÈS D'UN MOIS D'AUTONOMIE EN ÉTÉ »

Initialement, sa capacité a été retenue pour viser une autonomie de près de 40 jours sans pluie, pour un troupeau de 50 laitières. À 900 mètres d'altitude et avec des précipitations moyennes de 759 mm/an, le site d'exploitation bénéficie néanmoins des épisodes orageux d'été : 44 mm en juin, 45 mm en juillet et 83 mm en août de précipitations moyennes. Compte tenu de la pente du toit et du diamètre des chéneaux, 100 mm de précipitations remplissent entièrement la cuve de stockage.

« En été, les génisses et les allaitantes sont en pâture. Seules les laitières s'abreuvent en bâtiment, soit un besoin de 4 m3 par jour pour un troupeau qui compte désormais 75 vaches laitières après l'acquisition de quotas supplémentaires. La gestion du volume d'eau disponible consiste à avoir une cuve pleine à l'approche de l'été, en jouant sur la complémentarité avec l'eau du réseau pendant le printemps pour une autonomie de 25 jours sans pluie. »

« L'EAU RÉPOND AU CRITÈRE "D'ABREUVABILITÉ" »

Le choix d'un réseau enterré vise à amener jusqu'à l'abreuvoir une eau la moins chargée possible en matières organiques qui peuvent véhiculer des germes. Ceci explique la présence d'un bac intermédiaire de décantation, nettoyé tous les deux mois. Le réservoir en béton est vidangé et lavé au nettoyeur à haute pression et à l'eau de javel une fois par an.

Dans la même logique, après une période de 10 à 15 jours sans précipitations, l'eau de la première pluie est déviée, car elle a servi au nettoyage du toit. L'absence d'arbres à proximité du bâtiment ne justifie pas la pose de filtre à feuilles au niveau des gouttières. « La difficulté porte sur les gros orages de plus de 30 mm. Le débit est trop important pour que l'eau décante suffisamment. Une réflexion est menée avec la chambre sur un filtre de grande capacité. » Les analyses régulières de l'eau révèlent des traces de coliformes. « Il n'y a pas de réglementation précise concernant la qualité de l'eau de boisson des animaux et, par ailleurs, les ruminants ont une tolérance vis-à-vis de la présence de bactéries dans l'eau, rappelle Jean-Charles Commandré, conseiller en bâtiment chargé du suivi des sites pilotes. Nous avons donc retenu la notion "d'abreuvabilité" de l'eau distribuée, qui correspond à une eau de baignade de très bonne qualité, sans impact sur la qualité du lait, l'état sanitaire du troupeau, ni son niveau de production. » L'eau stockée est réservée à l'abreuvement et au lavage des quais. Le compteur indique que 4 700 m3 d'eau de pluie ont été consommés depuis l'été 2010, soit une économie de 4 500 € en près de trois ans et demi.

« UN RETOUR SUR INVESTISSEMENT ATTENDU SUR DIX ANS »

En tenant compte d'une aide financière de 60 % du montant de l'investissement, accordée par les conseils général et régional au titre de site pilote, la rentabilité est attendue sur dix ans. Mais dans ce contexte pédo-climatique spécifique, cette installation présente une alternative crédible pour équilibrer les besoins et l'eau disponible. C'est pourquoi la chambre d'agriculture souhaite qu'une aide financière soit prévue sur ce volet dans le prochain PMBE.

J.P.

La cuve a une capacité de 150 m3. Le choix du béton permet de neutraliser le pH de l'eau et de maintenir sa température constante autour de 10°C.

Les chéneaux et les descentes sont en zinc, un matériau choisi pour sa résistance au gel et au poids de la neige. Les canalisations d'alimentation de la cuve sont enterrées et en PVC.

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