Login

LAIT HORS NORMES : RIGUEUR ET GESTION HUMAINE

Le 1er avril entre en application la nouvelle procédure relative aux laits à plus de 400 000 cellules et 100 000 germes/ml. Elle répond aux exigences européennes tout en tenant compte de la diversité des situations.

Vous devez vous inscrire pour consulter librement tous les articles.

SELON LA RÉGLEMENTATION EUROPÉENNE, un lait est considéré en dehors des normes sanitaires si la moyenne des comptages cellulaires, calculée sur trois mois glissants, est supérieure à 400 000 cellules/ml de lait(1).

L'éleveur a ensuite trois mois pour revenir sous les 400 000. S'il n'y parvient pas, toujours selon la réglementation européenne stricto sensu, il est soumis à une suspension de collecte pour une durée indéterminée. À lui de prouver le retour en conformité de son lait pour que cet arrêt soit levé. « Heureusement, le Paquet hygiène laisse une certaine souplesse d'application aux États membres, souligne Stéphanie Saint-Léger, en charge de ce dossier à l'interprofession laitière (Cniel). Ils peuvent accorder des autorisations spécifiques, à condition que la protection de la santé publique continue d'être assurée. La France a choisi cette voie. C'est important de le souligner »,insiste-t-elle. Cette stratégie n'est pas nouvelle. Ce qui est nouveau, c'est le dispositif qui sera appliqué à partir du 1er avril. « À la suite d'une inspection en 2009, l'Office vétérinaire européen a pointé du doigt un délai trop long avant l'application d'une première suspension et le calcul de la moyenne cellulaire sur une moyenne trimestrielle civile et non sur une moyenne trimestrielle glissante. » Dans le premier cas, le délai avant la première suspension pouvait aller jusqu'à dix-huit mois si l'éleveur s'engageait dans un plan « cellules », proposé par l'interprofession régionale (Criel) et en lien avec les intervenants en élevage.

Dans le second, les situations hors normes étaient repérées à la fin de chaque semestre sur la dernière moyenne trimestrielle. Bref, la filière laitière a revu sa copie. Il a fallu deux années de transition, 2012 et 2013, pour bien définir la nouvelle procédure et surtout créer les outils nécessaires à un suivi efficace. L'accord interprofessionnel a été signé le 17 décembre et homologué le 21 par les pouvoirs publics pour trois ans.

MOYENNE TRIMESTRIELLE : COMMENT LA CALCULER ?

À compter du 1er avril, la moyenne géométrique trimestrielle (et non pas arithmétique) sera établie sur les trois derniers mois glissants. Cela signifie que ce calcul sera effectué tous les mois. Ainsi, en avril, il reposera sur les mois de janvier, février et mars, en mai sur les mois de février, mars et avril, etc. (voir ci-dessous). « Au lancement de ce nouveau système, il est probable que le nombre de producteurs recevant un courrier d'alerte du Criel, en charge de la gestion des laits non conformes, augmente par rapport à l'ancien, pronostique Stéphanie Saint-Léger. En contrepartie, ils pourraient en sortir plus rapidement. » Reprenons l'exemple d'avril et mai. L'éleveur recevra un courrier d'alerte car la moyenne des trois mois précédents est supérieure à 400 000 cellules. Le mois suivant, si les comptages d'avril s'améliorent au point de passer la nouvelle moyenne sous les 400 000, ils signeront le retour en conformité du lait.

SUSPENSION DE COLLECTE : QUAND EST-ELLE APPLIQUÉE ?

Comme son nom l'indique, le courrier d'alerte envoyé dans la foulée de la première moyenne « positive » n'est qu'une alerte. « Il est accompagné d'une proposition de "plan cellules". C'était déjà le cas dans la majorité des régions, mais l'accord interprofessionnel la valide. » La première suspension de collecte (six jours) interviendra au terme du sixième mois (bilan 2 de l'infographie) si toutes les moyennes intermédiaires sont au-dessus des 400 000. Le lait est alors considéré hors normes. « À moins de s'engager dans un "plan cellules", souligne la responsable du dossier au Cniel. D'une façon plus générale, le dispositif est conçu pour tenir compte d'un maximum de situations. La filière laitière a bien conscience de la complexité du problème cellules. » Si, au bout du compte, une suspension de collecte à durée indéterminée est décidée, il revient au producteur de prouver, d'une part que son lait est conforme et, d'autre part, qu'il a réalisé ces actions : contrôle de la machine à traire, adhésion à la charte des bonnes pratiques d'élevage ou l'équivalent, analyses mensuelles de chaque vache.

DES RECOURS SONT-ILS POSSIBLES ?

Oui, face à un accident, un décès, un sinistre, etc. (page suivante), l'éleveur peut solliciter la commission de recours de sa région pour une dérogation à la suspension de collecte. Elle est composée des membres du Criel. Il peut contester aussi des mesures liées à l'application du dispositif À partir du 1er avril, la commission se réunira tous les mois.

COMMENT EST GÉRÉ LE DISPOSITIF ?

Un outil de gestion informatisé est lancé mi-mars. Il analysera les situations de chaque producteur à partir d'une base de calculs centralisée. Elle peut les effectuer à partir des résultats d'analyses des laboratoires reconnus que lui transmet Infolabo. Les Criel et les laiteries pourront s'y connecter grâce à un code propre à chacun pour assurer la confidentialité. Il leur sera indiqué les éleveurs faisant l'objet d'une alerte, d'un classement « hors normes », d'une suspension. L'administration en sera aussi informée. « Tout est fait pour une gestion efficace et la moins coûteuse possible. Elle est sous la responsabilité de chaque Criel. » L'investissement dans l'outil de gestion a coûté 156 000 €. Les premières alertes seront éditées à partir du 7 avril.

CLAIRE HUE

(1) Pour les germes, le calcul porte sur deux mois glissants. La moyenne doit être inférieure à 100 000 germes/ml. C'est aussi dans le nouveau dispositif.

A découvrir également

Voir la version complète
Gérer mon consentement