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« NOTRE INSTALLATION EST SIMPLE MAIS PLEINE DE POTENTIEL »

L'installation d'Eric Saulnier en Gaec avec ses parents a entraîné un doublement de la taille du troupeau et imposé la construction d'un bâtiment neuf. PHOTOS : P.L.C.

À 3 000 € la place, le bâtiment du Gaec du Feuillage vert devrait s'amortir sans trop de difficultés. Et surtout, il est capable d'évoluer pour répondre aux besoins futurs d'un jeune éleveur.

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JE ME SUIS INSTALLÉ EN 2009 EN PLEINE CRISE LAITIÈRE. Cela m'a rendu prudent », attaque Éric Saulnier, éleveur à Goven, en Ille-et-Vilaine. Il a d'emblée intégré le fait que le prix du lait pouvait subir des fortes variations. Sa motivation pour le métier est restée intacte, mais il a réfléchi les investissements sous un angle d'abord économique.

Quand il a rejoint ses parents Armelle et Joël, l'exploitation produisait 250 000 l de lait dans un bâtiment en aire paillée de 40 places. La traite se faisait avec une 2 x 4 postes en simple équipement. Éric a repris un élevage voisin (80 000 l de lait) et obtenu une rallonge de 80 000 l. Le bâtiment existant était insuffisant. Construit en limite de propriété, il ne pouvait pas être agrandi. Les éleveurs ne possédaient que 80 ares autour de l'étable.

« NOUS AVONS CONSTRUIT SUR UN SITE VIERGE »

« Nous devions repartir à zéro ailleurs », précise Armelle. « Je souhaitais garder le système de production en place car il fonctionne bien », raconte Éric. À savoir : des normandes proches de 7 000 l de lait, un système plutôt herbager, mais un silo de maïs ouvert toute l'année. Le projet s'est construit sur la base d'une production annuelle de 450 000 l avec 80 vaches. Le jeune éleveur considère que la productivité laitière plus faible des normandes est compensée par la richesse en taux. Et la race est bien adaptée au pâturage. « Il nous faut un effectif supérieur, et donc un bâtiment plus grand, mais je crois que l'on s'y retrouve sur le plan économique », analyse-t-il. Les éleveurs ont choisi une parcelle au centre d'un îlot de 50 ha. Avantage : le pâturage reste possible et sans contrainte de traversée de route. Inconvénient : le terrain est à viabiliser. Cette option représente donc un surcoût à l'investissement, mais elle permet de maintenir un système économe.

« L'AIRE PAILLÉE DEMANDE PLUS DE TRAVAIL »

Ils ont conçu un bâtiment de 100 places en aire paillée, anticipant un certain développement de la production. Un choix judicieux puisque trois ans après la mise en service, l'exploitation produit 550 000 l, soit 100 000 l de plus qu'au début. Les éleveurs ont bénéficié du 1 % européen qui représente près du double dans le bassin Loire-Bretagne.

Et ils achètent du quota chaque fois que cela est possible. Le choix de l'aire paillée répond d'abord à des contraintes économiques. Les éleveurs en avaient l'expérience et en étaient satisfaits. Mais ils reconnaissent que la charge de travail est assez importante pour que cela fonctionne bien. Ils enlèvent les bouses de la litière chaque jour. En hiver, le nettoyage des mamelles prend du temps. Et l'exploitation doit acheter la moitié de la paille. Un racleur nettoie le couloir d'exercice. « C'est le choix de la simplicité. Nous voulions éviter de construire une fumière. » La litière peut être stockée au champ dès lors qu'elle a passé deux mois sous les animaux. Le bâtiment est ouvert à l'est sur la table d'alimentation. Outre l'économie permise par cette option, l'entrée d'air et de lumière favorise l'assèchement.

« L'AUTOCONSTRUCTION A GÉNÉRÉ DES ÉCONOMIES »

La facture a été réduite aussi en jouant sur l'autoconstruction. Les éleveurs ont fourni les pierres nécessaires au terrassement. Ils avaient la chance d'en avoir beaucoup à proximité et estiment l'économie à 30 000 €, surtout grâce au gain sur le transport. Ils ont également posé le bardage en bois. Ils estiment que ce matériau convient bien en claire-voie pour protéger l'intérieur de la pluie et des vents dominants, tout en facilitant la ventilation. Sur les pignons, ils ont préféré de la tôle. « Cela résiste mieux aux intempéries, et pour des raisons esthétiques, on ne voulait pas mettre de bois partout. »

Toujours par souci d'économie et parce qu'ils connaissaient ce système, les éleveurs ont opté pour une salle de traite en simple équipement avec 2 x 14 postes et une dépose automatique. « On prépare un lot pendant que l'autre est branché. On ne perd pas de temps et les griffes tournent en permanence », souligne Armelle. L'installation, de plain-pied, est confortable. Les éleveurs apprécient notamment que le fait de tourner la griffe d'un côté à l'autre entraîne le déclenchement du vide et de la pulsation.

Il faut une heure pour traire à deux personnes, mais il est possible de travailler seul au rythme de 70 VL/h. La nursery est accolée à la salle de traite et les veaux sont nourris au lait entier en fin de traite.

« L'annuité représente 65 €/1 000 l pendant douze ans. Notre prix d'équilibre est à 318 €/1 000 l, compte tenu de nos rémunérations. Les prix de ces deux dernières années, 340 € en 2012 et 370 € en 2011, nous donnent une marge de sécurité », analyse Éric. La hausse du quota de 100 000 l en trois ans n'a pas posé de problème de main-d'oeuvre. L'augmentation des produits a allégé la charge des remboursements.

Si le projet initial ne concernait que les équipements indispensables, les éleveurs font déjà évoluer leur installation. En 2013, le Gaec a investi dans un silo pour le maïs et un hangar à fourrages, soit un total de 80 000€. En 2014, ils vont construire une dalle en béton pour stocker l'ensilage d'herbe.

Et d'autres aménagements ont été pensés afin que le bâtiment s'adapte à des besoins futurs difficiles à définir. La profondeur de l'aire paillée (12 m) permet de recevoir trois rangs de logettes, soit 175 places au maximum. La capacité de la fosse (1 500 m3) en tient compte. La centrale hydraulique est dimensionnée pour deux racleurs. En revanche, cette configuration n'offre que 128 places à l'auge et des espaces de repos insuffisants.

« NOUS AVONS PRÉVU L'AMÉNAGEMENT DE LOGETTES »

Dans un premier temps, les éleveurs évaluent l'investissement complémentaire à 40 000 € pour 100 logettes avec matelas. L'intérêt réside dans la réduction de la charge de travail et la possibilité de loger plus d'animaux dans le même espace. Cette évolution n'est pas décidée mais pour Éric, il était important que le bâtiment puisse s'adapter. L'élevage possède une autorisation administrative pour 100 vaches.

L'achat d'options est envisagé pour gagner du temps. Un chien électrique permettrait de traire seul plus facilement. Un Dac serait utile aussi. Pour l'instant, la complémentation est apportée individuellement à l'auge. À terme, les génisses pourraient être logées sur le site, ce qui serait plus pratique. L'emplacement de leur étable est prévu en face de celle des vaches. Aujourd'hui, elles occupent l'ancien bâtiment. « Notre investissement nous permet de produire du lait dans de bonnes conditions et d'envisager l'avenir, y compris d'éventuelles crises comme en 2009, avec sérénité », souligne Éric.

PASCALE LE CANN

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