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L'oncle Sam nous prépare une invasion... économique celle-là.

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Paradoxalement, c'est l'année du 70e anniversaire de la Libération de l'Europe par les Alliés, que l'on apprend subrepticement que l'Oncle Sam nous prépare une invasion. Économique celle-là. Les généraux qui établirent les plans du D-Day ne sont plus là mais de nouveaux stratèges du commerce mondial les remplacent. Les armes de destruction massive ne sont pas toujours celles que l'on croit. Car comment expliquer que de par le monde, les paysans sont les plus nombreux, les plus pauvres et les plus mal nourris.

Rendons hommage à nos libérateurs, à leur plan Marshall... mais de Gaulle a quand même dû se fâcher pour que la France conserve sa souveraineté. Plus tard, en 1962, en lançant une nouvelle négociation du Gatt, l'équipe du président Kennedy voulait augmenter les exportations vers le marché commun et réduire les investissements américains dans cette zone défavorable à leur balance commerciale. Mais surtout, empêcher l'Europe des Six d'évoluer vers une politique étrangère indépendante de Washington. En les obligeant à adopter une position commune, le Kennedy Round renforça involontairement la construction du marché commun. Mais à quel prix ? Nous subissons encore les conséquences de cet accord donnant droit aux Américains de nous envoyer des produits de substitution aux céréales (PSC) sans droits de douane, le fameux soja US. On le voit, des accords de cinquante ans ont toujours des répercussions sur notre agriculture.

Aujourd'hui, le futur traité transatlantique menace-t-il l'Europe ? Le TIPP doit établir le libre-échange commercial entre les États-Unis et l'UE (tiens, ça recommence !) et se terminer en 2015. Les négociations se déroulent en catimini. L'objectif : constituer un marché commun de 820 millions de consommateurs en supprimant les droits de douane. Il vise surtout à harmoniser les normes sanitaires, de sécurité et d'hygiène. Une voiture homologuée en France le serait automatiquement aux USA. Mais que penser du boeuf aux hormones, du poulet désinfecté au chlore, du lait à la BST...? Quel intérêt d'une AOC ou AOP pour un Américain pour qui cette notion est complètement absente de son vocabulaire et constitue, à ses yeux, une entrave au libre-échange. Bientôt un livarot made in Californie ?

Les produits laitiers exportés aux États-Unis subissent actuellement des droits de douane de 8 % supérieurs à ceux que nous importons. Nous pouvons mathématiquement penser que cet accord nous serait favorable. Trop simple, car le nouveau système d'assurance revenu, mis en place aux USA, va doper leur production de lait. Nous avons invoqué et obtenu l'exception culturelle. Or, il y a sans doute d'autres points plus vitaux.

Mais le plus inique est sans doute cette possibilité qui serait donnée à une multinationale d'attaquer en justice un État souverain et démocratique pour préjudice commercial. Par exemple, une multinationale appelée Lone Pline Ressources attaque le gouvernement canadien qui lui interdit la fracturation hydraulique pour l'exploitation du gaz de schiste. Elle réclame 250 millions de dollars de préjudice pour « avoir violé son attente légitime d'un environnement économique et juridique stable ». Des multinationales possèdent un pouvoir économique plus important que nombre de pays. Le dollar est une monnaie plus stable que l'euro, surévalué et défavorable aux exportations. En affaires, il n'y a pas d'état d'âme. Entre un militaire et un requin de la finance, difficile de dire lequel est le plus dangereux.

PASCAL POMMEREUL

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