Enquête... en quête de ?
C’est bien beau d’afficher de grandes ambitions. Encore faut-il s’en donner les moyens.
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Sodiaal, en quête d’avenir, lance une grande enquête auprès de ses producteurs, collaborateurs, consommateurs et partenaires. Son président, Damien Lacombe, les invite tous à donner leur avis : « Nous devons imaginer le rôle de la coop pour l’ensemble de la chaîne de la filière. Nous devons ensemble nous engager pour demain. » J’ai consulté l’enquête destinée aux coopérateurs. Sodiaal ne manque pas d’ambition, et pose cette question : « Peut-on être la plus grande coop de France et conserver une proximité locale ? » Ben oui, président, parce que c’est juste le fondement d’une coop que d’être au service de ses adhérents ! L’un n’empêche pas l’autre, à condition de créer les outils qui conservent le lien avec la base. Être la plus grande coop de France ne peut être une fin en soi, si c’est pour rémunérer en dessous de la moyenne et donner ainsi à ses concurrents privés une base de prix bas qui dessert les autres producteurs dans les négociations.
Autre question : « Faut-il mieux rémunérer des petits groupes de producteurs sur certains territoires, ou collecter l’ensemble des producteurs sur tout le territoire et mutualiser les prix ? » Choix cornélien réveillant l’individualiste qui sommeille en nous, et qui nous pousse à sauver notre peau d’abord. Au début du siècle précédent, le fondement des coops est bien né du mutualisme. Nos grands-parents ont étendu le concept de l’entraide locale dans les fermes à la construction d’entités sur le principe que tout seul, on va plus vite, ensemble, on va plus loin. La question devrait donc être : « Comment collecter sur l’ensemble du territoire et être le mieux-disant en matière de prix, à l’instar des coops des pays nordiques ? » Comment, aussi, respecter les différences historiques de prix liées à des transformations locales ? En 2016, la coop Agrial racheta le privé Guilloteau, dont les producteurs bénéficiaient d’un prix supérieur avec la transformation fromagère. Depuis, la coop fait pression pour uniformiser les prix au détriment des producteurs du Sud-Est. Une partie de ceux-là ont relevé la tête et ont créé leur propre fruitière. Reste maintenant à savoir de quelle manière Agrial compte approvisionner son usine… Comment LSDH, qui vend 90 % de sa production en lait liquide, arrive à payer plus de 390 € de moyenne (TPCQC) ? À quoi sert d’obtenir des prix français rémunérateurs si c’est pour compenser des pertes à l’export, très concurrentiel, et obtenir ainsi un prix moyen faible ? Étant la plus grosse coop de France, pourquoi ne pas faire respecter la loi Égalim ? Et pourquoi se laisser rouler dans la farine chinoise Synutra à Carhaix ? Et il manque une question essentielle : « Pensez-vous que pendant les dix dernières années, Sodiaal a répondu à vos attentes ? »
Gérer une coopérative n’est pas une sinécure, tant besoins et avis des unes et des autres diffèrent. Le privé le sait bien, et l’adage « diviser pour mieux régner » est de plus en plus d’actualité. Comment comprendre la scission des trois OP du Centre qui ont quitté l’AOP Sunlait pour le privé Savencia ? Au moment où les producteurs, groupés, exigeaient le respect de leur contrat, certains ont préféré lâcher la proie pour l’ombre. Désespérant ! Pas facile, la démocratie participative.
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