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RÉSEAU EDF UNE SOURCE D'ÉNERGIE ET D'OPTIMISME

EDF (European Dairy Farmers) est une association d'éleveurs laitiers, apolitique et indépendante. Elle rassemble 465 membres issus de vingt et un pays. Leur objectif est de partager des idées, des connaissances et des expériences. Ils se réunissent chaque année en congrès et comparent leurs coûts de production.EDF

Les membres du réseau EDF (European Dairy Farmers) sont unanimes : cette association leur apporte des échanges extrêmement riches. Elle leur permet de prendre du recul par rapport au quotidien. Et elle leur donne le moral.

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EST-CE UN CLUB ? UN GROUPE D'ÉLITE ? Le réseau EDF (European Dairy Farmers) commence à être connu en France, mais sa définition reste floue pour beaucoup. À la veille du congrès 2016, qui se tiendra fin juin à la Baule (Loire-Atlantique), nous avons voulu en savoir plus. Nous sommes allés à la rencontre de quatre éleveurs français qui adhèrent à ce réseau depuis plusieurs années.

EDF a la réputation d'être un groupe élitiste rassemblant de grosses exploitations : qu'en est-il exactement ?

Les membres d'EDF ont sans doute des exploitations plus grandes que la moyenne de leur pays, mais cela s'explique et n'est pas un objectif en soi. « Il est plus facile de se libérer du temps quand on n'est pas seul sur son exploitation », selon Stéphane Bourhis. Il insiste sur la nécessité de ne pas diaboliser les grandes exploitations. « Il faut relativiser et voir de quoi on parle en matière de nombre de vaches par UTH, par exemple. Moi, comme beaucoup de jeunes, je ne voulais pas m'installer seul parce que je tiens à avoir une vie sociale et familiale normale. Ce besoin pousse à l'agrandissement et cela va continuer. »

Loin de la taille des exploitations, la caractéristique majeure de ce réseau se trouve dans l'état d'esprit de ses membres. « Le point commun est d'abord la curiosité, l'envie de prendre du recul par rapport au quotidien en regardant ce qui se passe ailleurs », pour Marie-Pierre Lubet. Elle considère EDF comme le service R & D (recherche et développement) de son exploitation. « Tous recherchent d'abord les échanges et les partages d'expérience. »

« Il n'y a pas de jugement et chacun peut expliquer librement ses succès ou ses échecs », précise Kévin Rémy. « Ceux qui ne jouent pas ce jeu ne restent pas longtemps. Les membres d'EDF sont passionnés par leur métier. Dans le groupe français, et c'est le thème de notre congrès, nous défendons d'abord la diversité », ajoute Carl Cheminal.

Les membres partagent aussi une certaine vision d'éleveur chef d'entreprise qui assume ses choix. Un véritable état d'esprit. « Face à un problème, on se retrousse les manches et on cherche des solutions », raconte Marie-Pierre. « Lors du congrès français en décembre 2015, nous n'avons pas parlé du prix du lait. C'est un élément sur lequel nous n'avons pas de prise. En revanche, nous nous sommes concentrés sur nos marges, avec l'idée de trouver des pistes d'amélioration pour gagner en rentabilité », explique Kévin. Une démarche constructive, et qui remonte le moral.

Cette conscience de sa propre responsabilité est un marqueur fort du réseau, en opposition avec une philosophie répandue en France, plus prompte à rejeter la faute sur d'autres et à descendre dans la rue quand ça ne va pas.

Que vous apporte l'adhésion à EDF ?

Énergie, oxygène, optimisme. Le groupe apporte avant tout la force et l'envie d'avancer. Il donne des raisons de croire en l'avenir. Il est source d'enrichissement personnel et professionnel. Le sérieux des échanges, toujours fondés sur des chiffres, n'empêche pas une belle convivialité unanimement appréciée. Les éleveurs viennent chercher du concret, des idées, des innovations. Ils arrivent avec l'envie de partager leurs propres expériences. « On rencontre des gens qui travaillent dans d'autres conditions, qui ont des points de vue différents. On compare nos résultats, on cherche à expliquer les écarts. Cela aide à avancer dans sa propre réflexion, à construire un projet. Et l'on se rend compte que les autres aussi ont leurs contraintes. Cela permet de relativiser les siennes », explique Stéphane. Ces rencontres permettent de prendre du recul et de voir sa propre exploitation sous un autre angle, qui fait mieux ressortir ses atouts.

« Dans les périodes difficiles comme aujourd'hui, on se rend compte que tout le monde est touché. Et que pour s'en sortir, il faut se plonger dans les chiffres. Ces échanges m'ont convaincu que c'est par la maîtrise du coût de production, mais aussi grâce au volume produit, que l'on peut dégager de la rentabilité », détaille Carl Cheminal.

En quoi est-il intéressant de comparer les coûts de production avec ceux d'éleveurs d'autres pays, éventuellement très différents ?

Si les contextes sont différents, les vaches restent des vaches ! Les congrès EDF accordent une grande place aux visites d'élevages et là, tous les sujets techniques sont abordés : élevage des veaux, conduite du tarissement, problèmes sanitaires, qualité du lait... Autant de thèmes sur lesquels il est toujours possible de progresser.

De plus, les comparaisons de coût de production s'effectuent à l'intérieur des groupes nationaux. Et il est intéressant de souligner que les écarts sont plus importants à l'intérieur de ces groupes qu'entre les pays !

Comprendre la logique stratégique des grandes exploitations visitées en Allemagne l'an dernier n'est pas dénué d'intérêt. Leur modèle à 1 500 vaches ou plus a sans doute peu d'avenir en France. « Mon objectif est d'optimiser mon système, raconte Kévin, pas de chercher un modèle à reproduire. Voir pourquoi ces élevages ont grandi, ce qu'ils ont gagné ou pas en économie d'échelle, cela donne des pistes de réflexion pour ma propre exploitation. »

« Leur rigueur est intéressante. Ces éleveurs savent d'où ils viennent et où ils vont. Comprendre leur stratégie me renforce dans la mienne », rajoute Stéphane. Cela le conforte aussi dans ses choix. « Avec 25 ares accessibles par vache, je suis sur un modèle de production intensif dans une région, la Bretagne, où l'on vante beaucoup les atouts de l'herbe. Cela me conforte de voir qu'ailleurs, des systèmes intensifs sont économiquement solides et donc viables. »

Carl a été impressionné par ce qu'il a vu il y a quelques années lors du congrès au Royaume-Uni. « Il faut savoir que dans le réseau, ce pays est, avec l'Irlande, celui qui parvient le plus régulièrement à être profitable. Ce sont des troupeaux de plusieurs centaines de vaches qui pâturent et vivent dans des bâtiments extrêmement simples et fonctionnels. » Les clés de la réussite de ce modèle low cost sont valables pour les élevages français : une forte productivité de la main-d'oeuvre, une bonne efficacité des charges opérationnelles, des investissements réduits avec des équipements bien entretenus. Pas ou peu de mécanisation sur ces élevages, mais cela est payant.

Pouvez-vous citer un exemple concret de ce que vous a apporté le réseau ?

Stéphane Bourhis est allé au congrès en Allemagne alors qu'il s'interrogeait sur le protocole de tarissement. Il s'est inspiré de ce qu'il a vu sur des élevages qui obtenaient de bons résultats sur ce plan. « Désormais, je garde les taries à proximité de la ferme pour mieux les surveiller, quitte à mettre les génisses plus loin. Je les conduis en lots avec une ration beaucoup plus précise, surtout le dernier mois. Depuis, je n'ai pas eu de fièvre de lait et les lactations démarrent mieux. »

Quant à Marie-Pierre, elle a découvert chez un éleveur breton une astuce pour mieux nettoyer les aires d'exercice afin de réduire les problèmes de Mortellaro : « Il s'agit tout simplement de fixer des brosses de balai sous le racleur. Cela permet un bon nettoyage des rainures, et les vaches s'en portent mieux. »

Pour sa part, Kévin s'est intéressé à l'élevage des veaux en Allemagne. Il avait déjà été surpris de voir des élevages américains qui donnaient d'importantes quantités de lait et obtenaient des croissances rapides. « J'ai vu en Allemagne un éleveur qui faisait la même chose et ses génisses vêlent à 19 mois. Depuis, je donne à mes veaux 110 à 115 kg de poudre de lait. Ils démarrent très bien. Mes dernières génisses font 240 kg à six mois contre 180 à 200 kg pour les lots précédents. »

PASCALE LE CANN

Stéphane BOURHIS, 34 ans, à Scaër (Finistère). En Gaec avec ses parents. 110 vaches et 950 000 l sur 145 ha. Système intensif avec 25 ares d'herbe accessibles/vache. Membre d'EDF depuis 2013.

Marie-Pierre LUBET, 38 ans, à Bouvines (Nord). En Gaec à deux associés à mi-temps. 500 000 l de lait sur 50 ha. Membre d'EDF depuis 2011.

Carl CHEMINAL, 35 ans, à Bussy-Albieux (Loire). En Gaec avec Amandine, sa femme, avec un salarié. 90 vaches et 900 000 l sur 97 ha. En conversion bio. Membres d'EDF depuis 2009.

Kévin RÉMY, 29 ans, à Nouillonpont (Meuse). En EARL avec son père, deux salariés. 130 vaches et 1,4 Ml de lait sur 260 ha dont 160 ha en cultures de vente. Membre d'EDF depuis 2011.

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