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NOUS ATTENDONS UN MORATOIRE SUR LES CONTRATS ET LES OP

Gérard Durand Secrétaire national à la Confédération paysanne en charge de l'élevage, et en particulier de la production laitière. Il est producteur de lait dans la Loire-Atlantique dans un Gaec à trois associés avec 500 000 l de quotas et 90 ha de SAU.

La Confédération paysanne s'oppose à la FNPL sur la notion d'organisations de producteurs (OP) par laiterie. Son entrée prochaine à l'interprofession nécessitera des compromis difficiles à imaginer aujourd'hui.

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Vous avez récemment rencontré le nouveau ministre de l'Agriculture. Quel message lui avez-vous fait passer ?

Gérard Durand : Celui des éleveurs français qui se sentent abandonnés depuis de nombreuses années. Aujourd'hui, les grandes cultures bénéficient de prix rémunérateurs et touchent entre 60 et 80 € d'aide européenne par heure de travail (cinq heures de travail pour un hectare de blé avec 300 à 400 € de DPU à la clé). De l'autre côté, les éleveurs achètent leurs matières premières de plus en plus cher, amortissent des investissements lourds et touchent entre 7 et 8 € d'aide par heure de travail. Il faut envoyer un message politique fort aux éleveurs. Et pour le secteur laitier, nous attendons la mise en place d'un moratoire sur la LMA et la contractualisation de façon à remettre à plat ce qui a été décidé dans la précipitation et de façon inéquitable pour les producteurs. Nous ne sommes pas opposés à la contractualisation dans la mesure où un cadre législatif garantit l'équité entre producteurs et transformateurs. Ce n'est pas le cas aujourd'hui. Il semble que nous ne soyons pas le seul syndicat à faire cette demande au ministre.

Pourquoi la CP affiche-t-elle une opposition aussi forte à l'effort d'organisation des producteurs en OP ?

G. D. : Présenter les OP par laiteries, qui se constituent en ce moment, comme un renforcement du pouvoir de négociation des producteurs est une escroquerie. Dans ce schéma, les producteurs atomisés dans leurs OP n'auront plus aucun pouvoir ni sur la gestion des volumes ni sur la fixation des prix. Que ceux qui sont persuadés du contraire viennent m'expliquer comment cela se passera après 2015. Ils n'en ont aucune idée. S'ajoute à cela une mainmise de la FNPL sur ces OP.

Le discours a beau insister sur le pluralisme syndical, personne n'est dupe. Nous comprenons que les producteurs signent le contrat pour sécuriser leur collecte mais l'adhésion à une OP n'est pas obligatoire. La seule OP qui vaille est une OP transversale capable d'assurer une défense collective des producteurs, quelle que soit l'entreprise.

Comment envisagez-vous alors votre entrée à l'interprofession ?

G. D. : Se mettre autour d'une table pour discuter de prix et de contrats avec les transformateurs, nous savons le faire. Mais avant cela, il sera nécessaire de mieux définir le champ d'action de l'interprofession, organisation de droit privé où, rappelons-le, les producteurs sont minoritaires face à deux collèges de transformateurs. Ce n'est pas le lieu pour décider de la politique laitière française, c'est-à-dire quels types d'exploitations sur quels territoires. C'est au niveau de FranceAgriMer, où siègent les pouvoirs publics, qu'il faut exiger ce débat. Ensuite, nous siégerons à l'interprofession en tant que Confédération paysanne et non pas sous une quelconque section spécialisée lait dont personne ne peut juger de la représentativité. Quant au fonctionnement du collège producteurs, il sera possible dans la mesure où chacun participe à la recherche d'un compromis. Si la FNPL nous impose le fait majoritaire, il est clair que nous saurons exprimer nos désaccords.

Comment arriver à des compromis avec de telles divergences affichées ?

G. D. : Il y a des gens intelligents dans chaque bord pour réussir des compromis. Pour ce qui est de la Confédération paysanne, nous porterons ce qui nous apparaît fondamental : maintenir l'emploi paysan et des exploitations laitières à taille humaine sur l'ensemble du territoire, un prix du lait payé identique pour tous et conserver un pouvoir de défense collectif face aux transformateurs. Notre première exigence à l'interprofession sera d'inclure un critère « coût de production » dans la fixation du prix du lait. Enfin, nous ne partageons pas cette volonté de conquête des marchés émergents qui ne profitera, au final, ni aux producteurs ni aux consommateurs.

PROPOS RECUEILLIS PAR DOMINIQUE GRÉMY

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