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RÉGULATION DE LA PRODUCTION LAITIÈRE Le temps des désillusions en Suisse

La volonté politique d'appliquer les décisions de l'interprofession a manqué en Suisse.

L'interprofession n'ayant pas une vraie volonté de stabiliser le marché, les producteurs demandent le droit de gérer eux-mêmes la production.

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Pour accompagner la fin des quotas, la filière laitière suisse avait élaboré une stratégie à faire rêver les Français. Elle s'articulait autour d'une interprofession forte (IP lait), avec des prérogatives inimaginables dans l'UE au regard de son droit de la concurrence. L'IP lait a non seulement la possibilité de fixer une recommandation de prix, mais aussi de réguler les volumes de lait sous contrat correspondant au marché suisse, l'excédent devant obligatoirement être proposé à une bourse pour une valorisation au prix du beurre-poudre dans l'UE. Et surtout, cette interprofession a le pouvoir légal d'imposer à tous, membres ou non, ce qu'elle décide en terme d'évolution des volumes.

Le manque d'unité des producteurs avec son corollaire et l'insuffisance du regroupement de l'offre ont eu la peau de ce dispositif idéal sur le papier (voir page « Dites-nous pourquoi » p. 16). Non pas que l'interprofession ne prenne des décisions visant à stabiliser le marché, bien au contraire. Mais elles ne sont que de façade, la volonté politique de les faire appliquer n'y étant pas. En janvier, l'IP lait a voté, à la majorité requise, de réduire les volumes sous contrat et de maintenir le prix du lait de mars à juin. Les prix ont baissé et le lait a continué de couler à flot. Ce manque de volonté vient d'abord des transformateurs qui ont intérêt à maintenir le marché déséquilibré. Mais aussi des 20 % de producteurs qui misent sur le volume plus que sur le prix, et sur la disparition de leurs voisins…

Forte de ce constat, une large majorité à la Fédération des producteurs de lait (FPSL) estime que la seule voie d'avenir pour stabiliser le marché serait d'accorder ce pouvoir de gérer les volumes aux seuls producteurs. Avec, bien sûr, la force obligatoire leur permettant de contraindre les 20 % dans une stratégie de pénêtration à freiner leurs ardeurs.

Des forces trop divergentes dans l'interprofession

C'est tout le sens de la motion présentée récemment au Conseil national. Elle propose aussi un dispositif plus simple que le modèle suisse à trois échelons (lait contractuel, de bourse et de dégagement) : pas de segmentation si les marchés sont porteurs. Dans le cas contraire, elle suggère la mise en place d'une pénalité de 5, 10 ou 30 cCHF/kg au-delà du droit de livraison 2008-2009, ces moyens financiers étant mis entre les mains de l'IP lait pour gérer ces excédents. Car il ne s'agit pas, pour le porteur de cette motion, de casser l'interprofession.

« Si l'IP lait n'arrive pas à du concret très rapidement pour responsabiliser ceux qui produisent sans se soucier du marché, c'est le chemin à tester. Je ne crois pas que l'interprofession puisse tout régler. Les forces y sont trop divergentes. Je crois plutôt aujourd'hui à une plus forte différenciation des responsabilités du côté de la production, de la transformation et du commerce », explique Peter Gfeller, président de la FPSL.

JEAN-MICHEL VOCORET

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