AOC COMTÉ Changement de ton contre les adeptes de la ration complète

Il pourrait y avoir, d'ici peu, pléthore de mélangeuses d'occasion à vendre dans la zone de l'AOC comté. Au point que certains récents acheteurs de ces matériels pensent qu'il faut s'en débarrasser avant que les prix de reprise plongent. Explication. Depuis trois ans, les vendeurs de mélangeuses font des affaires chez les producteurs de lait à comté du Doubs et du Jura. Il y en aurait une centaine sur la zone. Sauf que le CIGC, l'interprofession du comté, a encadré leur utilisation. Est autorisé le mélange du foin et du regain, base hivernale des rations. Pas question, en revanche, d'y ajouter les concentrés et de faire une ration complète, la raison d'être de ces machines.

Un contrevenant menacé de non-collecte

La décision inscrite dans le cahier des charges a été prise compte tenu des risques de dérive d'ajout d'eau, obligatoire avec des mélangeuses à pales ou vis horizontales pour que la farine ne coule pas au fond de la cuve. L'apparition des machines à vis verticales, permettant ce mélange à sec, avait conduit certains à rêver d'un assouplissement. Surtout que l'AOC cousine du morbier avait, entre-temps, autorisé la pratique de la ration complète, pour autant qu'il n'y ait pas d'ajout d'eau ni de betteraves fourragères. Le rêve s'envole. Le CIGC a confirmé qu'il ne bougerait pas. Changement de ton aussi contre ceux qui s'entêtent à travailler en ration complète mélangée, certains ne cachant même pas qu'ils mouillent. Témoin, les propos récents tenus lors de l'AG de l'Ucaft (Union de coopératives à comté) qui défend le strict respect du cahier des charges au nom des valeurs du terroir… celles qui permettent de valoriser le lait à 400 €/1 000 l ou plus. « Ceux qui veulent travailler en ration complète n'ont qu'à quitter l'AOC. Il y en a assez qui souhaiteraient nous rejoindre. » Oui, mais on voit mal les accros de la ration complète perdre au moins 100 € en rejoignant le lait standard.

Autre signe du durcissement de ton, les premiers contrôles inopinés par un organisme tiers ont eu lieu cet hiver et les avertissements sont tombés. Un producteur a même été menacé de suspension de collecte s'il ne revenait pas aux règles. La mise à l'herbe l'a sauvé. Nul doute qu'il recevra la visite de Qualité France l'hiver prochain. L'organisme ne se contentera pas du fax reçu avec son engagement à n'utiliser la mélangeuse que pour mélanger et distribuer son foin-regain.

JEAN-MICHEL VOCORET