ESPÈCES PROTÉGÉES « La protection des écrevisses va me coûter cher »
La délimitation d'une zone de protection autour du ruisseau qui traverse son exploitation ne sera pas indolore pour Jérôme Choulet.
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Combien vont coûter les aménagements pour protéger les écrevisses ? Depuis plusieurs mois, la question travaille Jérôme Choulet. Installé depuis 2005 en Gaec avec sa mère à Belvoir (Doubs), il conduit sur 100 ha de SAU un troupeau de 55 montbéliardes et sa suite pour 300 000 l de lait à comté.
Des 65 agriculteurs du Doubs concernés par la mise en musique de l'arrêté européen de protection du biotope écrevisses à pattes blanches, il est de ceux où la facture est la plus salée. Pas moins de 120 000 € selon un premier devis établi par la chambre d'agriculture dans l'objectif d'aménagements faits pour durer, mais surtout pour ne pas contrarier les pratiques de l'exploitation. À savoir le pâturage des animaux (laitières et génisses) et la fauche pratiqués sur les sept parcelles (50 ha au total) directement impactées par l'arrêté car traversées par la Barbèche, ruisseau abritant les précieuses écrevisses.
Des forfaits d'aides déconnectés des coûts réels
Pour cela, ces aménagements prévoyaient 3 500 m de clôtures barbelées pour barrer, comme exigé, sur un ou deux côtés l'accès des animaux aux 2 km de ruisseau. Ils incluaient aussi huit ponts pour éviter le passage des bovins et du matériel de fauche dans le lit de la rivière. Compris aussi une dizaine de points d'abreuvement à créer, à défaut pour les animaux de pouvoir accéder au ruisseau.
Inutile de dire que la DDT en charge d'attribuer des aides à ces investissements a toussé à la lecture du devis arrivé sur son bureau. A la suite de la rencontre organisée sur le terrain pour juger de la pertinence de tous ces aménagements, l'administration a mis un peu d'eau dans son vin. La DDT et Onema (police de l'eau) ont accepté de ramener la longueur de berges à clôturer à 3 000 m. Validée aussi la réduction de moitié du nombre de ponts, avec l'aménagement en contrepartie de deux passages à gué. De 120 000 €, on est revenu à 80 000 €, une somme qui laisse Jérôme toujours aussi inquiet sur la capacité de son exploitation à digérer la note. « Là où le bât blesse, c'est que l'administration nous annonce 75 % de subventions mais sur la base de forfaits de dépenses déconnectés des coûts réels. » Exemple pour les points d'eau : entre la cuve, le flotteur, l'aménagement d'une zone empierrée, les tuyaux à enterrer et deux bonnes journées de travail, il estime sa facture à 2 500 € en moyenne par point d'abreuvement. La DDT est sur une base de 760 €. Idem pour les clôtures. « Pour arrêter efficacement une vache qui a soif, il faut 4 fils barbelés et un piquet tous les 2 m, soit un coût de 12 €/m, main-d'oeuvre comprise. Le plafond d'aides est à 5 €/m. »
JEAN-MICHEL VOCORET
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