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LE MARCHÉ NATIONAL DOIT AIDER À UN PRIX DU LAIT PLUS ÉLEVÉ

Thierry Roquefeuil, 54 ans, est président de la Fédération nationale des producteurs de lait (FNPL) depuis 2012. Adhérent de SodiaaI, il est à la tête de 500 000 litres dans le Lot sur 104 ha dont 70 ha de prairies aux deux tiers en pente ou caillouteuses. Un salarié et le service de remplacement consolident son exploitation.© YANN CAINJO/GFA

La table ronde du 24 juillet entre GMS, industriels et producteurs remet sur le devant de la scène le marché intérieur qui valorise 50 % de la collecte. Pour la FNPL, il est l'une des clés de la compétitivité laitière française.

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Pourquoi avez-vous démissionné de la présidence du Cniel le 9 juillet ?

Thierry Roquefeuil : À l'occasion d'un conseil d'administration ce jour-là, j'ai sollicité l'analyse des laiteries sur les difficultés que vivent les producteurs. La Fnil et la FNCL n'ont pas répondu, jugeant que l'interprofession n'est pas l'instance adéquate pour aborder ce sujet. Je ne suis pas d'accord. Il faut savoir dire stop ! Le Cniel est largement à l'écoute des entreprises. Il finance des actions de promotion des produits laitiers. Il leur facilite la vie dans l'exportation vers les pays émergents, etc. Ce travail fait sur l'aval doit l'être aussi sur l'amont. Il doit être possible au Cniel d'aborder l'avenir et la compétitivité des exploitations laitières en Europe et à l'international. Olivier Picot, de la Fnil, assure l'intérim jusqu'à la prochaine élection. Mon mandat finissait en février 2016.

La FNPL estime possible une revalorisation du prix du lait de 30 à 40 €/1 000 l d'ici à la fin 2015. Ne donne-t-elle pas de faux espoirs aux producteurs (p. 18) ?

T.R. : Le consensus dégagé le 24 juillet entre GMS et transformateurs doit permettre ce retour sur les prix de base d'août à décembre. Pour les marques d'entreprises, les GMS acceptent une valorisation du prix 2015 à 340 €/1 000 l (N.D.L.R. : en 38/32, toutes primes confondues). Les fromages, principalement vendus ainsi, sont donc concernés. Pour les MDD et premiers prix, des produits sensibles, elles se sont engagées à revenir à des tarifs fondés sur un lait autour de 360 €. Elles sont d'accord pour s'approvisionner français. Les industriels devraient donc retrouver des parts de marché. Il reste à convaincre la restauration hors domicile. Des industriels avancent qu'ils perdront en compétitivité sur leurs PGC export s'ils payent le litre 3 à 4 c€ de plus mais ces produits, qui défendent les couleurs françaises, ne concurrencent pas ceux du pays importateur. Tout ceci mis bout à bout doit permettre une revalorisation du prix de base de 30 à 40 € d'août à décembre. Ce sera peut-être un peu plus ou un peu moins. Tout dépendra de l'attitude des GMS, de ce qui a été déjà versé par l'entreprise, de la part importante ou non des produits industriels dans son mix-produits, etc.

Un certain nombre de producteurs jugent qu'ils résisteraient mieux à la crise s'ils avaient pleinement bénéficié des marchés 2014. Faut-il inventer un nouveau calcul du prix ?

T.R. : À la FNPL, les avis sont partagés. Moi, je suis favorable à ce que l'on soit plus en phase avec le marché. Ce sera l'un des enjeux de la réécriture des contrats pour 2017. Ceux en vigueur utilisent des formules de calcul écrites il y a cinq ans. Afin d'être en adéquation avec le marché, ils sont bâtis sur le duo prix-volumes. Sauf que l'an passé, en conjoncture très favorable, les éleveurs n'ont pas pu produire au niveau de leur potentiel. Cette année, on leur fait assumer cette adéquation par le prix. On ne peut pas continuer ainsi. L'un des éléments de leur compétitivité est la relation qu'ils ont avec leur entreprise.

Les producteurs sont-ils suffisamment armés pour faire face aux crises ?

T.R. : Il est facile de reprocher un manque de compétitivité. Les producteurs le sont, avec une variante de taille : ils ne bénéficient pas des mêmes conditions environnementales, fiscales et sociales que leurs voisins européens. N'oublions pas non plus que notre modèle repose sur la diversité des produits. Voulons-nous le garder ou l'agrandissement est-il la seule voie à la compétitivité ? Même si, par la démographie, il est inéluctable, ils ne désirent pas un agrandissement à tout-va. Retrouver un niveau de valorisation sur le marché national est l'une des réponses. La guerre des prix entre GMS a paupérisé la filière. Aux politiques et aux entreprises de dire aussi quel modèle ils souhaitent dans dix ans.

PROPOS RECUEILLIS PAR CLAIRE HUE

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