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PRODUCTION LAITIÈRE EN IRLANDE « Un temps pourri depuis mars 2012 »

Les vaches de Seán O'Donnell pèse 50 à 75 kg de moins que leur poids habituel, une source d'inquiétude à la saison des IA.©DR

Après une année de pluie et de froid continus, Seán O'Donnel raconte la pénurie de fourrage qui frappe son pays.

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Depuis plus d'un an, Seán O'Donnell patauge. Levé à minuit pour rentrer son troupeau sous un énième déluge, afin d'éviter de transformer une nouvelle prairie en champ de boue, l'Irlandais traverse une mare où l'eau lui monte jusqu'aux chevilles. « J'avais fait beaucoup de travaux d'infrastructures, réensemencé des pâturages : dix-huit mois de boulot sont à refaire. »

Le surcroît de travail n'est pas le principal souci de cet éleveur de 32 ans, qui peine à trouver de quoi nourrir ses 90 laitières et ses 30 génisses sur les 60 ha de prairies de sa ferme de Ballina, dans l'ouest de l'Irlande.

Le pays vit son deuxième printemps pourri et manque de fourrage. Les coopératives affichent un numéro vert du ministère de l'Agriculture pour assister les éleveurs en détresse et le syndicat IFA a financé, début mai, l'importation de 3 200 t de foin français.

Seán O'Donnell raconte cette descente aux enfers météorologiques : « Mars 2012 a été notre dernier mois de beau temps. Nous faisons normalement une première coupe d'ensilage en mai, mais nous avons dû attendre juin. La deuxième, prévue en juillet, a eu lieu en août avec de faibles rendements. Ici, il a plu tous les jours du mois de juin à la fin de l'année. »

Lorsqu'il se voit forcé de rentrer ses vaches en octobre, un mois plus tôt que d'habitude, Seán achète 50 t d'herbe ensilée en prévision d'un hiver difficile. Peine perdue : retournées au pré le 18 février, ses bêtes s'y retrouvent vite au régime sec.

6 à 7 kg de concentrés début avril au lieu d'1 kg

La croissance de l'herbe reste bloquée par la pluie et le vent du nord. « Depuis début avril, je dois acheter des aliments. Je donne 6 à 7 kg de concentrés au lieu d'1 kg, soit 300 € de plus par jour. » Et les vaches restent plus maigres qu'à l'accoutumée.

La production laitière de l'exploitation, habituellement de 450 000 l, a chuté de 350 l par vache en 2012. « La seule chose qui nous sauve, c'est le prix passé de 0,32 €/l à 0,37 € aujourd'hui. »

Sa marge pour l'année écoulée est en baisse de 40 % par rapport à 2010 et 2011, quand chaque vache rapportait 2 000 €. Fort de ces résultats, Seán venait justement de s'endetter pour acheter de nouvelles terres en vue de l'expansion prévue en Irlande après la fin des quotas en 2015 (voir L'Éleveur laitier de février 2013). Sans regretter, il reconnaît faire partie des éleveurs irlandais qui remettent en cause l'objectif d'augmenter la production nationale de 50 % d'ici à 2020.

« Vous voyez beaucoup de frisonnes sur les marchés aux bestiaux, alors que ce n'est pas la saison. » Lui qui tablait jusqu'ici sur 3,5 VL/ha, a décidé de descendre à 3 VL. Et lorsqu'il parviendra de nouveau à dégager des liquidités, il en mettra une partie de côté pour le prochain coup dur météo : « Il vaut mieux produire moins de façon durable, que beaucoup en risquant de faire faillite », affirme-t-il.

THOMAS HUBERT

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