La recherche s'affine pour réduire encore les antibiotiques chez les animaux
L'exposition globale des animaux d'élevage aux antibiotiques est basse et relativement stable ces dernières années en France mais des progrès sont encore possibles dans certaines filières, que les autorités sanitaires souhaitent mieux identifier grâce aux vétérinaires.
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Après une diminution de 49% de l'exposition aux antibiotiques, toutes espèces confondues, depuis 2011, « un palier semble avoir été atteint ces dernières années », indique l'Agence sanitaire (Anses) dans son rapport annuel publié mardi à l'occasion de la journée européenne d'information sur les antibiotiques.
L'indicateur d'exposition s'établit à 0,307 en 2024, en légère baisse par rapport à 2023, quand l'objectif du plan Ecoantibio 3 est de maximum 0,3 pour 2023-2028. Ce plan vise à limiter l'usage d'antibiotiques chez les humains et les animaux pour éviter le développement de bactéries résistantes aux traitements (antibiorésistance).
Il arrive un moment où on ne peut plus pousser, parce qu'il faut assurer la santé animale et la sécurité alimentaire.
« Il arrive un moment où on ne peut plus pousser, parce qu'il faut assurer la santé animale et la sécurité alimentaire. L'antibiotique ne doit pas être supprimé (...) il doit être prescrit quand il faut, mais uniquement quand il faut », a déclaré Jean-Yves Madec, directeur scientifique chargé du dossier antibiorésistance à l'Anses, lors d'une conférence de presse.
Après avoir rappelé que « l'antibiorésistance chez les animaux peut contribuer à l'antibiorésistance chez les humains », il ajoute que la France, autrefois parmi les premiers administrateurs d'antibiotiques aux animaux, figure désormais parmi les bons élèves dans l'UE, dont la réglementation est particulièrement stricte. En revanche, pour les humains, la France est toujours l'un des premiers prescripteurs de la zone.
Les chiffres annuels d'exposition des animaux de l'Anses sont calculés à partir des quantités vendues déclarées par les fabricants, en prenant en compte les doses, la durée de traitement et le nombre d'animaux en France.
Mais depuis deux ans un nouveau système permet aux vétérinaires, pharmaciens, distributeurs et fabricants de faire remonter des données sur les usages des antibiotiques via une plateforme informatique.
Sur les près de 21 500 vétérinaires inscrits à l'ordre, environ 800 ont effectué une déclaration en 2023 puis environ 4 000 en 2024. L'Anses appelle donc la profession à se mobiliser pour lui permettre de « faire des analyses plus fines », par espèces, sous-catégorie animale, géographie ou date de prescription, énumère Anne Chevance, de l'Agence nationale du médicament vétérinaire (ANMV).
Prévention et biosécurité
Une plus grande finesse dans l'analyse permettrait de cibler les filières dans lesquelles il est encore possible de progresser pour dépasser le « palier » atteint de façon globale.
« La meilleure façon de ne pas utiliser un antibiotique, c'est que les infections soient moins nombreuses », ajoute Jean-Yves Madec.
Avec comme pistes: une meilleure couverture vaccinale, qui empêcherait des infections plus tard dans la vie de l'animal, ou l'amélioration de la biosécurité et de la prévention.
Dans la filière laitière, des « progrès » sont à faire sur la biosécurité, notamment avec un meilleur contrôle des allées et venues des différents professionnels sur les exploitations, afin de limiter la dissémination des souches, ajoute-t-il.
La filière bovine est d'ailleurs celle qui, depuis 2011, a le moins réduit son utilisation des antibiotiques (-15%), loin derrière les porcs (-65%) et la volaille (-71%), qui étaient des gros consommateurs.
Au-delà des animaux d'élevage, les chiffres de l'Anses couvrent aussi les animaux domestiques, chez qui la marge de progression est grande.
« On avait eu une réduction entre 2011 et 2016 mais entre 2016 et 2022, on a observé une légère tendance à l'augmentation (...) Entre 2023 et 2024, on a une baisse de 12% de l'exposition », souligne Anne Chevance.
Mais cette diminution cache une forte augmentation, quasiment continue depuis 2011, de l'exposition à des traitements à base d'amoxicilline et d'acide clavulanique, alors que cette association « favorise le développement des résistances ».
« Ce qui est encore plus préoccupant, c'est que c'est une molécule extrêmement partagée entre l'Homme et l'animal », conclut Jean-Yves Madec.
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