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Gérer l’eau sur une ferme laitière : un enjeu crucial face au changement climatique

L’eau est nécessaire aux bovins pour leur métabolisme, refroidir leur organisme et véhiculer les rejets (urine, fèces).

Indispensable pour le fonctionnement d’une ferme laitière, l’eau est aujourd’hui soumise à des tensions tant sur la quantité que sur la qualité. Le Cniel et l’Idele ont présenté au Space un guide pour gérer de façon optimale cette ressource.

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« En France, l’élevage ne représente que 2 % de l’eau prélevée », explique Romain Salles, chargé de projet eau en élevage à l’Institut de l’élevage, en préambule de la conférence organisée conjointement par le Cniel, l’Idele, le GDS Mayenne et Seenovia au Space 2025, pour présenter l’ouvrage La ressource en eau sur une ferme bovins lait.

« À l’échelle d’un élevage de 70 vaches laitières, il faut 3 500 m3 d’eau à l’année dont ¾ servent à l’abreuvement des animaux et 18 % au fonctionnement du bloc traite », poursuit le chargé de projet.

Dans le contexte de changement climatique, la tension sur l’eau s’accentue. « Dans certains départements comme l’Aveyron, le Cantal, la Lozère ou encore les Pyrénées-Atlantiques, les éleveurs sont déjà confrontés à des ruptures d’eau potable, les collectivités leur demandant de se déconnecter pour soulager les réseaux », constate Romain Salles.

À horizon 2070, la quantité de pluie devrait varier de - 10 % à + 10 % à l’échelle de l’année. L’été, la disponibilité de la ressource en eau sera plus compliquée du fait d’une baisse des pluies davantage marquée avec - 33 % dans le Sud-Ouest, et une hausse de l’évapotranspiration en raison de l'augmentation des températures.

Les différentes ressources d’eau

Actuellement, l’eau potable venant du réseau (EDCH) est majoritairement utilisée par les fermes laitières. Sa qualité est optimale, puisque traitée, mais le coût à l’usage est important, et augmente. 

Les éleveurs se tournent donc vers d’autres ressources comme les eaux souterraines via des forages ou puits. Le coût de création et d’équipement d’un forage se situe entre 10 000 et 30 000 €. Celui d’un puits est beaucoup plus faible, il est souvent existant et l’investissement réside dans son équipement (pompe, raccordement…), soit entre 3 000 et 8 000 euros. « La qualité de l’eau est souvent meilleure dans les forages, le sol ayant pu jouer son rôle épurateur. Un puits, s’il est mal protégé et conçu, peut générer des contaminations de surface », explique Romain Salles.

Autres ressources : les eaux de surfaces (cours d’eau, mare, étang). Elles peuvent être utilisées pour l’abreuvement des animaux mais il est nécessaire de prévoir des aménagements pour diminuer les risques sanitaires.

Quant aux eaux de toitures, elles peuvent être récupérées pour le lavage des sols, ou éventuellement l’abreuvement si elles sont filtrées et traitées. Les contaminations bactériologiques sont très importantes en raison des fientes d’oiseaux ou encore des poussières recouvrant les toitures. Pour utiliser cette ressource, il faut :

Le coût d’une telle installation, au niveau de l’investissement et du fonctionnement, est donc très important. « C’est l’ultime ressource quand on n’a pas d’autres alternatives », reconnaît le chargé de projets de l’Idele.

Synthèse des avantages (+) et inconvénients (-) des diverses ressources en eau. (© Cniel et Idele)

La qualité de l’eau

La qualité de l’eau se définit par sa physico-chimie (les minéraux) et par la bactériologie. Ce second paramètre est le plus sensible : il peut impacter la santé des animaux (diarrhée, avortement, mort…) et la qualité du lait.

« Des analyses de l’eau doivent être réalisées au moins une fois par an, mais aussi en cas de problèmes sanitaires ou d’épisodes pluvieux intenses par exemple », explique Romain Salles. L’analyse doit se faire en entrée de réseau (entrée de bâtiment) et en bout de ligne (fond du bâtiment), mais surtout pas dans l’abreuvoir !

Du côté physico-chimique, on s’intéresse à la conductivité, au pH, à la dureté, aux nitrates… Au niveau bactériologie, sont recherchés : les entérocoques, les coliformes, les germes, E. coli…

En cas de problème détecté, un diagnostic sur site est nécessaire : on vérifie que les ouvrages sont bien protégés, que l’entretien des installations est satisfaisant ainsi que le dispositif de traitement. Si besoin de désinfecter l’eau, plusieurs traitements bactériologiques sont possibles : avec du chlore et ses dérivées, du peroxyde d’hydrogène ou encore des ultraviolets. « Toutes les technologies sont efficaces sur les virus à bactérie, confirme Romain Salles. Le choix du produit s’effectue selon la cible du traitement, les conditions d’application et aussi bien sûr l’usage de l’eau. »

Comparaison des différents traitements d’eau applicables en élevage. (© Cniel et Idele)

Focus sur l’abreuvement

L’ouvrage collectif réalisé sur l’eau émet des recommandations pour un abreuvement optimal des animaux. « Au pâturage, l’abreuvoir doit idéalement être placé à moins de 200 m du bord de la parcelle, sinon les vaches se déplacent en groupe pour aller boire. Les animaux dominés risquent de ne pas boire à leur soif et la partie de la parcelle la plus éloignée de l’abreuvoir se retrouve aussi moins pâturée. » Si l’emplacement est crucial, il est également nécessaire d’avoir un linéaire important, au moins 3 mètres, ainsi qu’un volume conséquent de 1 000 l minimum, afin que les animaux puissent se positionner des deux côtés. Le flotteur doit être raccordé par le dessous, cela évite que les bêtes se grattent dessus et l’arrache. Enfin, une stabilisation des abords est importante. »

« En bâtiment, il faut compter 10 cm de longueur d’abreuvoir par vache, un abreuvoir collectif pour 20 vaches et une distance entre deux abreuvoirs de 20 m maximum. Le débit d’eau doit être de 15 à 20 l/min, la hauteur d’eau dans l’abreuvoir de 7 cm minimum. Enfin, un espace suffisant autour des abreuvoirs est à prévoir pour permettre le passage d’autres animaux pendant que certains s’abreuvent. »

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