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ENSILAGE D'HERBE : LA MAT N'EST PAS AU RENDEZ-VOUS

L'objectif d'une teneur en protéines de 15 % passe par une récolte au plus tard au stade début épiaison, lorsque 10 % des épis sont sortis.© SÉBASTIEN CHAMPION

Le printemps froid et sec a pénalisé la valeur protéique des premières coupes d'ensilage. Mais comme chaque année, les récoltes précoces tirent leur épingle du jeu.

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LES ENSILAGES D'HERBE 2014 SONT GLOBALEMENT DÉCEVANTS EN MAT. En cause, une fertilisation modérée ou trop tardive, mais surtout un printemps sec et froid qui a pénalisé la minéralisation de l'azote », commente Jean Zapata. C'est l'occasion pour le conseiller en fourrages, du contrôle laitier du Puy-de-Dôme, de rappeler quelques règles de base pour atteindre un objectif d'au moins 15 % de MAT : fertiliser dès le démarrage en végétation autour d'une somme de températures de 200°C qui correspond plus ou moins, selon les années, au 10 mars en plaine, au 25 mars en semi-montagne et vers le 10 avril en montagne ; saisir les fenêtres climatiques de deux jours de beaux temps pour récolter un fourrage jeune, au plus tard au stade début épiaison lorsque 10 % des épis sont sortis, ce qui correspond à une somme de températures de 650 à 700°C pour des prairies riches en ray-grass anglais ou dactyle ; limiter le temps de ressuyage au sol (35 heures au maximum) pour réduire les pertes de valeurs nutritives liées à la respiration des plantes ; enfin, utiliser systématiquement un conservateur d'ensilage.

QUELLES VALEURS ALIMENTAIRES ?

Les 130 premières analyses réalisées par le contrôle laitier sur des fourrages précoces se caractérisent par un taux de matière sèche élevé (supérieur à 31 %), une teneur en cellulose faible pour les plus précoces (21 à 22 %) et une teneur en MAT entre 12 et 13 %. « Que ce soit en prairies permanentes ou temporaires, on obtient pour ces ensilages de bonnes valeurs énergétiques, avec des teneurs supérieures à 0,9 UFL et une concentration de 0,85 UF/UEL », précise le conseiller. Plus au nord, en Normandie, les 400 analyses Agrinir, réalisées par Littoral Normand Conseil Élevage, révèlent une moyenne très proche : 0,83 UFL, 12,4 % de MAT, 75 g de PDIN et 69 g de PDIE pour une teneur en matière sèche de 36 %. « Cette moyenne masque un écart important de 0,65 à presque 1 UFL et de 6 % de MAT jusqu'à 20 % pour la meilleure analyse, souligne Olivier Veron, nutritionniste de l'organisme de conseil. De tels niveaux de protéines sont obtenues par une récolte précoce, dans des prairies très riches en légumineuses. À l'inverse, les valeurs basses proviennent de récoltes tardives, chez des éleveurs qui misent sur un rendement élevé en première coupe, ou qui n'ont pas pu récolter au bon stade en raison de mauvaises conditions climatiques. »

QUELLE COMPLÉMENTATION ?

LES GÉNISSES

« Avec un bon ensilage d'herbe à volonté, contenant de 70 à 80 g de PDIE, il est possible de faire l'impasse sur le correcteur azoté pour l'élevage des génisses de plus d'un an, explique Olivier Veron. La teneur moyenne des ensilages 2014 est donc trop juste. Elle nécessitera un apport de 300 g à 500 g de correcteur selon la source azotée. » À titre d'exemple, avec des objectifs de 800 g de GMQ, la complémentation azotée de génisses âgées de 12 à 18 mois, consommant entre 7 et 8 kg d'ensilage, pourra se faire avec 500 g de soja, et avec 300 g d'un concentré dosant 17 % MAT pour les génisses de plus de 18 mois en complément de 9 à 10 kg d'ensilage. Concernant les génisses de 6 à 12 mois : 5 kg d'ensilage ingéré + 1 kg de concentré à 17 % de MAT et 125 g de PDI (200 g de soja + 800 g de céréales). « Avec une teneur moyenne de 36 % de MS, il n'est pas indispensable d'apporter de la fibre en plus. Mais si les teneurs sont inférieures, on sécurisera la ration avec 2 kg de paille ou de foin. Dans tous les cas, on évitera pour les génisses des ensilages d'herbe inférieurs à 25 % de matière sèche. »

LES VACHES LAITIÈRES

« L'ensilage d'herbe dans la ration présente l'intérêt de réaliser des économies sur le correcteur azoté, si sa qualité le permet. Il sécurise également les rations acidogènes à base de maïs par son apport de fibres et via la dilution du taux d'amidon. Mais le risque d'une incorporation trop importante est de déconcentrer la ration et donc de devoir compenser par une augmentation du correcteur énergétique ».

Au regard de la valeur moyenne 2014, le nutritionniste recommande de limiter la quantité d'ensilage d'herbe à 25 % de la ration. Ceci permettra, par rapport à une ration 100 % maïs, de réduire la quantité de correcteur de 400 à 500 g/VL/jour (soit 3,5 kg d'un correcteur soja/colza). « Par contre, si l'on retient la valeur des meilleurs ensilages, c'est-à-dire affichant des valeurs au moins égales à 16 % de MAT pour 105 g de PDIN, 90 g de PDIE et plus de 0,9 UFL, on pourra monter jusqu'à 30 % et passer à 2,8 kg de correcteur (soja-colza). » Quant aux valeurs les plus basses, elles n'auront aucun impact sur les réductions des besoins en correction azotée.

LES ERREURS À ÉVITER ?

Jean Zapata insiste pour sa part sur la faiblesse de la teneur en cellulose des ensilages précoces : « Ils sont très digestibles, mais manquent de fibres. La fibrosité du maïs permettra de corriger ce risque, comme celle du foin dans nos rations d'altitude ensilage + foin-regain. Mais dans ce cas, il faudra veiller à un apport minimal de 3 à 4 kg de foin », explique-t-il.

La vigilance s'imposera surtout avec les rations qui incorporent de fortes proportions de regains, également pauvres en cellulose. L'apport d'un foin encombrant sera nécessaire au bon fonctionnement de la panse, de préférence mélangé à la ration pour éviter le tri.

JÉRÔME PEZON

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