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DÉSHERBAGE DU MAÏS : COMBINER LA CHIMIE ET LE MÉCANIQUE

Lorsqu'il est correctement réalisé, le désherbage mécanique n'abîme pas la culture. © MATHIEU CHANEL

L'expérience des agriculteurs bio permet de réduire les traitements phytosanitaires tout en sécurisant le rendement. Les éleveurs conventionnels en bénéficient.

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LA PROSCRIPTION DU DÉSHERBAGE CHIMIQUE a conduit les agriculteurs bio à travailler autrement pour assurer malgré tout le rendement de leurs cultures, notamment du maïs. Ils associent le désherbage mécanique à des choix de rotation qui permettent une sélection des espèces adventices. Par exemple, le liseron est quasiment absent en système herbager bio, alors que les chardons et rumex sont difficiles à combattre. Ce savoir-faire est riche d'enseignement. Les personnes travaillant à l'amélioration de la qualité de l'eau dans les bassins versants bretons ne s'y sont pas trompées. Elles se sont rapprochées d'Agrobio 35 pour réduire l'utilisation de désherbants chimiques chez les éleveurs conventionnels de ces bassins versants. « La suppression des traitements est difficile à envisager sur le maïs conventionnel quand on ne joue pas sur les rotations, précise David Roy à Agrobio 35. En revanche, on peut limiter les doses. » La technique du désherbinage, qui associe un travail du sol entre les rangs et une pulvérisation sur les rangs, ne fonctionne pas très bien. En effet, le désherbage mécanique nécessite un temps sec. Il génère de la poussière qui bouche les buses. À l'inverse, l'application d'un traitement chimique est plus efficace avec une météo un peu humide. D'où l'idée du désherbage alterné qui associe un travail mécanique sans s'interdire un rattrapage chimique. Pour faire connaître et développer cette pratique, une forme de contrat incluant des conseils et un engagement sur le rendement a été conçue. Il est proposé aux agriculteurs qui souhaitent réduire les doses de phytosanitaires tout en préservant leur sécurité fourragère. L'engagement porte sur deux ans et l'agriculteur engage au maximum 5 ha. Cette durée doit suffire pour acquérir une autonomie.

UN LIT DE SEMENCES NIVELÉ ET SANS MOTTES

L'action commence par une formation avant le semis de maïs. Car la préparation du sol conditionne l'efficacité du désherbage mécanique. « Il faut un lit de semences nivelé et sans mottes pour favoriser un contact régulier entre la houe et le sol », précise David Roy. De plus, le semis doit être profond, à 5 cm, pour que les plants ne soient pas arrachés par les engins. L'idéal est bien sûr de semer en sol chaud afin de favoriser un démarrage rapide qui donnera au maïs ses chances de gagner la course contre les adventices.

Une fois le semis réalisé, les techniciens d'Agrobio 35 passent une ou deux fois par semaine voir toutes les parcelles concernées. Ils examinent l'état du salissement pour décider avec l'éleveur des actions à mener. L'objectif est de toujours privilégier une action mécanique tout en préservant le potentiel de rendement. Parmi les trois outils utilisés en désherbage mécanique du maïs, la bineuse, la herse étrille et la houe rotative, David Roy a une préférence pour la dernière. En effet, la herse étrille est équipée de dents qui vibrent et cassent les adventices. Le réglage est délicat. La vitesse doit être de 1 à 2 km/h par feuille de maïs. C'est très peu et le maïs peut souffrir en cas d'erreur de réglage. En outre, il ne faut pas passer lorsque la culture est au stade allumette. Malgré sa capacité à détruire des adventices à un stade avancé, la herse étrille est finalement peu adaptée en agriculture conventionnelle.

Quant à la bineuse, elle présente l'inconvénient de ne travailler qu'entre les rangs. Il reste une bande de 15 cm qui n'est pas touchée, ce qui est ennuyeux lorsque le salissement est fort sur le rang.

LA HOUE PEUT DÉTRUIRE PRESQUE TOUTES LES ADVENTICES

Avec la houe rotative, il n'y a pas de réglage à effectuer. Ce sont les dents incurvées qui font le travail. En revanche, il faut rouler vite (18 km/h) pour être efficace. Cette vitesse élevée rebute un peu au début par crainte d'abîmer le maïs. Mais cela fonctionne très bien. La houe attaque les adventices au stade filament. Si elle passe suffisamment tôt, elle détruit 95 à 100 % des mauvaises herbes. L'efficacité se réduit quand les plantes se développent.

La houe permet un débit de chantier élevé (5 ha/h). Cet outil nécessite une puissance de traction conséquente. En pratique, dans les contrats prévus sur les bassins versants, des accords sont conclus avec des ETA ou des Cuma équipées afin de s'assurer que le désherbage mécanique est réalisé dans de bonnes conditions.

Le plus souvent, un passage de houe est préconisé huit à dix jours après le semis. Un deuxième intervient au stade 3-4 feuilles du maïs pour détruire les relevées. Cette conduite permet en moyenne d'économiser une dose de traitement. Pour la suite, la décision est prise au moment du passage du technicien. Il se fonde notamment sur les résultats d'une étude réalisée par Agrobio 35, il y a quelques années, afin d'évaluer la nuisibilité des différentes adventices. Car certaines peuvent durement pénaliser le rendement, quand d'autres ont peu d'impact, même en étant présentes. Depuis 2005, Agrobio 35 a suivi ainsi 1 240 ha de maïs. Dans 20 % des cas, le désherbage mécanique a été suffisant. Car dans une optique de maintien des rendements en agriculture conventionnelle, un rattrapage chimique est souvent nécessaire. La stratégie adoptée varie selon la météorologie.

LE TRAVAIL DU SOL ACCÉLÈRE LE RÉCHAUFFEMENT

L'efficacité du désherbage mécanique reste dépendante du climat. Il faut 36 heures de beau temps après le passage de la houe pour une destruction complète des mauvaises herbes. Les conditions de portance des sols ne permettent pas toujours de passer au moment idéal et les adventices développées résistent mieux.

Mais le désherbage mécanique présente aussi des avantages agronomiques liés à son action sur le sol. Ce travail accélère le réchauffement de la terre quand le printemps est froid. Il favorise aussi la pénétration de l'eau en année sèche.

Au final, le bilan des actions est positif et un nombre croissant d'agriculteurs semble motivé par cette conduite alternative. D'autres régions s'y intéressent. David Roy a réalisé des formations en Mayenne, Haute-Normandie et dans les Deux-Sèvres. La technique peut s'appliquer au colza avec une houe rotative. C'est plus délicat avec des céréales, où l'efficacité est plus aléatoire.

PASCALE LE CANN

« L'objectif est de réduire les traitements phytosanitaires tout en préservant le rendement. » David Roy, Agrobio 35

Agrobio 35 propose aussi des formations sur le terrain aux éleveurs afin qu'ils puissent devenir autonomes.

© P.L.C.

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