Cétose : les levures à l’essai
Compléments alimentaires. Un premier test réalisé au Gaec des Crêtes tend à démontrer l’intérêt d’un apport de levures vivantes dans la ration avant et après vêlage, pour corriger le déficit énergétique du début de lactation.
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Le peripartum (trois semaines avant et après la mise bas) est une étape cruciale pour la maîtrise de la santé de l’animal et l’optimisation de ses performances tout au long de la lactation. C’est pourquoi en collaboration avec Rhône Conseil Élevage et Vetagro-Sup (l’école vétérinaire de Lyon), la société Philéo-Lesaffre a mis en place un essai de un an (de septembre 2015 à septembre 2016), au Gaec des Crêtes, pour mesurer l’effet d’une levure vivante distribuée au cours de cette période. « La souche Saccharomyces cerevisiae est enregistrée comme additif zootechnique (1), car elle a démontré son efficacité en lactation pour moduler le pH ruminal et ainsi prévenir l’acidose à une dose de 5 g/VL/jour, explique Christine Julien, responsable R & D chez Philéo-Lesaffre. Comme les principales difficultés rencontrées en élevage se concentrent autour du peripartum, nous avons aussi voulu tester l’intérêt d’un apport à plus forte dose à cette période pour prévenir les dérives métaboliques, grâce à une amélioration de la digestion. »
Des VHP avec des fourrages de mauvaise qualité
Le Gaec des Crêtes compte 120 holsteins traites par deux robots. « Notre objectif est de maintenir une production élevée tout en maîtrisant le coût de concentrés, explique Didier Lhopital. Cet enjeu renforce le risque d’acétonémie en début de lactation. C’est pourquoi je voulais participer à cet essai. En effet, nous avons une part de vente directe et en matière d’image, l’apport d’un complément alimentaire sera beaucoup plus facile à expliquer aux consommateurs que la pompe à propylène. »
Malgré une préparation au vêlage de trois semaines, l’acétonémie devient un vrai problème pour ce troupeau de haute valeur génétique. Il faut dire que la variabilité du climat d’altitude (900 m) n’est pas sans impact sur la qualité des fourrages. « Ces deux dernières années ont été marquées par des maïs pauvres en amidon, explique Michel Vagneur, consultant nutrition. Cette situation complexifie la gestion du bilan énergétique en début de lactation chez ces VHP, d’autant plus lorsque le prix du lait n’incite pas à forcer sur la complémentation. Elle s’est traduite par un amaigrissement marqué, un risque d’acétonémie élevé et un dérapage des résultats de reproduction. »
Plus d’état et une meilleure réussite à l’IA
Dans ce contexte, l’apport des levures vivantes visait à stimuler l’ingestion, pour limiter le déficit énergétique. Deux lots de 23 vaches ont servi de support à l’étude : un lot témoin et un lot recevant 10 g/VL/j de levures vivantes (Saccharomyces cerevisiae) pendant la phase de préparation au vêlage, puis 20 g pendant vingt et un jours post-partum via un distributeur installé sur les robots.
La production laitière et les taux ont été mesurés par le contrôle laitier. Laurine Desmaris, de Rhône Conseil Élevage, a mesuré la teneur en BHB sanguine et la glycémie. La conseillère a également évalué les notes d’état corporel et de remplissage du rumen. Voici les résultats.
+ 2 kg de lait : au cours des trois premiers mois de lactation, la production laitière se révèle plus élevée pour les vaches du lot levures, soit en moyenne 34,6 kg/VL/j (± 7,8 kg/j), contre 32,6 kg (± 10,2 kg/j) pour le lot témoin. « Cette différence est non significative, sans doute en raison du faible effectif », commente Laurine Desmaris. Ce résultat est obtenu sans affecter les taux : au cours des trois premiers mois de lactation, le lot avec levures affiche un TB de 42,7 et un TP de 30,8, contre 42,8 de TB et 30,9 de TP pour le lot témoin.
La teneur en BHB du sang à J + 22 est clairement plus faible pour les vaches du lot levures : 0,79 mmol/l contre 1,41 mmol/l. Pour rappel, la valeur de 1,2 mmol/l est considérée comme le seuil de détection de la cétose subclinique. La glycémie n’est pas affectée par le traitement à J + 8 et J + 22.
Les notes d’état corporel et de remplissage du rumen sont significativement supérieures pour les vaches du lot levures à J + 8 : 2,94 (2,42 pour le lot témoin) et 2,81 (2,10).
La première insémination a eu lieu à 120 jours de lactation en moyenne quel que soit le lot. Le taux de réussite est de 27,8 % pour le lot témoin et 50 % pour le lot levures.
« L’amélioration des notes d’état corporel et de remplissage du rumen traduit une reprise de l’ingestion après la mise bas supérieure pour les animaux du lot levures, d’où une baisse de la teneur en BHB, analyse Patrice Dubois, directeur de Rhône Conseil Élevage. Cette étude confirme donc la corrélation entre l’acétonémie et la baisse de production et du taux de réussite à l’insémination artificielle. Reste à confirmer ces résultats, car la part de la génétique dans les performances des deux lots n’a pas été prise en compte. »
Enfin, il faudra également aborder l’aspect économique et mettre en balance le gain de deux litres de lait par vache laitière pendant trois mois avec l’augmentation du coût de la ration induite par un probiotique au prix de 20 €/kg.
Jérôme Pezon(1) L’appellation « additif zootechnique » attribuée à la souche Saccharimyces cerevisae ou Actisaf Sc47-CNCM I-4407 (voir étiquette de l’aliment ou du CMV) est soumise à la réglementation européenne.
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