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SORGHO SUCRIER BMR : UNE ALTERNATIVE AU MAÏS

Maîtriser les facteurs de verse sera indispensable au développement de cette plante pauvre en lignine.© DR

Le sorgho sucrier BMR assure des performances zootechniques d'un bon niveau. Moins exigeant en eau, il pourra remplacer avantageusement le maïs dans des terres séchantes. Reste à maîtriser sa culture qui demande un certain savoir-faire.

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ÉTÉS SECS PLUS FRÉQUENTS, restrictions d'irrigation, terres superficielles : plusieurs éléments militent pour des cultures moins gourmandes en eau que le maïs, capables d'assurer un fourrage de qualité quelle que soit la météo de l'année. Le sorgho a cette réputation, mais ses qualités nutritionnelles en deçà du maïs ont jusqu'alors freiné son développement dans les fermes laitières

Pas de confusion. Il y a le sorgho grain, le sorgho sucrier et les BMR

Cette graminée présente plusieurs types. D'abord le sorgho grain, parfois nain, est comme son nom l'indique destiné à faire du grain. Le sorgho sucrier a une biomasse plus développée, mais il est moins riche en amidon qu'un sorgho grain. Sa valeur alimentaire est essentiellement dans la tige avec une teneur en amidon qui varie selon les hybrides : entre 8 et 15 %, voire 0 % pour la classe des sorghos à photopériode sensitive qui fleurissent très tardivement. Ces sorghos sucriers sont destinés à l'ensilage. À ne pas confondre avec les sorghos fourragers (Sudan grass) destinés à être pâturés ou fauchés. Dernièrement sont arrivés des États-Unis les sorghos sucriers BMR (Brown midrid) à nervure centrale brune sur la feuille. Ces plantes ont subi une mutation génétique naturelle qui inhibe le gène responsable du processus de lignification, tout en conservant sa rusticité originale. L'intérêt est de doper la valeur alimentaire.

Performances zootechniques. Une efficacité démontrée

Les sorghos grains et les sorghos sucriers communs ne permettent pas des performances zootechniques semblables à l'ensilage de maïs : près de 4 kg de lait en moins pour les sorghos grains constatés à la ferme expérimentale des Trinottières (Maine- et-Loire). Même tendance pour un ensilage de sorgho sucrier associé à du maïs-ensilage (50 %-50 %) : la production de lait brut est inférieure de 3,4 kg. Mais les derniers essais faits aux Trinottières avec des sorghos sucriers BMR donnent une tout autre tendance. Associés à 50 % à du maïs comme précédemment, ils permettent la même production de lait brut avec davantage de TB, soit une production de lait à 4 % supérieure (1 kg/jour), malgré une ingestion plus faible due à un taux de MS inférieur. C'est la démonstration d'une efficacité alimentaire supérieure au maïs seul. Cette qualité est confirmée par un essai sur génisses laitières, comparant une ration à base de sorgho BMR à une ration de maïs-ensilage. Le sorgho BMR a permis de meilleures croissances en hiver comme au pâturage.

Valeur alimentaire. Excellente digestibilité de la partie végétative

Il n'y a pas, aujourd'hui, d'équation de prédiction spécifique pour approcher la valeur énergétique d'un sorgho BMR. La méthode enzymatique utilisée pour le maïs n'est pas adaptée. Basée sur l'amidon, elle sous-valorise le sorgho qui en contient peu. Le semencier Semental, qui importe les variétés BMR, a donc pris l'initiative de faire analyser des échantillons. Arvalis a ainsi mesuré leur dégradation en sachet dans le jus du rumen de vaches fistulées. Résultats : entre 0,90 et 0,95 UFL/kg de MS, une valeur énergétique obtenue avec une très faible teneur en amidon, qui confirme l'excellente digestibilité de la partie végétative. L'absence de lignification explique ses valeurs et offre, en outre, plus de souplesse et de sécurité à la récolte qu'un maïs. La digestibilité de la plante entière se dégrade peu avec l'augmentation de la MS.

Itinéraire technique. Des questions encore en suspens

Si les BMR montrent des performances zootechniques équivalentes au maïs, la conduite de la culture soulève des interrogations : date de semis, désherbage, densité, fertilisation. Avec à la clé une question importante : comment prévenir une tendance à la verse constatée dans plusieurs parcelles ?

« Un sorgho BMR ne se conduit pas comme un maïs. L'efficience de l'eau et de la température est bien supérieure avec un sorgho. Une irrigation excessive, trop d'azote, une densité de semis trop élevée sont autant de facteurs de verse qu'il faut maîtriser », insiste Jean-Louis Hérin, responsable technique chez Semental. Aujourd'hui, le semencier conseille un écartement de 35 cm (un rang sur deux d'un semoir à céréales) avec huit à dix plants par mètre linéaire, soit une densité de 280 000- 300 000 grains par hectare. La préparation du sol doit être particulièrement soignée en privilégiant les parcelles à sols filtrants et légers. Les variétés disponibles étant tardives ou demi-tardives, la date de semis est un compromis à trouver entre la température du sol nécessaire à une levée rapide (12 °C) et le niveau de MS à la récolte. L'optimum serait d'atteindre 30 % de MS. Ce n'est pas toujours le cas avec un semis tardif de fin mai. Mais un produit plus humide s'associera très bien à un ensilage de maïs sec. Le contrôle des adventices est aussi un défi important car la plante y est très sensible et l'offre d'herbicides sélectifs est limitée. Il est vivement conseillé d'effectuer un faux semis détruit au glyphosate afin de maîtriser la levée des adventices. Ensuite, le protocole Spectrum (0,8 l/ ha) à deux feuilles, associé à Boa + Emblem (0,8 l + 1 l/ha) à cinq-six feuilles, a donné des résultats convenables. Il est préférable de traiter des plantes poussantes, de préférence le soir et avec l'hygrométrie qui convient. La fertilisation azotée sera mesurée : une parcelle qui reçoit du fumier une année sur deux n'en nécessitera pas ou peu (30 U au semis). L'ensilage se fait en brins assez longs (2 à 4 cm). La conservation au silo est très facile.

Offre variétale. Sweet Virginia, Big Kahuba et d'autres à venir

Elle est encore limitée, mais Semental annonce de nouvelles inscriptions pour 2010. 7 500 ha de BMR ont été semés en 2009. Deux variétés ont déjà fait leur preuve : Sweet Virginia, un sucrier, qui apporte entre 8 et 15 % d'amidon, et Big Kahuba, un sucrier à photopériode sensitive qui ne fait pas de grain et s'associe très bien à un ensilage maïs dans la ration. D'ailleurs, la vocation des sorghos BMR n'est pas de se substituer au maïs, mais d'offrir davantage de sécurité dans les terres superficielles et les zones où l'irrigation est limitée.

DOMINIQUE GRÉMY

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