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COMMENT RÉDUIRE LE COÛT DES CONCENTRÉS EN PÉRIODE DE CRISE

L'EXPLOITATION - Lait produit : 30 kg/vache/jour - TP : 32 g/kg - TB : 40 g/kg - Prix du lait : 285 €/1 000 kg sans prime qualité - 5,21 euros déduits du prix du lait pour un TP à 31 g/kg - Ration fourragère hivernale : maïs-ensilage à 70 €/t de MS © CLAUDIUS THIRIET

Le prix du lait bas oblige à rechercher des rations hivernales moins coûteuses en concentrés. Trois stratégies retiennent l'attention.

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LA TENTATION EST FORTE de réduire, voire de supprimer les concentrés cet hiver alors que le prix de base moyen de ce trimestre est au plus bas (entre 240 et 260 €/1 000 l dans le grand Ouest). « Avant de se lancer, il faut vérifier l'équilibre de la ration pour éviter de distribuer plus de concentrés que nécessaire », conseille Étienne Doligez, du Contrôle laitier du Calvados. S'assurer aussi que la baisse des concentrés ne conduit pas à un déséquilibre de la ration.

Tourteau de soja. Le remplacer par un correcteur azoté moins cher

Le prix élevé du tourteau de soja (340 à 370 €/t) oblige à s'intéresser à une correction azotée de la ration fourragère moins onéreuse. « L'implantation d'usines de trituration et de bioéthanol offre des matières premières à des prix très compétitifs », constate Étienne Doligez. La piste la plus évidente est la substitution du soja par du tourteau de colza. Même si 1,5 kg de tourteau de colza est nécessaire pour fournir le même niveau azoté que le soja (voir p. 42), avec 160 à 170 €/t (livraison vrac de 25 t), le gain est de 100 € à l'avantage du premier.

Riche en phosphore, le tourteau de colza permet aussi une économie sur les minéraux. Selon les opportunités régionales, le recours aux coproduits est également une piste à creuser. Ainsi, en Basse-Normandie, les drèches de blé humides et déshydratées en provenance des sites de bioéthanol de Lillebonne (Seine-Maritime) et de Bazancourt (Marne) font leur apparition. Le tarif des drèches humides est d'environ 70 €/t, celui des drèches déshydratées de 160 €/t. « Elles ont des valeurs azotées équivalentes au tourteau de colza, en moins solubles, et sont plus riches en énergie. On conseille de les utiliser en association avec une autre source azotée afin de diversifier les protéines. »

Afin de décrocher un prix de l'aliment le plus bas possible, l'idéal est de passer une commande de 25 t livrées en vrac. Cela suppose, en amont, d'aménager des cases de stockage adaptées. Un coût qu'il faut intégrer dans le calcul de l'intérêt économique du changement de correcteur azoté. De même, il faut inclure les frais financiers occasionnés par un emprunt à court terme. Veiller à ce que la matière première s'accorde bien au fourrage.

Concentré de production. Jusqu'où peut-on le réduire ?

La limitation du coût des concentrés peut passer également par la réduction des apports de concentré de production.

- « Jusqu'à 2 kg de concentrés par vache en moins et quel que soit le stade de lactation, cette mesure n'a pas d'incidence sur la santé de l'animal, estime Luc Délaby, de l'Inra de Rennes. La vache compense par plus de fourrages consommés et par une légère diminution de ses performances laitières (NDLR : voir tableaux). » À condition que ces fourrages soient proposés à volonté. « Il faut que les vaches laissent des refus, sinon elles pallieront le déficit énergétique par une baisse de production plus importante », insiste-t-il. Plus prudent, pour les débuts de lactation, Étienne Doligez recommande cette stratégie sur des laitières en état pour ne pas pénaliser la reproduction.

« Mieux vaut d'abord remplacer le concentré de production par un autre moins cher. Des matières premières comme le corn gluten feed sont tout aussi efficaces. Si l'éleveur décide un abaissement du concentré de production de 1 à 2 kg, il doit vérifier son intérêt économique. »

Et s'abstenir avec un prix de l'aliment déjà bas. La baisse du lait, et surtout du TP, pèse sur les résultats et induit un effet contraire à celui recherché.

- Au-delà de 2 kg, tous les deux mettent en garde contre une baisse de production plus importante et un amaigrissement de la laitière en début de lactation. « Une réduction des apports énergétiques conduit l'animal à activer deux leviers : la mobilisation de ses réserves corporelles et une réduction de ses performances laitières, explique Luc Delaby. L'amplitude de la réaction dépendra de son état corporel. Il maigrira plus s'il est un peu trop en état, mais sa production sera moins affectée.

À l'inverse, si son état d'engraissement n'est pas suffisant, il mobilisera moins ses réserves corporelles, ce qui amplifiera la baisse en lait. » En seconde lactation, diminuer au-delà de 2 kg a peu d'incidence sur la mobilisation des réserves corporelles. Cela en a une sur le lait.

Zéro concentrés. Attention danger pour la qualité du lait

Vu le prix du lait, la solution la plus radicale serait de supprimer tous les concentrés, qu'ils soient azotés ou de production. « Cette solution est techniquement envisageable, répond Luc Delaby. Néanmoins, elle aura pour conséquence de réduire de quelques kilos par vache la production laitière journalière et surtout de faire chuter de 2 à 3 g le TP et le TB. » De quoi accentuer la dégradation du prix du lait.

Cette stratégie, exclusivement basée sur les fourrages, requiert en premier lieu une ration équilibrée avec un rapport PDIE/UFL entre 95 et 100 g. L'autre condition est de distribuer les fourrages à volonté et de posséder un nombre de places aux cornadis correspondant au nombre de laitières pour éviter toute compétition alimentaire. De même, les fourrages apportés doivent être ingestibles, sans souillures ni moisissures. Les refus sont quotidiennement écartés.

« Tout doit être mis en oeuvre pour favoriser la consommation des fourrages. Les vaches compenseront alors en partie l'absence de concentré par une ingestion de fourrages supplémentaire, à raison de 0,5 kg de MS par kilo de concentrés supprimé. »

Herbe d'automne. L'intérêt d'une bonne valorisation

Le pâturage d'automne présente un réel intérêt alimentaire en termes de quantité et qualité. Il est un bon complément au maïs-ensilage et permet des économies de concentrés. Ainsi, pour des RGA + trèfle blanc, les Pays de la Loire avancent une valeur de 0,94 UFL, 140 g de PDIN et 105 g de PDIE par kg de MS.

Après un mois sec, les régions ayant reçu des ondées voient leurs prairies repartir. Attention cependant, le temps sec y a favorisé la rouille, ce qui pénalise l'ingestion et la valeur nutritive de l'herbe.

CLAIRE HUE

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