LES TANINS DE CHÂTAIGNIER POUR MIEUX VALORISER LES PROTÉINES DE L'HERBE
Les données scientifiques et indépendantes manquent pour juger ces extraits naturels végétaux. Pour autant, dans la Loire, les éleveurs redécouvrent les vertus des tanins de châtaignier comme conservateurs d'ensilage ou en complément à la pâture.
Vous devez vous inscrire pour consulter librement tous les articles.
INCORPORÉ DEPUIS LONGTEMPS PAR LES FABRICANTS D'ALIMENTS DANS LEURS MÉLANGES, le tanin de châtaignier (composé d'extraits de bois de châtaignier) est commercialisé, en France, sous le nom de Protensil par la société Caribou TG(1). Composé pour l'essentiel de sucres simples et de polyphénols (tanins hydrolysables), ce produit aurait pour propriétés de ralentir le transit intestinal des laitières (les bouses sont plus fermes), mais aussi d'améliorer le TP (1 g/kg environ sur une ration hivernale), sans pénaliser la production laitière.
UN VIEUX PRODUIT REDÉCOUVERT GRÂCE AU WEB
La châtaigne est un vieux produit que des éleveurs curieux ont redécouvert avec internet. C'est le cas dans la Loire où elle est utilisée avec succès depuis deux ans, dans au moins cent cinquante élevages. « À l'époque, des éleveurs des monts du Lyonnais et de la plaine du Forez essayaient de substituer au soja, le tourteau de colza, moins cher, précisent Gilbert Relave et Yves Alligier, du contrôle laitier.
Mais, trop riche en azote soluble, le colza provoquait un déséquilibre de la ration (excès de PDIN/ PDIE). Nos recherches nous ont amenés au tanin de châtaignier. » « En modifiant la composition de la flore du rumen, ce dernier agit indirectement sur le métabolisme de l'azote, explique Yves Alligier, nutritionniste. La réduction de la population de bactéries protéolytiques, qui dégradent l'azote, se traduit par une augmentation de la valeur PDIE de l'aliment et une réduction de l'écart PDINPDIE. Riche en sucres (50 % de la matière sèche) et en tanins (près de 30 % de lamatière sèche), le produit a de plus un effet conservateur sur les ensilages(2) que l'on a découvert par la suite. »Peut-on mesurer précisément l'action du produit sur la valeur alimentaire des fourrages ? Que penser des 3 700 g de PDIE(3) par kg de Protensil annoncés par la société Caribou TG ? En vérité, les données scientifiques récentes et indépendantes font défaut. Les seules informations disponibles remontent à vingt ans. Des essais sur des ensilages, réalisés par l'Inra de Theix sur des moutons, avaient alors montré que la proportion d'azote retenue par l'animal doublait avec le Propensil (14,5 % de l'azote ingéré contre 7 %). Les études pilotées par J.-P. Jouanny, en 1991, avaient aussi indiqué que la production et la qualité du lait étaient équivalentes à celles obtenues avec un ensilage traité au formol. Des essais réalisés dans le Sud-Ouest concluaient à un Ph abaissé de 0,4 point, une augmentation de 50% d'acide lactique, ainsi qu'une forte diminution de l'alcool et de l'acide propionique.
ABSENCE DE NOCIVITÉ D'UN PRODUIT 100 % NATUREL
Dans la Loire, les observations en élevage confirment l'intérêt du produit, aussi bien dans l'ensilage que dans la ration… à condition qu'elle soit suffisamment riche en protéines. En ensilage, les tanins de châtaignier semblent améliorer la conservation des espèces fourragères, même celles pauvres en sucre. Comme les acides, ils paraissent avoir une action positive sur l'herbe de montagne et la luzerne. Avec une odeur améliorée et un effet anti-moississure, les éleveurs pointent l'impact positif sur la conservation du fourrage et l'absence de nocivité d'un produit 100 % naturel. Apporté à raison de 20 à 40 kg/ha selon la prairie, ce dernier est épandu sur le fourrage vert. Au pâturage, les diarrhées paraissent diminuées et le potentiel laitier optimisé, en particulier sur des vaches en début de lactation.
« 50 À 100 G PAR JOUR POUR DES LAITIÈRES À L'HERBE »
« Les quantités à apporter dans la ration varient suivant les objectifs recherchés en matière de PDIE, précise Yves Alligier. S'il s'agit de protéger plus les protéines, on en mettra davantage. À l'herbe sur laitières, les meilleurs résultats sont obtenus avec une quantité journalière de 50 à 100 g/jour. Au-dessus, c'est du gaspillage. En dessous de 50 g, cela ne sert à rien. La dose peut être régulée en fonction de l'état des bouses et de l'urée du lait. » L'apport de tanin de châtaignier dans des rations herbe colza apparaît très intéressant. Rééquilibré, le tourteau de colza initialement pauvre en PDIE peut être utilisé en l'état dans le cadre de rations herbagères riches en azote soluble (PDIN). Livré en sac de 20 kg et en palette de 560 kg, le tanin de châtaignier est un produit très bon marché. Son coût d'utilisation comme conservateur d'ensilage varie de 30 à 40 €/ha. À l'herbe, il s'élève à environ 15 €/VL et par an.
ANNE BRÉHIER
(1) www.cariboutg.eu. Tél. : 05 63 31 09 39. (2) Homologué au milieu des années 90 comme conservateur d'ensilage (n° 9 400 068), vendu comme extrait végétal. (3) De 1 000 g PDIN et de 0,55 UFL.
Pour accéder à l'ensembles nos offres :