Inondations Dans le Pas-de-Calais, des éleveurs les pieds dans l’eau
Selon les premières remontées de terrain, les crues exceptionnelles enregistrées dans le Pas-de-Calais n’ont pas entraîné d’arrêt de collecte, mais les conséquences pourraient se faire ressentir à plus long terme pour les exploitations du littoral.
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Depuis plusieurs jours, les images des inondations dans le Pas-de-Calais tournent en boucle dans les médias : rues submergées, routes coupées, habitants évacués, coupures sporadiques d’eau et d’électricité sur tout le littoral du département. En cause : le passage successif de deux tempêtes en quelques jours. Les éleveurs laitiers ne sont bien sûr pas épargnés par ces événements climatiques d’une ampleur exceptionnelle. Il y a des conséquences directes, liées aux dégâts subits par les exploitations, et d’autres à plus long terme sur le sanitaire, l’état des stocks et des cultures.
C’est pour faire la lumière sur cette situation qu’une délégation de la FNPL emmenée par Thierry Roquefeuil, son président, et Gilles Durlin, membre du bureau et local de l’étape, s’est rendue sur place avec les représentants de l’ADPL 62 (association des producteurs de lait). « D’autres délégations se sont également rendues dans le Finistère et dans la Manche, indique Thierry Roquefeuil. Il nous a paru nécessaire de venir constater sur place, afin de faire la lumière sur les difficultés rencontrées par les éleveurs laitiers. Il s’agit pour la FNPL de remonter l’information auprès des pouvoirs publics et de faire en sorte que chacun soit indemnisé équitablement, à la hauteur des dégâts subis. »
Jusqu’à 1,50 mètre d’eau dans la cour d’une ferme
À Bourthes, commune particulièrement exposée dans une vallée aux sources de l’Aa, Vincent Lardé vient de vivre trois inondations en dix jours, « et nous venons de recevoir de nouvelles alertes, en raison de digues prêtes à céder », explique bouleversé Jean-Claude Lardé. À la retraite, il est venu prêter main-forte à son fils qui, pendant la nuit, a sorti à dos d’homme avec de l’eau en haut des cuisses tous les petits veaux de la nurserie pour les mettre à l’abri. Dans la cour de la ferme, l’eau est montée jusqu’à 1,50 mètre. Résultat : un stock d’engrais et de semences en big-bag bon à jeter, du foin immergé sous le hangar, des balles d’enrubannage éparpillées par le torrent jusqu’à 1 km de la ferme, sans parler des dégradations occasionnées sur le matériel agricole dont l’état des lieux devra être fait.
À quelques kilomètres, sur la commune d’Hesdigneul-lès-Boulogne, ce n’est pas la crue mais le ruissellement des eaux qui a débordé dans la stabulation de Yannick Harlé, dont le siège d’exploitation est à flanc de coteaux. Entre le 15 septembre et le 9 novembre, le cumul de pluies s’élève ici à 700 mm, sans accalmie attendue à court terme.
Pas de lait jeté pour défaut de collecte
Dans ces deux cas, le répit laissé entre deux montées des eaux a permis de maintenir la collecte, contrairement aux départements de la Manche ou du Finistère. « En l’état actuel des informations transmises par les laiteries, il semble que tout le monde a pu être collecté, avec parfois un jour d’avance ou de retard, indique Frédéric Blondel, animateur de l’ADPL. Les pertes de lait devraient donc être limitées. Dans tous les cas, elles seront mutualisées au sein des coopératives et des caisses de péréquations sont prévues chez les privés en cas de force majeure. »
Au-delà des mesures d’urgence, qui consistent à coordonner la mise à disposition de groupes électrogènes ou à trouver des solutions de relogement de lots d’animaux dans les cas les plus extrêmes, le travail de l’ADPL est de recenser l’ensemble des dégâts, dont les conséquences se feront ressentir sur la campagne en cours : impact sanitaire des coupures d’eau et d’électricité sur la qualité du lait, notamment en traite robotisée ; contamination des eaux de forage ; dégradations matérielles ; stocks fourragers et silos immergés ; impossibilité de récolter des parcelles de maïs grain ou betterave encore en terres ou de semer les cultures d’hiver et les couverts végétaux avant le 15 novembre dans des sols à dominante argileuse. « Le classement annoncé de ces intempéries en catastrophe naturelle doit faciliter la prise en charge de tous. Mais il restera des pertes à la charge des éleveurs, liées aux franchises et à la vétusté des installations, s’inquiète Thierry Roquefeuil. Notre rôle est de lister les dégâts dans les territoires impactés pour faciliter le déblocage de fonds exceptionnels avec les collectivités État-Région et cibler les aides vers ceux qui en ont le plus besoin, d’accélérer les procédures d’indemnisation ou de négocier des dérogations concernant la couverture des sols. » Enfin, cette visite a été pour les producteurs locaux l’occasion de soulever des problèmes politiques de gestion de l’eau dans une région très sensible aux risques d’inondations : le drainage, le curage des fossés ou la gestion des écluses.
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