MESURER L'IMPACT ÉCONOMIQUE DU NOUVEAU COLLABORATEUR
Un salarié, combien ça coûte? La réponse ne se cantonne pas à sa seule rémunération. Elle intègre les objectifs personnels et professionnels de l'employeur, qui ne se traduisent pas forcément en euros.
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EMBAUCHER UN SALARIÉ, POURQUOI PAS , mais à combien se chiffrera ce nouveau poste de charges ? », entend-on des producteurs qui réfléchissent à cette piste. « Il ne faut pas s'arrêter au salaire versé et aux charges salariales et patronales afférentes, répond Xavier Beaufils, directeur du conseil agricole de CER France Manche. Il faut aussi tenir compte de ce qu'il apporte à l'entreprise. » En d'autres termes, calculer son coût net et non son coût brut. Sans oublier de le mettre en relation avec l'objectif fixé.
- Le recrutement vise à améliorer les conditions de travail avec des journées moins tendues et plus de souplesse dans l'organisation. Il s'accompagnera alors d'une optimisation fiscale et sociale. La première étant propre à chaque entreprise, attardons-nous sur la seconde qui touche les charges sociales exploitant. Sans amélioration du chiffre d'affaires par de meilleures performances techniques, le coût salarié grèvera le revenu et pourra permettre de descendre sous le plafond annuel de la première tranche de la sécurité sociale, qui s'élève à 37 548 € en 2014. « Dans ce cas, on "échappe" à l'application de la deuxième tranche, ce qui réduit les charges sociales exploitant d'un tiers. D'un coût annuel brut salarié de 30 000€pour un temps plein, on passe à un coût net de 21 000 à 22 000 € », calcule Xavier Beaufils.
A contrario, si le salarié permet un meilleur suivi du troupeau (qualité du lait, santé des vaches et des veaux, etc.) et des cultures, l'accroissement du chiffre d'affaires n'aura pas forcément cet effet levier, mais il financera tout ou partie du salaire (voir infographie). « L'arrivée du salarié peut avoir des bienfaits indirects, comme la vente du matériel de culture resté sur la ferme faute de temps pour le faire alors que les travaux des champs sont délégués à une ETA, plus de disponibilité pour construire des demandes de subventions, etc. » Sans compter ce que l'on ne peut pas chiffrer : une meilleure qualité de travail et de vie, l'échange des préoccupations quotidiennes avec le salarié, etc.
- Le recrutement répond à un besoin de main-d'oeuvre supplémentaire pour développer le lait, mais quel volume en plus faut-il pour la payer ? La simulation ci-contre montre que sans investir, 100 000 litres de lait en plus et 1 UTH supplémentaire grosso modo s'équilibrent. « Dans cet exemple, un mi-temps de plus pourrait sans doute suffire. » Tout dépend si plusieurs objectifs sont poursuivis : développement, souplesse dans le travail, etc. Si le projet nécessite des investissements, la réponse est beaucoup plus au cas par cas.
PREMIER PRÉALABLE : UNE TRÉSORERIE SAINE
Le versement du salaire tous les mois et le paiement des cotisations sociales tous les trois mois créent une nouvelle charge fixe de trésorerie que l'entreprise doit pouvoir financer. « Si la trésorerie est tendue à cause d'annuités élevées alors que la performance économique de l'exploitation est bonne, mieux vaut différer l'embauche le temps que leur montant baisse. », insiste Xavier Beaufils. Seulement comment évaluer que sa trésorerie est saine ? On peut choisir, selon lui, l'une ou l'autre de ces deux approches.
La première : disposer d'une épargne de crise de 50 €/1 000 l (pour 6 mois à 1 an), soit 20 000 à 25 000 € pour une exploitation de 400 000 à 500 000 litres de lait. « Il s'agit d'une trésorerie rapidement mobilisable à partir d'un compte épargne, du compte-courant mais aussi d'un lot de taurillons, par exemple. »
La deuxième, à partir de l'indicateur fonds de roulement/dépenses totales. Ces dernières regroupent les charges opérationnelles et de structure, les prélèvements privés et les annuités. « L'idéal est d'afficher un ratio de trois mois. C'est ce qu'obtiennent les 25 % meilleurs résultats économiques. La moyenne se situe entre un mois et un mois et demi. »
DEUXIÈME PRÉALABLE : NE PAS DÉGRADER SON REVENU DISPONIBLE
Gagner en confort de travail, assurer son projet de développement par une meilleure organisation du travail, c'est une bonne chose, à condition que cela ne soit pas au détriment du revenu disponible. Et si c'est le cas, que ce soit supportable. Les simulations pages précédentes montrent qu'à 2 000 à 3 000 € près, il ne se dégrade pas. « Cela suppose en amont que l'exploitation soit relativement efficace. » C'est-à-dire un ratio EBE/produits supérieur à 45 %, « avant les charges sociales exploitant et la rémunération des associés, précise-t-il. Cet EBE avant main-d'oeuvre exploitant doit assumer la rémunération du salarié, les annuités et une marge de sérénité de 15 %. »
Bref, entre ses conditions de travail, mener à bien un projet de développement et se rémunérer de façon satisfaisante, il faut trouver le bon compromis.
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