[Décryptage] François Hollande au Space « L’agriculture fait partie du pacte productif mais il faudra plus de deux ans pour la redresser »
A Rennes, le président de la République a prononcé un discours qui s’inscrit dans le fonctionnement des institutions agricoles. Il n’a pas apporté de réponses concrètes aux attentes des agriculteurs sur de nombreux sujets comme la Pac de 2014 ou le rôle du G20 agricole. Les éleveurs doivent se contenter de quelques annonces concrètes.
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François Hollande a prononcé son discours au Space au terme d'une visite de trois heures. (© Terre-net Média) |
« Produire plus et mieux mais pas comme avant » et rendre l’élevage riche en emplois, demanderont plus de temps au président de la République que le redressement en deux ans des comptes de la Nation. Bien que l’agriculture et l’agroalimentaire affichent un excédent commercial à faire pâlir d’envie certains secteurs d’activités, il a expliqué lors de son discours prononcé après trois heures de visite au Space à Rennes, qu’il était conscient des défis à relever au plus vite. « La France doit contribuer à nourrir le monde » et « aller à la reconquête des parts de marché perdues » comme par exemple dans le secteur de la volaille, en mobilisant les régions. Mais certains objectifs à atteindre prendront du temps. Une prochaine loi agricole pour accompagner entre autres la réforme de la Pac est programmée.
Durant son discours, le président de la République a présenté la feuille de route du gouvernement pour l’agriculture et l’agroalimentaire en France, en Europe et au niveau mondial. Et dans le même temps, il a tenté de ne pas trop heurter certaines sensibilités de sa majorité, les écologistes en particulier. Mais à vouloir faire plaisir un peu à tout le monde, on ne convainc personne comme le montrent entre autres les premières réactions syndicales de la Coordination rurale et de la Confédération paysanne.
Des recettes du passé
Les quelques mesures d'ores et déjà annoncées, qui font partie du plan d'action en faveur de l'élevage à l'ordre du jour du prochain conseil des ministres, sont du reste " du réchauffé ". A défaut de s’attaquer avec vigueur aux causes profondes de la volatilité des prix dont sont victimes en première ligne les éleveurs, François Hollande a décidé « d’accompagner la solidarité professionnelle (Ndlr : le fonds débloqué de 100 millions d’euros par les céréaliers) en proposant à ceux encore en difficulté un échelonnement des cotisations sociales et des échéances d’emprunt ». Mais cette annonce en rappelle d’autres faites au plus fort de la crise du lait en 2009 ! Et les éleveurs savent qu’elle revient à mettre un pansement sur une plaie.
En fait, les marges de manœuvre dont dispose le gouvernement, sont réduites. François Hollande organisera une table ronde avec les acteurs de l’ensemble des filières pour réactiver les accords de mai 2011 sur les négociations des prix afin que l’élevage cesse d’être pénalisé par la volatilité et par le niveau élevé et durable des cours des produits végétaux. Cela passera par la relation contractuelle et le développement d’organisations collectives de producteurs.
Sources d’emplois, « les productions animales restent un enjeu majeur » pour le gouvernement. Sinon, comment expliquer que la grande distribution répercute la moindre variation des prix des carburants alors qu’elle est prête à écraser ses fournisseurs de viande en refusant de répercuter les hausses des céréales et des tourteaux de soja achetés pour nourrir les animaux !
Fin des Dpi et Dpa pour 2013 ?
Source d’emplois, l'agriculture justifie aussi une politique d’installation des jeunes et de transmission des exploitations agricoles qui sanctuarise le foncier agricole. Le foncier agricole sera d'ailleurs à l’ordre du jour de la prochaine conférence environnementale du 15 septembre prochain.
Sinon, le président de la République envisage de « mobiliser la fiscalité » en créant en 2013 un nouveau dispositif sécurisant davantage le revenu des agriculteurs qui remplacera les Dpi et les Dpa. Les revenus importants de certaines années seront ainsi davantage épargnés pour être disponibles en cas de coup dur plutôt que d’être investis dans du matériel pour réduire le revenu et les montants des prélèvements fiscaux et sociaux de l’exercice.
La réforme sur le financement de la protection sociale associera les représentants professionnels agricoles. N’en déplaise à certains syndicalistes, François Hollande a l’intention au début de l’année prochaine d’améliorer aussi les dispositifs assuranciels.
Maintenir les derniers outils de régulation
Le discours prononcé par François Hollande montre que le nouveau gouvernement mesure chaque jour les difficultés de peser sur le fonctionnement des institutions internationales avec des engagements qui, faute d’être partagés, resteront sans suite.
Au G20, l’idée de la France de relancer une politique de gestion des crises au niveau mondial avec l’instauration de stocks stratégiques n’est pas reprise par l’ensemble des partenaires de la France.
A Bruxelles, il ne suffira pas d’affirmer que l’agriculture ne devra pas être la variable d’ajustement du budget européen pour que la France parvienne à obtenir satisfaction avec des soutiens pour l’agriculture à son niveau actuel pour 2014/2020.
De même, la France saura-t-elle se faire entendre en défendant le maintien des derniers outils de régulation des marchés européens et en proposant de nouveaux mécanismes de soutien à l’agriculture (les aides découplées ne permettant pas de contrer la volatilité des marchés) ? Le verdissement devra aussi reposer sur des règles équitables. Le dossier de l’harmonisation sociale sera aussi difficile à défendre pour mettre fin une fois pour toutes à des distorsions sociales entre partenaires européens.
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