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Impact, votre horizon - Le G20 agricole, un an après Tribune de Julien Steimer, ancien directeur de cabinet de Bruno Le Maire : « Le retour du politique en agriculture »

« Chaque nation doit assurer sa propre
sécurité alimentaire. Il faut produire plus,
mieux et partout ! », insiste Julien Steimer.
(© ministère de l'Agriculture)

Le plan d’action du G20 agricole a un an. C’est un véritable programme de développement de la production agricole mondiale qui fut approuvé, le 23 juin 2011, par les ministres de l’Agriculture des vingt principales puissances économiques, le commissaire européen à l’Agriculture, Dacian Ciolos, et plusieurs institutions internationales. Selon Julien Steimer, ancien directeur de cabinet de Bruno Le Maire (1), que Terre-net Média a rencontré pour dresser un premier bilan un an après sa signature, cet accord a renforcé la diplomatie française sur la scène internationale et européenne, notamment dans le cadre de la réforme de la Pac.

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« Chaque nation doit assurer sa propre
sécurité alimentaire. Il faut produire plus,
mieux et partout ! », insiste Julien Steimer.
(© ministère de l'Agriculture)

« Le jeudi 23 juin 2011 à Paris, c'était un jour de "bonheur" pour Bruno Le Maire (1). Les ministres de l’Agriculture des vingt puissances économiques les plus riches de la planète, réunis pour la première fois à son initiative, avaient alors adopté à l’unanimité le plan d’action sur la volatilité des prix alimentaires et sur l’agriculture.

Cet accord n’a pas été un coup d’épée dans l’eau ! La crise financière n’a pas remis en cause l’élan créé.
En cette période économique difficile, il n’est pourtant pas aisé de maintenir un cap avec des objectifs inscrits dans le moyen et le long terme.

La plus grande satisfaction, après les efforts déployés pour parvenir à la rédaction de ce plan de développement de l’agriculture mondiale, fut son adoption par les chefs d’Etat du G20 au Sommet de Cannes en novembre 2011.

Pragmatisme des projets

Un an après, la mise en oeuvre du plan d’action progresse de manière très satisfaisante. En témoigne notamment la priorité accordée à la sécurité alimentaire lors du sommet du G8, qui vient de se dérouler sous la présidence de Barack Obama. La dernière réunion du Forum de réaction rapide d’avril 2012, au Mexique avec les représentants personnels des ministres de l’Agriculture signataires du plan d’action, a aussi permis de faire le point sur ses réalisations concrètes.

En fait, ce sont à la fois le message global en faveur de l’agriculture et le pragmatisme des projets prévus par le plan d’action qui séduisent. La méthode d’élaboration et de négociation a été aussi un facteur clé de succès. Et les résultats sont à la hauteur des espérances : ils sont convaincants (lire l'encadré) et ont même apporté quelques bonnes surprises.

Il n’a pas été facile de mettre d’accord des acteurs aussi différents que l’Australie et l’Europe, qui depuis des décennies s’opposent sur les questions agricoles. Ils se sont pourtant retrouvés autour d’un texte qui allie développement de la production, compétitivité et régulation.

Un travail collectif

Tous les pays de la planète, même les plus grandes puissances économiques, ont conscience que le
défi alimentaire de 2050 ne peut pas reposer uniquement sur la production agricole de quelques régions qui exporteraient vers le reste du monde. Chaque nation doit assurer sa propre sécurité alimentaire. Il faut produire plus, mieux et partout ! Les émeutes de la faim de 2008 sont dans toutes les mémoires, même si les crises alimentaires surviennent toujours, le plus souvent dans l’indifférence.

L’accord doit aussi son succès à la méthode employée pour obtenir l’unanimité. Bruno Le Maire a décidé de travailler avec tous les pays et avec les organisations internationales, de producteurs et non-gouvernementales regroupées dans le G120. Et même avec le secteur privé via le Forum de Davos. Le
plan d’action est donc un travail collectif qui permet, à partir des intérêts de chacun des membres du G20, de dégager un intérêt général mondial.

Compétitivité et régulation


Le défi alimentaire de 2050 ne peut pas reposer uniquement
sur la production agricole de quelques régions, qui
exporteraient vers le reste du monde. (© Terre-net Média)

Avec le plan d’action du G20, la France a montré sa capacité à jouer un rôle majeur sur la scène diplomatique internationale. Elle était seule à lancer cette initiative comme elle l’avait aussi été, en décembre 2009, lors de l’appel de Paris qui avait réuni 23 ministres européens de l’Agriculture pour sauver la Pac. Et elle a su convaincre, mobiliser, entraîner.

La France a également mis en valeur des idées nouvelles en matière de politique agricole pour le monde, comme pour l’Europe, loin des vieilles lunes de la gestion administrée des prix et de la production agricoles.

En fait, le plan d’action, parce qu’il fait de l’agriculture un enjeu stratégique, rappelle aux Européens la nécessité de conduire une politique agricole commune ambitieuse, alliant compétitivité et régulation. Il n’y aura pas d’agriculture mondiale sans agriculture européenne. »

Les réalisations en cours

Le plan d’action du G20 a été préparé et négocié pendant plus de dix-huit mois par l'ancien ministre français de l’Agriculture, Bruno Le Maire, dans le cadre de la présidence française. Ce document de
15 pages est, avec ses 55 paragraphes et ses 6 annexes, un véritable programme de politique agricole pour la planète ! Il porte entre autres sur la production, la recherche, le développement, la régulation et la transparence des marchés.

La force de cet accord est de s’inscrire dans le marché tout en cherchant à en limiter les dysfonctionnements. Cette approche séduit les pays les plus libéraux. Car même pour ces derniers, la volatilité des marchés agricoles est une menace ! Les mesures concrètes du plan d’action l’ont rendu applicable immédiatement. « Et s’il ne met pas fin à la volatilité des prix, il instaure les outils nécessaires pour l’atténuer », selon Bruno Le Maire.

Un an après la signature de l’accord, Julien Steimer dresse le bilan suivant. Tout d’abord, les chefs d’Etat poursuivent leur action sur la nécessaire augmentation de la production agricole mondiale, comme cela vient d’être le cas lors de la présidence américaine du G8. D’ores et déjà, une avancée notoire sur ce thème est la mise en oeuvre du projet de recherche génomique du blé afin de mieux maîtriser les conditions de développement de la plante.

Par ailleurs, le "Système d’information sur les marchés agricoles" (Agricultural market information system, Amis) a été mis en place. Il encourage les principaux acteurs des marchés agroalimentaires à partager leurs données, à perfectionner les dispositifs d’information existants et à promouvoir une meilleure compréhension partagée de l’évolution des prix alimentaires. Il s’appuie sur le Forum de réaction rapide, qui est l’enceinte du dialogue politique, et sur la coopération en matière agricole.

Pour sa part, l’initiative de suivi satellitaire de l’agriculture mondiale (Geo), qui améliore l’observation agricole à l'échelle planétaire via une utilisation accrue des satellites pour les prévisions météorologiques et de récolte, a tenu ses réunions constitutives. Autres avancées significatives : la création d’une plateforme de gestion des risques et de lutte contre la volatilité en Afrique du Nord et en Amérique du Sud, avec la Banque mondiale ; ou encore la proposition de Michel Barnier, ancien ministre de l’Agriculture et commissaire européen, de limiter les positions sur les marchés dérivés de produits agricoles.

 

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Cet article est extrait de Terre-net Magazine n°17

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