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Porcs mâles entiers ou castrés ? Pas d’insatisfaction particulière, mais…

Dans les prochaines années, il est fort probable que la production de mâles entiers s’accentue, sous diverses pressions (sociales, économiques, environnementales). Mais l’absence de castration a pour effet d’augmenter le niveau en composés malodorants des jambons obtenus. L’Ifip a évalué l’acceptabilité par le consommateur de jambons secs de qualité supérieure issus de mâles entiers. Résultats.

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Au nom du bien-être animal, l’Europe prévoit l’arrêt de la castration chirurgicale sans anesthésie à l’horizon 2018.
Aux Pays-Bas, par exemple, il semblerait qu’environ 40 % des porcs mâles ne soient déjà plus castrés. (© Terre-net Média)

Dans le cadre leur lutte pour le bien-être animal, de nombreuses associations militantes demandent aujourd’hui l’arrêt de la castration des mâles. Et aujourd’hui, force est de constater que la production de mâles entiers semble être vouée à s’intensifier en Europe, d’autant que des arguments économiques (meilleure efficacité alimentaire) et environnementaux viennent s’ajouter aux arguments en faveur du bien-être animal.

À l’occasion des 42Jrp, qui se tenaient en février 2011 à Paris, Patrick Chevillon (Ifip-Institut de l’élevage) a présenté les résultats d’une étude menée sur l’évaluation de l’acceptabilité par le consommateur de jambons secs de qualité supérieure (plus de 7 mois de sèche) issus de mâles entiers. « Ces jambons se caractérisent par leur niveaux en composés malodorants (scatol et androsténone) par comparaison à des femelles ou des mâles castrés issus du même élevage », précisait le scientifique.

Androsténone et scatol

Pour mener à bien cette étude, 40 animaux parmi 160 porcs de l’élevage expérimental de Romillé ont été retenus : d’une côté, 20 mâles entiers ; de l’autre, 10 femelles et 10 mâles castrés. Des analyses sur les teneurs en androsténone et scatol (deux composés malodorants) ont été réalisé à l’abattage, sur dans le gras mâles entiers, et après 8 mois de séchage sur jambons secs.

Ces jambons issus de 2 lots de mâles entiers ou des 2 lots d’animaux castrés ont ensuite été donnés à déguster à 102 consommateurs (56 % de femmes et 44 % d’hommes). « Dans le cadre de l’essai, il faut noter que le 1er lot de jambons issus de mâles entiers se caractérise par des valeurs plutôt faibles en androsténone (comprises entre 0,5 et 0,7 μg/g de gras pur des jambons bruts) et assez faibles en scatol (0,09 μg/g de gras pur ou moins, ndlr) » détaillait Patrick Chevillon.

Par contre, le second lot de mâles entiers se caractérise par des valeurs élevées en androsténone (comprises entre 1,5 et 2,3 μg/g de gras pur) mais toujours assez faibles en scatol.

Pas de résultats nets

L’analyse des résultats issus de cette étude ne permet pas de mettre en évidence « le risque d’insatisfaction du consommateur de jambons secs issus de mâles entiers », ces travaux ayant été réalisé « dans la limite en composés odorants mesurés dans le gras de 2 μg/g de gras pur en androsténone et moins de 0,10 μg/g en scatol ».

Mais pour le scientifique, ces résultats montrent qu’il faut rester prudent et doivent inciter les chercheurs à « conduire des études complémentaires sur jambons bruts potentiellement plus odorants, c’est-à-dire présentant des teneurs en androsténone et/ou en scatol plus élevées que dans l’essai ».

Des rendements de séchage inférieurs de plus de 2 points

Autre résultat notable : pour les jambons de mâles entiers, le rendement de séchage final du lot est inférieur de 3,3 points par rapport au lot de jambons de mâles castrés, et inférieur de 2,2 points par rapport au lot de jambons de femelles.

« L’impact économique est donc considérable sur des produits sel sec de qualité obtenus après plus de 7 mois de séchage. L’hypothèse est que l’épaisseur de lard plus faible des jambons de mâles entiers lors de la mise au sel semble être le principal critère explicatif du rendement de séchage » soulignait Patrick Chevillon.

Par ailleurs, les scientifiques ont noté une légère réduction des composés malodorants lors du procédé de transformation en jambon sec, « liée à une réduction en particulier du composé androsténone ». Pour le scatol, précise toutefois l’expert de l’Ifip, « il est difficile de conclure sur une éventuelle réduction lors du procédé sel sec, les valeurs initiales en scatol des jambons de l’étude étant basses ».

Piste génétique

Pour limiter la perte de rendement observée, « ainsi que le risque d’oxydation potentiellement plus élevé des acides gras polyinsaturés des mâles entiers », les scientifiques s’orientent vers la piste génétique : « il semblerait intéressant de tester des types génétiques conduisant à des épaisseurs de lard plus élevées et/ou de veiller à l’alimentation des porcs mâles entiers, en particulier, la teneur de l’aliment en acides gras polyinsaturés » résumait le spécialiste de l’Ifip.

Mais le revers de la médaille de cette piste, à savoir élever des porcs entiers plus gras, est une probable augmentation des taux de scatol et d’androsténone. « Il faut donc s’attendre à l’apparition des défauts sensoriels sur ces jambons, condition qui serait de nouveau à valider par rapport aux qualités de jambons de porcs castrés existantes. »

Pour aller plus loin

Ifip-Institut du porc : www.itp.asso.fr.

 

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