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Evolution de la restructuration des exploitations Des systèmes laitiers et allaitants interdépendants

La restructuration des exploitations laitières ou allaitantes françaises va-t-elle s’accélérer, ou au contraire se stabiliser dans les vingt ans à venir ? L’Institut de l’élevage a sorti sa calculette et ses modèles pour fournir des scénarii sur les tendances probables d’évolution de ces deux filières.

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« En appliquant les comportements modélisés sur
2000-2007 à la situation 2007-2014, on fait ainsi
apparaître 3.100 reconversions lait-viande qui devraient
conforter sur 2007-2014 les 5.100 successions prévisibles
dans les exploitations pratiquant déjà ce système. »
(© Terre-net Média)

La restructuration des exploitations laitières ou allaitantes françaises, en décroissance de 4,1 %/an sur la période 2000-2007, va-t-elle s’accélérer et se rapprocher des rythmes connus dans la plupart des autres pays européens (-6 %/an en moyenne pour les exploitations laitières) ? Le nombre d’exploitations va-t-il de fait connaître une érosion sans fin ? Ou au contraire peut-on s’attendre à une stabilisation à plus long terme et à quelles conditions ? Vers quels types d’exploitations, de dimension d’atelier, peut-on évoluer à moyen et long terme dans les différents bassins de production français ? La démographie actuelle des chefs d’exploitations a-t’elle déjà écrit l’avenir ? Quel est le poids des déterminants structurels, régionaux, conjoncturels, politiques dans le processus de restructuration des exploitations d’élevage bovin françaises ? 

Les questions sont nombreuses et restent à l’heure actuelle sans réponse précise tant les projections sont difficiles à faire compte tenu de la multiplicité des variables. Reste que l’Institut de l’élevage a voulu explorer ces pistes sur demande de l’interprofession laitière (Cniel) et de FranceAgriMer.

Scénario tendance à moyen et long terme

Les scientifiques ont tout d’abord construit un scénario tendanciel. Cette première étape a permis de « mettre en évidence les facteurs les plus structurants et de formaliser leurs effets, en identifiant notamment des règles de comportements démographiques », explique Christophe Perrot, de l'Institut de l’élevage.

Seconde étape de ce travail : proposer des scénarios alternatifs en se focalisant « sur les facteurs d’environnement les plus susceptibles d’évoluer et d’influencer certains comportements qui sont alors modifiés ».

Au final, les chercheurs ont ainsi privilégié deux horizons dans les simulations :

À noter que les scénarios tendanciels sont entièrement calés sur les enquêtes sur la structure des exploitations agricoles du Ssp. « Ce dispositif permet de suivre les trajectoires d’un échantillon constant d’exploitations entre deux recensements agricoles exhaustifs », précise Christophe Perrot.

Une érosion lente pour les systèmes allaitants

L’analyse de ces projections, qui restent bien évidemment à confirmer dans les années à venir, montre que les tendances sont différentes selon que l’on soit dans la filière laitière ou la filière allaitante.

Ainsi, pour les exploitations allaitantes, le modèle de moyen terme met en avant l’importance des reconversions des systèmes laitiers vers des systèmes allaitant, « même dans le cas où le nombre d’exploitations laitières est préservé » souligne Christophe Perrot.

Les grandes tendances par zone de production

Dans le bassin allaitant charolais-limousin (zone herbagère du Nord Massif Central hors montagne), la restructuration des exploitations allaitantes du noyau dur est plus classique, avec une décroissance régulière proche de -1,5 %/an depuis 1990 qui pourrait monter à -2,2 % sur 2007-2014.
Dans les zones de montagne, piémonts et défavorisée sèche, la croissance du nombre d’exploitations a été forte jusqu’en 2000, puis plus faible sur 2000-2007 (1,7 % puis 0,2 %). Une faible décroissance est attendue sur 2007-2014.
Dans les zones de polyculture-élevage et les zones herbagères du nord ouest et du nord est, on retrouve ces évolutions successives, notamment avant 2000, quand le cheptel allaitant s’était étendu au-delà de ces bassins de production traditionnels.
Dans la zone ouest où se combinent les évolutions des zones traditionnelles allaitantes (notamment Vendée et nord des Deux-Sèvres) et des zones laitières (avec des reconversions moins fréquentes du fait de la faible surface de nombreuses exploitations laitières), le nombre d’exploitations se réduit lentement depuis 1995 et devrait continuer à le faire d’ici 2014.
Finalement c’est le poids relatif des zones défavorisées (montagne, piémont et zones sèches) et des zones herbagères du Nord-Ouest qui devrait s’accroître même si la structure démographique de ces dernières zones, héritée de nombreuses reconversions lait-viande d’attente, est beaucoup moins favorable, notamment car le taux d’éleveurs de plus de 50 ans y est le plus élevé.

« En appliquant les comportements modélisés sur 2000-2007 à la situation 2007-2014, on fait ainsi apparaître 3.100 reconversions lait-viande qui devraient conforter sur 2007-2014 les 5.100 successions prévisibles dans les exploitations pratiquant déjà ce système. »

In fine, grâce à ces reconversions, le nombre d’exploitations allaitantes devrait se réduire à un rythme assez lent (-1,7 %/an entre 2007 et 2014 contre -0,8 %/an sur 2000-2007) « tout en passant pour la première fois sous la barre des 60.000 exploitations au-dessus de laquelle il évoluait depuis 1990 au plan national ».

Bien évidement, des hypothèses complémentaires restent à faire pour prévoir sur le long terme la dynamique des reconversions.

Si au contraire la conjoncture laitière se dégradait davantage, on peut s’attendre à un nombre de reconversion lait-viande encore plus important, ce qui pourrait conduire « à un nouveau maintien du nombre absolu d’exploitations qui dépasserait alors celui des exploitations laitières. Comme cette stabilité relative doit beaucoup aux reconversions lait-viande, il est évident que ce constat n’est pas valable pour toutes les zones de production ».

Restructuration et croissance externe

La question que se sont posée immédiatement après les scientifiques est celle de la productivité. « Cette accélération de la restructuration des exploitations allaitantes (de -0,8 à -1,7 %/an) est-elle de nature à relancer les gains de productivité du travail tombés au plus bas entre 2000 et 2007 ? » résume Christophe Perrot.

Selon les scientifiques pourtant, « l’intensification semble difficilement pouvoir procurer des marges de manœuvre supplémentaires » et ce, quel que soit le bassin de production.

« Par contre ce système de production pourrait continuer à gérer une part croissante du cheptel français aux dépends des autres systèmes sauf dans le bassin allaitant limousin-charolais où sa part est déjà à 93 % », releve le spécialiste de l’Institut de l’élevage avant de conclure : « restructuration plus croissance externe pourrait permettre de retrouver des gains de productivité du travail plus élevés qui semblent nécessaires à l’équilibre économique de nombreuses exploitations qui ont lourdement investi ces dernières années notamment pour améliorer les conditions de travail et les conditions d’élevage des animaux (bâtiments-équipements) ».

Pour aller plus loin

Les résultats en détail dans le secteur laitier lire ici
Les résultats en détail dans le secteur allaitant lire ici
Institut de l’élevage : www.inst-elevage.asso.fr.
Journée 3R : www.journees3R.fr

 

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