Alimentation L'Europe rejette l'idée d'un retour du poulet chloré américain
L'idée d'un retour en Europe des poulets chlorés américains a décidément du mal à passer: les pays de l'Union européenne (UE) y ont mis lundi le holà au nom des exigences de qualité de leurs consommateurs désavouant du même coup la Commission européenne.
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Lors d'une réunion des ministres de l'Agriculture à Bruxelles, 21 des 27 ministres de l'UE ont refusé en l'état une levée de l'interdiction en place depuis 1997, a indiqué une source européenne. Les autres ne se sont pas exprimés. Ils ont ainsi adressé un camouflet au commissaire européen à l'Industrie Günter Verheugen qui, il y a seulement une semaine, annonçait triomphalement son intention de proposer le retour des volailles désinfectées chimiquement, appelées poulets "à la javel" par leurs détracteurs. Une méthode radicale visant à tuer ou réduire le nombre de bactéries, telles que les salmonelles, alors qu'en Europe les contrôles d'hygiène sont faits à chaque étape de la chaîne de production et de distribution.
Les consommateurs européens ont des exigences
La France a été particulièrement en pointe sur le sujet. "C'est une question assez symbolique", a commenté lundi devant la presse le ministre français de l'Agriculture, Michel Barnier, en soulignant qu'il était hors de question pour lui d'accepter en l'état de lever l'interdiction. "Les Etats-Unis peuvent faire ce qu'ils veulent chez eux mais les consommateurs européens ont d'autres exigences", a-t-il dit. "Ils veulent des contrôles d'hygiène tout au long de la chaîne de production et pas une désinfection brutale en bout de chaîne", a ajouté M. Barnier.
Lors du débat, le ministre allemand de l'Agriculture Horst Seehofer a également fait valoir qu'il s'agissait d'un sujet très "chaud" dans son pays et qu'il lui serait difficile de faire accepter l'arrivée de volailles chlorées à la fois à son opinion publique et à ses éleveurs, selon un diplomate. A l'issue d'un forum économique UE-USA la semaine dernière, M. Verheugen, qui milite activement depuis des mois pour le retour des poulets désinfectés américains, avait indiqué qu'une proposition en ce sens de ses services était imminente, pour une période probatoire de deux ans.
Un avis mitigé
Très optimiste, le représentant américain à cette rencontre, Daniel Price, conseiller du président George W. Bush aux affaires économiques internationales, s'était même déjà réjoui "de voir les exportations américaines de poulet affluer à l'automne en Europe". Mais cette annonce n'a pas été du goût de tous au sein de la Commission, où certains de ses collègues l'ont jugée prématurée, selon une source européenne. "Les déclarations de M. Verheugen ont irrité les services de la commissaire à la Santé Androula Vassilou", indique-t-elle. La commissaire chypriote, clairement embarrassée de se retrouver en porte-à-faux face aux ministres lundi, leur a d'ailleurs promis de "prendre en compte" leurs critiques.
Même si Bruxelles finit par proposer une levée de l'interdiction, à temps pour un sommet UE-USA prévu le 10 juin en Slovénie, auquel assistera le président Bush, les Etats européens la bloqueront ensuite selon toute vraisemblance et avec elle les poulets américains aux frontières. Le mois dernier, l'Autorité européenne de sécurité des aliments (Efsa) avait rendu public un avis mitigé sur les effets potentiels de quatre substances utilisées aux Etats-Unis pour désinfecter les carcasses de poulets. Elle a jugé qu'aucune donnée scientifique ne montrait une tolérance accrue de certaines bactéries par l'organisme à la suite du traitement au chlore, tout en prônant "davantage de recherche".
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