Emeutes de la faim La France pousse l'Union Européenne à soutenir l'agriculture
La flambée des prix alimentaires dans le monde et son cortège d'émeutes poussent la France à demander une réaction rapide de l'UE et un retour de l'agriculture, dont elle est la principale puissance en Europe, au premier plan de ses préoccupations.
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Le ministre français de l'Agriculture Michel Barnier a indiqué vouloir demander lundi, lors d'une réunion avec ses collègues européens à Luxembourg, une "initiative européenne pour la sécurité alimentaire" dans le monde. Il y a "urgence" à ses yeux, alors que les troubles liés à la flambée des prix des denrées alimentaires de base se multiplient dans le monde, en Afrique surtout, et plus récemment à Haïti. A ses yeux, la situation actuelle souligne l'importance de donner la priorité à la production agricole à des fins alimentaires.
Dans une tribune publiée vendredi dans le quotidien français Libération, le gouvernement français appuie le message. "L'Europe, avec son agriculture performante et sa politique commune, doit pleinement jouer son rôle de fournisseur et de régulateur des marchés alimentaires mondiaux, sujet qui sera à l'ordre du jour de la présidence française de l'UE" au deuxième semestre 2008, souligne ce texte signé notamment par le ministre des Affaires étrangères, Bernard Kouchner, le secrétaire d'Etat chargé des Affaires européennes, Jean-Pierre Jouyet, et celle aux droits de l'Homme, Rama Yade. "Le renchérissement des denrées constitue paradoxalement une opportunité pour relancer les investissements dans le domaine agricole", ajoute la tribune.
Ces prises de position trouvent un écho particulier à Bruxelles alors que l'UE est engagée dans un débat sur un "bilan de santé" de sa Politique agricole commune (PAC) et que Paris entend durant sa présidence de l'UE insister sur l'importance pour les Européens de préserver un budget important dans ce secteur. Première puissance agricole de l'UE, la France prend argument de la hausse des tarifs des matières premières agricoles pour poser des jalons en vue des discussions délicates à venir sur le budget de la PAC, principale poste de dépense de l'UE, après 2013.
La Grande-Bretagne se dit pleinement en accord avec la France sur la nécessité d'agir face à la flambée des prix alimentaires. Mais elle insiste sur une action au niveau international plutôt qu'au niveau de l'UE. Le Premier ministre Gordon Brown vient d'ailleurs d'écrire une lettre à son homologue japonais, dont le pays préside le G8, pour que ce sujet soit pris en compte lors du sommet des huit nations les plus industrialisées en juillet. "Nous partageons les inquiétudes grandissantes sur la sécurité alimentaire et pensons qu'une réponse coordonnée de la communauté internationale" est nécessaire, souligne un diplomate britannique à Bruxelles.
Toutefois, Londres, qui plaide pour une baisse du budget européen pour l'agriculture, n'en tirera pas forcément les mêmes conclusions que Paris pour la PAC. La mobilisation actuelle contre la faim "ne doit pas consister à résister à la réforme de la PAC ou à faire pression en faveur d'une politique plus protectionniste", souligne un diplomate européen à l'adresse de la France.
La Grande-Bretagne, en particulier, plaide dans le contexte actuel en faveur d'un accord rapide sur la libéralisation des échanges à l'Organisation mondiale du commerce (OMC). Alors que la France, qui refuse des concessions trop importantes dans le secteur agricole, prône au contraire une très grande fermeté. M. Barnier s'est même récemment demandé s'il ne faudrait pas à terme sortir l'agriculture des négociations à l'OMC, au nom des impératifs alimentaires en particulier.
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