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Energie en élevage laitier Vers une meilleure efficacité

Commencer sa journée d'éleveur, c'est actionner un ou deux interrupteurs, mettre en marche une pompe, démarrer un moteur... C'est le confort de travail qui en dépend : les bonnes conditions de vie sur l'élevage et la qualité du produit reposent sur des opérations qui nécessitent de l'énergie facilement utilisable. Si cette "denrée" devient rare, si la consommation d'énergies fossiles pose un problème environnemental majeur, il faut se préparer à produire autant de lait de bonne qualité avec des pratiques nouvelles, plus économes, et compatibles avec l'utilisation des énergies renouvelables. Le Btpl (bureau technique de promotion laitière) propose un cheminement pour gagner en efficacité.

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Toutes les activités sont concernées et c'est maintenant un enjeu collectif : la réduction des émissions de CO2 s'invite à la table des priorités nationales et locales et bientôt chaque signe confirmant une évolution accélérée du climat montrera un peu plus du doigt ceux qui tarderont à se mettre à l'action. L'agriculture fait ses comptes et la production laitière en particulier prend conscience du tonnage de gaz carbonique qu'elle devra aider à économiser. Les marges de manœuvre peuvent sembler étroites quand il s'agit par exemple de réduire la quantité de méthane produite par le cheptel, mais on constate aussi que tout n'a pas été tenté pour minimiser le recours à des énergies qui, il y a peu de temps encore, passaient presque inaperçues dans la colonne des charges !

La démarche commence donc par un petit coup de "zoom" sur les consommations énergétiques de l'élevage laitier et par un tableau de correspondance sources d'energie / utilisations et consommations à réaliser en fonction du contexte sur son exploitation. Il s'agit bien de faire le point sur "ce que je consomme aujourd'hui pour produire" avant d'engager une réflexion pour "tenir mes objectifs de production, en consommant moins et/ou différemment". Il faut s'en tenir souvent à une estimation, établie sur la base de valeurs de consommations moyennes multipliées par des heures de fonctionnement. On découvre à cette occasion que rentrer dans le détail des consommations n'est pas si simple et que l'on doit prendre en note les options d'arbitrage choisies pour pouvoir faire une analyse comparative quelques mois plus tard…

Cette étape doit permettre avant tout de préciser l'importance de la facture énergétique qui se cache derrière le travail quotidien. Elle servira aussi, pour ceux qui souhaitent aller plus loin, à rédiger les objectifs en matière d'économies d'énergie.

Le second niveau d'analyse consiste en effet à décomposer les activités utilisatrices d'énergie pour identifier les tâches qui consomment et souligner celles sur lesquelles un effort peut être fait pour abaisser la consommation.
On comparera le niveau des consommations des principaux matériels présents sur la ferme avec les caractéristiques de modèles plus récents ou présentés par leur fabricant comme plus "économes" : en évaluant le gain qui peut être réalisé on saura mieux faire son choix à l'heure du renouvellement du matériel en question !

La panoplie des solutions accessibles à celui qui veut travailler de façon plus efficace est assez large :

- Economiser là où c'est possible,
- pour une même opération changer de source d'énergie (arbitrage en faveur d'une énergie moins coûteuse),
- en cohérence avec les objectifs de production changer le process, en optant pour un procédé qui consomme moins ou qui ne consomme pas d'énergie fossile,
- ajouter une source d'energie renouvelable qui alimentera une ou plusieurs tâches (substitution partielle),
- changer une ou plusieurs sources d'énergie au profit d'une énergie renouvelable (substitution totale),
- se diversifier et devenir producteur d'énergie (nouvel atelier, nouvelle production !) et fournir notamment l'atelier lait.

 Le choix en faveur d'une piste plutôt qu'une autre doit tenir compte de la facilité de mise en œuvre (satisfaction à court et moyen terme) et de la contribution de la solution adoptée à la simplification de la conduite de l'atelier et/ou de l'exploitation dans son ensemble. Parfois le recours à une énergie renouvelable ne constitue qu'un appoint (et donc ne permet pas de simplifier le tableau des sources et des usages) et nécessite de nouvelles compétences.

Plusieurs techniques paraissent d'emblée intéressantes et sont souvent mises en avant à l'occasion de salons agricoles (chaudière "biomasse", solaire thermique, huile végétale) : l'éleveur doit essayer d'y voir clair sur ce qui va vraiment changer sur son exploitation quand il aura adopter l'une d'entre-elles. Remplir une grille d'évaluation du projet de changement de pratique énergetique permettra ainsi d'aller plus loin dans la réflexion et d'écarter certaines pistes !

Suivre en les mesurant les effets des changements de pratiques

Dans une démarche de gain d'efficacité, qu'il s'agisse de changements qui concernent la façon de produire ou l'approvisionnement en énergie proprement dit le réflexe "je prévois - je fais – je mesure – je corrige" reste un bon moyen d'évoluer en limitant les risques.
Et un bon projet de changement de pratiques énergétiques est d'abord un projet dont on peut suivre les effets technico-économiques.
Cette approche s'appuie donc sur la possibilité de mesurer les différentes consommations ou de les évaluer en répartissant de la façon la plus juste possible la note globale. On peut parvenir, quelque soit le système de production, à une évaluation du coût énergétique ramené aux 1000 litres de lait produits, sans tenir compte dans un premier temps de l'énergie contenue dans les fournitures et autres consommations d'énergie indirectes (aliments du bétail, films plastiques, produits d'hygiène, inséminations…).
Que l'on commence par mesurer les consommations ou que l'on cherche à répartir une consommation globale, il sera difficile de maîtriser les consommations ou d'économiser si l'on ne suit pas avec un rythme régulier des chiffres de consommation fiables et effectivement liés aux pratiques sur l'atelier lait. C'est pourquoi nous préconisons la mise en place d'une fiche de suivi de l'énergie  économisée, adaptée aux caractéristiques de l'élevage et mise à jour tous les mois.

Pour ne pas alourdir les enregistrements un tri des opérations à suivre est à faire, en fonction des marges de progression estimées ou bien de la source d'énergie concernée et des possibilités de substitution par les énergies alternatives.

Les progrès effectués, qui se traduiront par une réduction du coût énergétique directe, peuvent cacher une stagnation de l'efficacité énergétique globale qui prend en compte l'énergie contenue dans les différentes charges (opérationnelles et de structure) et celle contenue dans les produits. L'analyse des consommations dites indirectes, qui constituent la partie cachée de l'iceberg, va nous mettre sur la voie d'autres économies, qui peuvent davantage remettre en question le système de production… Cela permet également d'évaluer "l'impact énergétique" global de l'exploitation ; on aura intérêt alors à étudier en parallèle les autres performances environnementales de l'élevage, qui sont liés aux flux de matière et d'énergie (consommation, stockage et émissions de CO2 par exemple). Des méthodes globales capables de situer ainsi le système se mettent en place actuellement.

S'aider d'un outil d'évaluation des impacts environnementaux de l'activité

Nous l'avons dit, les consommations directes d'énergie sont la partie "visible" qui mérite un suivi pour réduire les coûts. Une méthode d'analyse plus ambitieuse doit permettre de dire combien au total il a fallu de calories pour produire un litre de lait, en évaluant notamment les quantités d'énergie absorbée par la production des intrants et autres fournitures… Le bilan, qui mesure aussi les calories contenues dans le produit final et les co-produits, permet ainsi d'inventorier l'ensemble des émissions de gaz à effet de serre nécessaires à la production d'un litre de lait. On peut procéder de la même façon pour calculer le total des consommations d'eau ou pour tout autre impact environnemental jugé prioritaire.


Figure 1 : une analyse approfondie des impacts sur l'environnement prend forcément en compte ce qui se passe avant et après les étapes de la production du lait proprement dite

En utilisant un tel outil d'évaluation des impacts environnementaux, dans la continuité d'une réflexion économique sur l'énergie, un éleveur, ou mieux un groupe d'éleveurs, va pouvoir identifier la part des charges qui émet le plus de CO2, et les pratiques qui au contraire vont permettre d'en fixer d'avantage (on parle alors de puits de carbone).

En effet, l’agriculture en général et l'élevage laitier en particulier peuvent contribuer "naturellement" au stockage du gaz carbonique : dans les sols d'une part et dans la biomasse d'autre part, notamment par le choix de plantes présentant des caractéristiques intéressantes (pérennité, capacité à stocker beaucoup de carbone dans les parties aériennes ou souterraines).

 

Figure 2 : un changement de raisonnement énergétique et de nouvelles pratiques peuvent avoir des effets variés que l'on sait de mieux en mieux mesurer. C'est utile dans une phase d'aide à la décision.

 


 

 

 

 

Penser aux solutions techniques et aux innovations technologiques qui existent et en préparer de nouvelles


Utiliser des énergies renouvelables (© Btpl)
Quels changements sur la ferme pour un moindre coût énergétique, une meilleure efficacité énergétique (entrées-sorties) et des impacts environnementaux limités ?
Les solutions ne sont pas forcément les mêmes si l'on pense "économies", "efficacité" ou "impacts" et chacun peut fixer sa priorité.


Des pistes restent à explorer et celles qui sont développées aujourd'hui doivent être évaluées. Des travaux sont en cours au Btpl pour élaborer et tester des solutions d'efficacité en élevage laitier, notamment dans le cadre d'une démarche partenariale impliquant des chercheurs, des spécialistes des questions énergétiques en agriculture et des pôles d'innovation. Les éleveurs laitiers intéressés peuvent d'ores et déjà proposer que leur élevage devienne "ferme-pilote" en mettant en œuvre des changements de pratique, en s'équipant de façon à atteindre une meilleure efficacité, et en se munissant d'un outil de suivi !

Si une ferme pouvait fonctionner hier avec des réglages et du matériel pas très "affûtés" en matière de kilowatts consommés il faut maintenant se préparer à atteindre un meilleur niveau d'efficacité. Chacun est tenu d'étudier la possibilité de mettre en œuvre une démarche comprenant une estimation de l'énergie désormais économisée (on peut parler de négawatts et de négalitres) et un calcul de "bilan global" pour consolider le raisonnement et les changements dans la façon de produire. Les changements de pratiques énergétiques, ça se prépare avec un diagnostic et ça se juge aux résultats !

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