Login

Rémy Philippon, éleveur mixte à Champagny sous Uxelles (71) Bovin, ovin : même rentabilité à l’hectare

Si un atelier complémentaire ovin permet d’améliorer le revenu de l’exploitation, sa réussite est conditionnée à la disponibilité et la qualité de la main d’œuvre. « Et sans une affinité pour l’espèce, il me semble difficile de réussir. »

Vous devez vous inscrire pour consulter librement tous les articles.

Elevage mixte de Rémy Philippon, à Champagny sous Uxelles (71)

Présentation de l'exploitation et des résultats technico-économiques :

Cliquer ICI

« Pour moi, le principal avantage de la mixité bovins/ovins tient dans l’optimisation de la gestion de l’herbe et des surfaces fourragères », témoigne Rémy Philippon, éleveur à Champagny sous Uxelles (71). Avec un élevage bovin allaitant et une troupe ovine associée, Rémy Philippon a choisi de garder en surfaces fourragères la quasi-totalité de sa sole (non soumis au gel des terres) et de valoriser ces espaces avec une complémentarité d‘espèces ovin-bovin. « Je parviens à mieux gérer le chargement de mes pâtures et à mieux valoriser la pousse de l’herbe au printemps. J’optimise des surfaces qui sont de valeur nutritionnelle insuffisante pour les bovins. Sans compter que dans le contexte agricole politique fluctuant, je diversifie mes sources de revenu. »

Avec 80 vaches allaitantes de race charolaise (170 Ugb) et 200 brebis, les ateliers bovins et ovins dégagent respectivement (aides comprises) une marge brute de 428 et 914 €/Ugb. « Il est tout à fait envisageable de remplacer 15 vaches allaitantes par une troupe d’une centaine de brebis pour un résultat économique équivalent », commente Marie-Rachelle Vialet, conseillère ovine à la Chambre d‘agriculture de Saône et Loire. « L’atelier ovin aujourd’hui est tout aussi efficace économiquement que l’atelier bovin et son revenu présente en plus l’avantage d’être moins dépendant des aides, rendant le système moins sensible aux évolutions des réformes Pac (Politique agricole commune). Si l’on intègre le découplage des aides, la production ovine, rapportée à l’hectare, sera plus rentable que la production bovine.»


(© Web-agri)

La gestion de cette mixité au sein d’une exploitation nécessite toutefois une organisation, une technicité et une affinité toute particulière. « Je pense que le choix de développer un atelier complémentaire ovin doit participer d’une forte affinité de l’éleveur pour cette espèce », souligne Rémy Philippon. « Le mouton est un animal qui nécessite beaucoup de manipulations, de contention, de surveillance et d’interventions, de manière plus fréquente et plus assidue qu’en élevage bovin. C’est une espèce qui réclame de nombreuses heures d’un travail qui peut paraître répétitif. En période d’agnelage, c’est une surveillance et des interventions de jour comme de nuit. Il faut pouvoir intervenir à tout instant au moment des naissances, certains agneaux se présentent mal, les naissances multiples sont fréquentes. Et malgré de bons aménagements, il y a toujours un facteur limitant sur la mortalité des agneaux. L’ovin a beau être un animal prolifique, l’éleveur est confronté, quelles que soient les années, à un taux de pertes à peu près constant à la naissance, sans en connaître d’ailleurs les raisons », souligne l’éleveur. « En élevage bovin, il est plus facile de maîtriser cette mortalité, dont les causes sont plus facilement diagnostiquées. Chaque éleveur ovin essaie de parfaire sa maîtrise des naissances. Cela commence par l’aménagement des bâtiments (bergerie, cases d’agnelage,..) Pour sauver le maximum d’agneaux, aujourd’hui j’utilise des réhydratants, mais aussi une sonde oesophagienne pour nourrir de colostrum les agneaux qui ne tètent pas, que je peux placer sous une lampe chauffante. Je trouve que chez les ovins plus encore que chez les bovins, le délai d’intervention au plan sanitaire est encore plus court. La réaction de l’éleveur doit être instantanée, aussi bien pendant les naissances que pour le parasitisme ou la vaccination. Cela nous impose d’intervenir également sur les animaux l’été dans les pâtures, ce qui est moins contraignants chez les bovins », témoigne Rémy Philippon.

« L'atelier ovin aujourd'hui est aussi efficace économiquement que l'atelier bovin »

Sur son exploitation, la troupe ovine est divisée en deux conduites, une partie destinée à la vente d’animaux reproducteurs en race charolaise et une autre moitié pour la production d’agneaux de boucherie. Avec la race charolaise, le meilleur moment pour la lutte est le mois de septembre. Les agnelages ont lieu dès fin janvier et au mois de février pour la troupe conduite en reproduction. « Les agnelages de la troupe « viande » sont plutôt début mars, j’essaie d’échelonner un peu les deux troupes. Mais j’ai personnellement choisi d’avoir des vêlages et des agnelages sur les mêmes périodes, car je préfère concentrer ma surveillance et ma présence dans les bâtiments sur un temps assez concentré. Certains éleveurs, au contraire, peuvent répartir la charge de travail », remarque Rémy Philippon. « J’ai des collègues qui pratiquent des vêlages plutôt précoces et des agnelages au mois de février. Ça peut permettre, lorsqu’on ne produit que des agneaux destinés à la viande, d’avoir un atelier productif sur un temps assez court, qui valorise bien l’herbe de printemps. Les agneaux sortent à l’herbe avec leurs mères et ils peuvent être sevrés dès le mois de juin ou début juillet, ils sont vendus avant la période de sécheresse. Les brebis passent ensuite le restant de l’été dans les pâtures. »

Dans son système, Rémy Philippon de respecter les rythmes naturels de saison et d’optimiser les ressources herbagères. Il adapte les surfaces fourragères de façon à distribuer les meilleures pâtures aux brebis de la troupe inscrite. Les ovins, répartis en lots de petite taille, sont intégrés au troupeau des vaches allaitantes qui pâturent avec leurs veaux. « Selon moi, ce sont les ovins qui tirent le plus grand bénéfice de cette mixité : les animaux s’engraissent mieux et développent nettement moins de parasitisme. L’autre moitié de ma troupe ovine, conduite pour la production d’agneaux de boucherie est mise à pâturer sur des parcelles trop exiguës, difficiles à gérer par les bovins, plus ou moins bien clôturées, plus ou moins bien fournies en eau et sur lesquelles je mets les brebis avec les agneaux de boucherie. La troupe ovine viande repassera également derrière toutes les parcelles fauchées. » Pour gérer ces fréquents déplacements et décharger des pâtures mixtes en intervenant seulement sur les brebis, Rémy Philippon intervient avec l’aide d’un border collie dressé à la conduite de troupeau. « Je pense qu’à partir d’un certain nombre de brebis, la présence d’un chien de troupeau est indispensable en élevage ovin. C’est lui qui permet d’être efficace dans le travail. Il faudrait en équivalent main d’œuvre que nous soyons trois personnes pour réaliser le travail que je fais avec le chien. »

Une affinité nécessaire pour les ovins

Au rang des avantages, l’éleveur mixte rappelle que des droits à produire sont encore disponibles en ovins. Il souligne également le faible investissement de départ que requière la production ovine en rapport à la production bovine. « C’est un atelier qui demande un investissement de départ minime, que ce soit en terme de bâtiments, de matériel ou de coûts d’acquisition du cheptel. Pour ma part, j’ai réaménagé un ancien poulailler de 240 m2 qui a été démonté ; il n’y a pas à investir dans une désileuse, une pailleuse ou aires de stockage, moins d’investissements en matériel pour des coûts d’exploitation minimes. Seul bémol, en terme de contention et de clôture, il faut savoir qu’il ne faudra pas moins d’un grillage et trois rangs de barbelés au-dessus ». « Passé le seuil de 100 brebis, l’investissement dans un bâtiment devient nécessaire », estime Marie-Rachelle Vialet. « Pour autant, cela ne remet pas en cause la rentabilité de l’atelier ovin »

A découvrir également

Voir la version complète
Gérer mon consentement