Login

Grippe aviaire Albert Roussez, éleveur, s'adapte mais dénonce la psychose

Ses 4.000 poulets labellisés resteront confinés, Albert Roussez s'en fait une raison. Ce qui exaspère cet éleveur du Pas-de-Calais, c'est la "psychose aberrante" autour de la grippe aviaire, responsable de la chute des ventes.

Vous devez vous inscrire pour consulter librement tous les articles.

Encore frêles sous leur plumage roux, ses poulets de Licques caquètent sur le matelas de paille du hangar. Ils n'ont que quatre semaines. Dans une dizaine de jours, ils devaient profiter d'un espace d'un hectare pour grossir en plein air et justifier leur label de qualité. Mais les trappes du poulailler sont fermées et le resteront, conséquence de l'extension des mesures de confinement au département dans le cadre de la lutte contre la propagation de l'épizootie. "La mesure de confinement, ça pose des problèmes mais je ne discute pas les précautions prises", lâche, fataliste, cet agriculteur de 48 ans installé à quelques kilomètres de l'entrée du tunnel sous la Manche. Avec de simples battants métalliques qu'il actionne manuellement, ses moyens de ventilation sont limités, mais il sera vigilant. L'appellation conserve son label rouge de poulet élevé en plein air malgré le confinement mais "c'est sûr que si ça devait durer, ça remettrait en cause le but de l'élevage", reconnaît l'éleveur, dans sa combinaison de travail verte, sa seule protection.

Le groupement, qui regroupe près de 150 producteurs de volailles de Licques, l'a informé d'une baisse des ventes de 20% au début janvier après l'annonce de nouveaux décès liés à la grippe aviaire en Turquie. Et les yeux rieurs d'Albert Roussez s'assombrissent lorsqu'il évoque "cette psychose aberrante", qui en est à l'origine. "Elle est injustifiée, y'a rien, on est quand même un pays où tout est surveillé", s'agace-t-il. "Si la grippe aviaire arrivait chez moi, je serais quand même le premier concerné. Ce sont les gens en contact avec les volailles les premiers malades, je vais quand même pas jouer avec ma santé", plaide ce père de quatre enfants. Conséquence de cette baisse, les abattoirs retardent leurs achats.

Lors de l'arrivée du virus sur le continent européen à l'automne, ses poulets avaient été abattus à 16 semaines au lieu de 13. Pendant ce temps, il faut les nourrir, ils grossissent et coûtent davantage. "Cela fait encore des kilos supplémentaires sur un marché déprimé", explique M. Roussez, d'autant que les abattoirs ne paient pas les kilos qui vont au-delà de la courbe de poids nominal du galinacé. Pourtant, lorsqu'il s'est lancé dans le poulet en 1996, Albert Roussez avait "démarré sur des chapeaux de roue". Les consommateurs apeurés par la première crise de la vache folle se ruaient sur les volailles. Et malgré le marasme lors de l'affaire des poulets à la dioxine en Belgique, la demande était redevenue "affolante" en 2000 avec une nouvelle crise de la vache folle. "A chaque fois qu'on parle trop d'une menace, les gens ont une réaction de méfiance", regrette l'éleveur. Cette défiance remonte selon lui à l'affaire du sang contaminé dans les années 1980. "Depuis, quand le gouvernement prend des précautions, le consommateur se dit: tiens, y'a un problème".

A découvrir également

Voir la version complète
Gérer mon consentement