Apiculture L'abeille des villes plus en forme que l'abeille des champs
Pollution de l'air et bitume n'y peuvent rien : les abeilles des villes se portent désormais mieux que celles des champs, menacées, selon les apiculteurs, par les pesticides.
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Le milieu urbain, affirment-ils, est plus favorable aujourd'hui aux colonies en raison de l'absence de traitements phytosanitaires, d'une température légèrement supérieure et d'un enchaînement de floraisons plus régulier qu'en milieu rural, permettant un butinage plus long sur une plus grande variété de fleurs. Une étude des service vétérinaires de la ville de Nantes en 2005 a confirmé que le rendement des ruches du Théâtre Graslin, en plein centre, était supérieur a celui de la rase campagne, 30 km plus loin et que les pertes par ruche s'élevaient à 33% à la campagne, contre 6% en ville. Loïc Leray, apiculteur à Puceul en Loire-Atlantique, entretient aussi des ruches au coeur de Nantes, dans le parc du Grand-Plotreau. "En 25 ans, rien n'a changé dans le comportement de ces abeilles: les rendements sont réguliers, de 25 à 35 kg de miel par ruche, la mortalité hivernale faible".
A la campagne en revanche, il a dû revoir son mode de production. Joint par l'AFP, il raconte que depuis une dizaine d'années, il a cessé ses transhumances vers la Vendée et son tournesol, qui lui avaient assuré jusqu'alors 40 à 50 kg de miel par ruche. "D'abord, le miel a pratiquement disparu puis les ruches se sont dépeuplées. Ou alors, je trouvais devant des tapis d'abeilles malades, tremblantes", se souvient-il. En cause, assure-t-il, les pesticides Gaucho et Régent utilisés à partir de 1993-1994, notamment sur le tournesol vendéen. Pour sauver son activité, M. Leray, président des apiculteurs du département, a décidé de rester sur les champs de sarrazin de sa Bretagne: "Une culture sur sol pauvre, qui ne nécessite ni pesticide ni engrais".
Les molécules en cause avec le Gaucho ou le Régent sont des neurotoxiques qui désorientent l'abeille, rendue incapable de retrouver sa ruche, explique Henri Clément, le président de l'Union nationale de l'apiculture française (Unaf). Il arrive aussi que les abeilles rapportent des pollens infestés des grandes cultures de tournesol ou de maïs. "En temps normal, on perd 5 à 8% des abeilles. Là on est arrivé à des pertes de 20 à 45% selon les régions", précise M.Clément, voire davantage. "Le gaucho a bien été interdit sur le maïs mais on l'utilise encore sur l'orge et il faut compter avec la rémanence (la persistance du produit dans le sol)", reprend M.Leray. "Or les abeilles sont équipées de filtres (ce qui explique qu'elles résistent très bien à la pollution en ville), mais pas contre les neurotoxiques", indique-t-il.
Même face à la sécheresse de 2005, les abeilles se sont mieux défendues dans les parcs urbains qu'en plein champ. Apiculteur au Parc de la Villette, à Paris et dans la Creuse, Jean Paucton obtient en ville 100 kg de miel en moyenne par ruche, contre 20 à 25 kg dans la Creuse. "En ville, assure-t-il, les abeilles sortent plus". Avec sa campagne "l'Abeille, Sentinelle de l'environnement", l'Unaf propose aujourd'hui d'installer des ruches sur les toits, les terrasses, dans les espaces verts et les jardins publics et de généraliser les ruchers citadins. "On ne va pas remplacer les apiculteurs dans les campagnes, mais qui sait, on pourra susciter des vocations", confie son président.
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