A l'appel des Fédérations régionales des syndicats d'exploitants agricoles (FRSEA), les éleveurs de l'Ouest ont paralysé près de la moitié de la collecte de lait en Normandie, Bretagne et Pays-de-la-Loire, qui représentent 50% de la production nationale, avec 50.000 exploitants, selon éleveurs et laiteries. "Une journée blanche" destinée à "faire monter un peu plus la pression" sur les industriels, explique Dominique Varin président de la FDSEA du Calvados.
Les éleveurs se remobiliseront la semaine prochaine si nécessaire, ajoute M. Varin. La Confédération paysanne annonce de son côté une manifestation vendredi à Domfront, dans l'Orne. Leurs protestations vont croissant depuis la rupture fin juillet des négociations sur un nouvel accord national sur le prix du lait pour remplacer celui de 1997, dénoncé fin 2003. Mercredi, les producteurs du Nord ont bloqué l'entrée de l'usine Nestlé de Cuincy. Les éleveurs refusent la baisse de 11,92 euros pour 1.000 litres demandée par les industriels et coopératives et qui, selon les agriculteurs, équivaudrait à 10% de rabais sur les années 2002-2003-2004.
Au coeur de ce bras de fer: la réforme de la PAC décidée en juin 2003, en cours d'application. La baisse proposée par les industriels "est principalement liée à la volonté de la Commission de baisser le prix du lait et au remplacement des aides sur les produits par des aides au producteurs", affirme Isabelle Lesage, déléguée ouest de la Fédération nationale des coopératives laitières (FNCL).
Bruxelles a confirmé la hausse des quotas laitiers malgré une consommation atone, et a "nettement" réduit en 2004 les aides à l'exportation de produits laitiers, soulignent les transformateurs. Pour rester compétitives, les entreprises doivent acheter le lait moins cher, argumentent-ils. De leur côté, les agriculteurs voient certaines aides diminuer mais cette perte sera "compensée à 60%" par une aide aux producteurs (12,15 euros/1.000 litres) qui devrait leur être versée d'ici à la fin de l'année, poursuit Mme Lesage. "Ce n'est pas un argument du tout. Les aides au producteurs sont destinées à contrer la hausse des coûts liée aux nouvelles réglementations", répond Luc Gandon, délégué de la FRSEA Normandie.
Les industriels "veulent piquer l'enveloppe", ajoute Dominique Varin. "Plus de 30% de producteurs laitiers français "sont au SMIC voire en-dessous", une nouvelle réduction de leur revenu serait explosive, affirme M. Varin. "Le marché s'est redressé", ajoute-t-il, affirmant que l'on ne peut plus parler de surproduction de 2% comme début 2004. Et la France a enregistré en 2003/2004 sa plus faible collecte de lait depuis l'instauration des quotas en 1984, après une saison 2002/2003 où elle n'avait pas respecté son quota.
Même si les prix sont plus bas en Allemagne, premier producteur de lait en Europe, la France, numéro deux, reste compétitive, selon les producteurs, car ses industriels ont une gamme de produits plus élaborée. Les résultats des entreprises le montrent, ajoute M. Varin. Danone a vu son bénéfice opérationnel dans les produits laitiers frais augmenter de 13% au premier semestre 2004 par rapport à la même période de 2003. |