Grippe aviaire Une épidémie "sans précédent"
L'épidémie de grippe aviaire sans précédent qui se répand en Asie inquiète les spécialistes, qui redoutent qu'elle ne se transforme en épidémie humaine à grande échelle à l'instar de la grippe espagnole qui fit plusieurs dizaines de millions de morts au début du XXème siècle.
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"C'est une épidémie sans précédent. On n'a jamais vu ça", commente auprès de l'AFP Bernard Vallat, de l'Office international des épizooties (OIE), basé à Paris. "Sa très forte capacité de diffusion, rapide, est très préoccupante", poursuit-il en se montrant "pessimiste" : "C'est mal parti", dit-il.
Les virus de la grippe aviaire des groupes H5 (c'est un virus H5N1 hautement pathogène de ce groupe prédominant actuellement), H7, H9 comportent des virus fortement et faiblement pathogènes que l'on distingue par des tests d'inoculation aux poussins ou par séquençage (analyse de leur matériel génétique).
Taïwan a affirmé être touché par une souche moins pathogène que celles qui déciment la volaille ailleurs en Asie. Une vérification par un laboratoire de référence est nécessaire pour valider le degré d'agressivité du virus en cause, relève l'OIE.
Les spécialistes redoutent une transmission d'homme à homme. Une capacité que pourrait acquérir le virus par des réassortiments génétiques avec le virus de la grippe humaine. Plus le virus des oiseaux a de contacts avec des hommes, plus ce risque d'adaptation est grand. Si l'épidémie animale n'est pas éradiquée, les virus des oiseaux pourraient réussir à franchir efficacement les barrières d'espèces et engendrer une redoutable épidémie à la dimension de la grippe espagnole de 1918, qui fit au moins 20 millions de morts et peut-être jusqu'à 40 à 50 millions de morts selon certaines sources.
Les premiers cas connus de passage direct à l'homme à Hong Kong (18 cas, 6 morts) ne constituent qu'une tentative, en quelque sorte un galop d'essai peu fructueux. Les virus influenza aviaires (de type A) sont excrétés par les oiseaux infectés au niveau respiratoire et digestifs. Les plumes souillées par les fientes et les poussières contaminées par des particules de fécès sont donc des sources potentielles de virus pouvant contaminer l'homme par inhalation.
La très rapide extension géographique de l'épidémie asiatique apparaît de mauvais augure. "Sur le plan de la santé publique humaine, il s'agit de tout faire pour éviter que le virus aviaire et le virus de la grippe humaine ne soient hébergés dans un même organisme, où le virus des oiseaux pourrait grâce à ce contact devenir un virus méchant", rappelle Bernard Vallat. "Le risque de contamination de l'homme à partir de l'ingestion de viandes infectées est généralement considéré comme négligeable" et le virus est détruit par la cuisson, ajoute-t-il.
Tarir la source animale : "la stratégie consiste à faire le vide en éliminant la volaille de la zone infectée", à bloquer les mouvements animaux et à désinfecter. "Mais l'éparpillement des élevages familiaux avec des oiseaux (poulets, canards, dindons...) rend difficile et complique la maîtrise de l'épidémie", relève M. Vallat. "Ils favorisent aussi la dissimulation des animaux malades. Quant aux indemnisations des paysans ou éleveurs, elles restent le plus souvent l'apanage des pays riches", ajoute-t-il.
La vaccination des animaux (vaccin anti-H5N1) risque aussi de rencontrer des difficultés d'application sur le terrain. L'OIE "recommande dans les élevages mixtes l'abattage des cochons au contact des poulets malades". Chose qui n'a "pas" été faite au Vietnam, ce qui constitue un risque, selon un expert. "On risque d'avoir un virus H5N1 adapté aux mammifères tout en ayant en surface des antigènes contre lesquels l'Homme n'a pas de défense", explique de son côté Sylvie van der Werf (Institut Pasteur, Paris).
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