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AgroalimentaireLe Sénat se lance à son tour dans le rapport de force fournisseurs-supermarchés

Le Sénat entame ce mercredi l'examen en première lecture de la proposition de loi du député Frédéric Decrozaille. (©Pixabay)
Le Sénat entame ce mercredi l'examen en première lecture de la proposition de loi du député Frédéric Decrozaille. (©Pixabay)

Le Sénat entame mercredi l'examen en première lecture de la proposition de loi du député Renaissance Frédéric Decrozaille modifiant à titre expérimental les relations commerciales entre fournisseurs et distributeurs, un exercice d'équilibriste rendu encore plus délicat en période d'inflation. (Article mis à jour à 14h13)

« Le Parlement n'intervient pas sur ces sujets par plaisir : il le fait avant tout en raison du niveau unique de tensions et de défiance qui règne entre les acteurs industriels et la grande distribution", a posé la présidente LR de la commission des Affaires économiques Sophie Primas.

Le texte arrive dans l'hémicycle du Sénat tout juste deux semaines avant la fin du round de négociations annuelles qui ont lieu du 1er décembre au 1er mars pour les produits de grande consommation. Critiqué par les grandes enseignes, il avait donné lieu en janvier à une dizaine de jours d'affrontements médiatiques, avec notamment Michel Edouard-Leclerc, avant son adoption par les députés, à l'unanimité des votants.

Le texte du député Decrozaille modifie à titre expérimental le rapport de force entre les fournisseurs et industriels de l'agro-alimentaire, et la grande distribution, jugé trop favorable à cette dernière. Il vise à combler le « flou juridique » en cas d'échec des négociations au 1er mars, qui n'interrompt pas le contrat et profite de fait à l'acheteur puisque celui-ci peut continuer pendant plusieurs mois à commander des produits au fournisseur, qu'il acquitte à l'ancien tarif.

Il crée ainsi un délai supplémentaire d'un mois pour permettre une médiation visant soit à conclure un accord soit à définir les termes d'un préavis de rupture commerciale.   Les sénateurs ont "encadré" le dispositif, prévoyant notamment que le prix applicable pendant le préavis de rupture d'un mois devrait tenir compte « de la situation économique du marché » (inflation, hausses moyennes acceptées par les concurrents...). La rapporteure centriste Anne-Catherine Loisier vante « une position
d'équilibre », estimant que « tout le monde y trouvera son compte ».

Revente à perte

Mais la modification la plus clivante apportée en commission par les sénateurs, et qui devrait faire débat dans l'hémicycle, porte sur une autre disposition : l'encadrement du seuil de revente à perte. Cette disposition, dite SRP+10, adoptée dans le cadre de la loi Egalim 1 censée protéger le revenu des agriculteurs, oblige les supermarchés à vendre les produits alimentaires au moins 10 % plus cher que le prix auquel ils l'ont acheté.

La proposition de loi entend prolonger jusqu'en 2026 l'expérimentation de l'encadrement du seuil de vente à perte et des promotions, qui arrive à échéance en avril. Concernant le seuil de revente à perte, la commission propose de suspendre la mesure pendant deux ans, jusqu'au 1er janvier 2025, pour tenir compte de la période d'inflation. La FNSEA a aussitôt crié à la « provocation », estimant que cette initiative « risquait d'avoir des effets dramatiques pour l'ensemble de la filière » en relançant « une guerre des prix » sur les produits alimentaires.

Ce dispositif « n'a absolument pas fonctionné », rétorque la rapporteure, pour qui ce sont « environ 600 millions d'euros prélevés chaque année dans la poche du consommateur » sans pour autant profiter aux agriculteurs.

L'association de consommateurs UFC-Que choisir réclame pour sa part sa « suppression immédiate ». Dans un « billet » publié mercredi, son président Alain Bazot « soutient sans réserve » sa suspension, saluée comme « une réelle avancée », pour alléger le poids de l'inflation alimentaire actuelle.

Autre initiative des sénateurs : ils ont voté en commission l'extension à tous les produits de grande consommation, notamment les produits d'hygiène et d'entretien, de l'encadrement des promotions sur les produits alimentaires qui visait notamment à mettre fin aux opérations « 1 produit acheté, 1 produit offert" ». Pour Mme Loisier, il s'agit de protéger une filière française, dont la crise du Covid a montré l'importance.    Cette mesure aurait selon la commission « un effet inflationniste minime, largement inférieur » aux gains de pouvoir d'achat que représenterait la suspension du SRP+ 10.

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