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Retours d'expérienceSemer du blé en direct sous couvert permanent de luzerne

Alors que les semis de céréales d'hiver avancent, peut-être que certains d'entre vous se sont tournés vers le semis direct sous couvert permanent de légumineuses comme Christophe Vandewalle, Vincent Baron et le GIEE Magellan. Ils nous expliquent les intérêts et les points d'attention de cette technique. (Article mis à jour, publié initialement le 28 octobre 2021)

Essai semis direct de blé sous couvert de luzerne
Vous pratiquez le semis direct sous couvert de luzerne ou vous avez déjà testé ? N'hésitez pas à partager votre expérience dans les commentaires en dessous de l'article. (©Sylvain Delzon/Twitter)

Agriculteurs  entre l'Eure et l'Orne, Christophe Vandewalle et Christophe Marmion sont tous les deux adhérents du GIEE 3 vallées. Parmi les différents travaux de ce groupement, figurent notamment les couverts permanents. « Je suis convaincu qu'il faut couvrir les sols, mais les difficultés à l'implantation ont été récurrentes ces dernières années », remarque Christophe Marmion. Avec les couverts permanents de légumineuses, l'idée via une installation plus longue est de maximiser les bénéfices agronomiques qui peuvent être apportés par ces couverts : apport d'azote, lutte contre les adventices, meilleure structuration du sol... 

Pourquoi utiliser la luzerne comme couvert permanent ? 

Pour se lancer, Christophe Vandewalle s'est notamment inspiré du système d'Hubert Charpentier, qui pratique le semis direct sous couvert depuis plus de 40 ans. Ainsi sa rotation est désormais basée sur 4-5 ans : « je démarre par un pois, puis un colza pour éliminer au maximum les graminées dans les parcelles », indique l'agriculteur. Le couvert permanent de luzerne est semé en même temps que le colza pour qu'il ait le temps de s'implanter et qu'il soit bien vigoureux pour le semis de blé suivant. Après la moisson de ce blé, « le couvert reste en place et on peut faire un deuxième blé, voire une troisième paille ensuite (blé ou orge). »

L'agriculteur démarre avec la luzerne à chaque fois sur un colza, un moyen aussi de réaliser la transition progressivement : « on aura fait le tour en 4 ans environ », précise Christophe Vandewalle. Pourquoi choisir la luzerne ? Et pas du sainfoin, du lotier... ? « J'ai fait des tests en bandes de 24 m la première année, et la luzerne me plaît particulièrement avec son système racinaire puissant. De plus, ce dernier n'est pas dans le même horizon que celui du blé. Si la luzerne reste en place trois ans, elle a le temps de faire ses racines et je me dis que cela crée ainsi une autoroute pour les racines de blé lors de la rotation suivante », explique Christophe Vandewalle. « Pour l'instant, je me concentre donc sur la luzerne et je continue à me documenter, je changerai peut-être d'avis un jour... »

Retrouvez l'intégralité de l'interview réalisée par Ver de Terre Production en vidéo (cliquez sur le curseur pour lancer la lecture)

Bien maîtriser le couvert permanent 

« Comme le couvert est déjà en place à l'implantation de la culture suivante, il limite la levée des adventices en théorie. Des économies de désherbage sont alors possibles dans des systèmes, équilibrés, où la légumineuse est bien conduite », note le GIEE Magellan, basé dans la Nièvre, dans son guide Semis direct : du couvert annuel... au couvert permanent

« Le couvert permanent permet de maintenir un habitat propice aux auxiliaires de culture. Malheureusement, il peut également servir d'abri pour les ravageurs comme les campagnols. » Christophe Vandewalle attire aussi l'attention sur l'importance de bien maîtriser le couvert pour ne pas qu'il concurrence la culture en place, notamment au niveau des éléments nutritifs du sol.

Relations entre cultures et couverts de légumineuses pérennes

Sur son exploitation, il a notamment fait le choix de la variété de luzerne Luzelle, car « elle démarre beaucoup moins rapidement au printemps et dispose d'un port plus étalé, donc elle est moins envahissante ».

 « L'observation : clé de la réussite »

« Il faut, en effet, être particulièrement vigilant lorsqu'on vient de contrôler la luzerne au printemps. Toutes les luzernes doivent être reparties, il ne faut pas passer trop tôt, ni trop tard : l'observation reste la clé de réussite de cette intervention. Attention aussi au stade du blé (ne pas passer au stade gonflement), ainsi qu'aux températures et à l'hygrométrie », précise Vincent Baron dans une fiche du réseau Dephy. Installé dans les Deux-Sèvres, il cultive de la luzerne porte-graines depuis 1994 et jugeait « improductif de faire un passage d'outil à dent pour détruire une luzerne, alors qu'elle rentre en repos végétatif à l'automne ». C'est en 2006, qu'il a essayé de semer du blé directement dans la luzerne vivante pour ne plus avoir recours au travail du sol

Depuis, Vincent Baron est passé en semis direct sur la totalité de son exploitation. Il implante la luzerne porte-graines en même temps que le tournesol à 4 kg/ha (avec le microgranulateur du semoir monograine) « pour ne pas perdre une année, même si les rendements en tournesol sont faibles. La luzerne est maintenue en place minimum deux années. C'est un plaisir de venir ensuite semer le blé dans la luzerne : c'est le top du top, partage l'agriculteur. Après son repos végétatif pendant l'hiver, la légumineuse décolle en février. C'est là le point clé de la gestion dans la céréale au printemps. Et une fois la moisson réalisée, la luzerne vient naturellement couvrir les sols. Elle disparaît au fil des années, notamment lorsque le colza arrive dans la rotation. Je viens alors sursemer avec un couvert classique, afin de combler les trous dans la luzerne ».

Parmi les pistes d'amélioration, l'agriculteur réfléchit à semer la luzerne porte-graines à une densité plus importante comme c'est le cas de la luzerne fourrage, « pour avoir une meilleure couverture du sol une fois la moisson effectuée ». Il faudra, par contre, être encore plus vigilant au printemps. 

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