La Commission européenne envisage un soutien de 56,3 millions d'euros à destination de trois pays, financé par la réserve de la Pac, pour compenser « les pertes économiques dues à l'augmentation des importations de céréales et d'oléagineux » venues d'Ukraine « et limiter l'impact des déséquilibres du marché », a indiqué l'exécutif européen.
Bruxelles propose d'allouer 29,5 millions d'euros à la Pologne, 16,75 millions à la Bulgarie et 10,05 millions à la Roumanie, et autorise en outre ces trois pays à doubler ces montants par des aides d'État, a précisé à la presse le commissaire à l'Agriculture, Janusz Wojciechowski. La proposition est soumise aux 27 États membres, qui devraient se prononcer lors d'une réunion technique le 30 mars, selon Bruxelles, qui espère de premiers versements d'ici fin septembre.
L'UE avait suspendu en mai dernier, pour un an, les droits de douane sur tous les produits importés d'Ukraine, pour soutenir l'économie du pays attaqué par la Russie, et - dans le domaine agricole - lui permettre d'exporter ses stocks de céréales après la fermeture de la voie maritime par la mer Noire.
Mais en conséquence, les États de l'UE voisins ont vu augmenter les arrivées de maïs, blé ou encore de graines de tournesol, déstabilisant les marchés locaux au détriment de leurs agriculteurs, a observé M. Wojciechowski.
La Pologne et la Bulgarie souffrent d'une importante « offre excédentaire » qui pèse sur les prix, tandis que la Roumanie, « plaque tournante des "corridors de solidarité" » pour exporter la production ukrainienne vers le reste du monde, pâtit de la pression sur ses structures logistiques, a-t-il expliqué.
Ces pays « se retrouvent avec leur production domestique qui ne peut pas être stockée, et en plus ils ne peuvent pas exporter car les productions de la Mer noire sont beaucoup plus compétitives », pointait la semaine dernière Clémence Lenoir, chargée d'études économiques « grandes cultures » chez FranceAgriMer, lors d’un point presse.
Paul Le Bideau, responsable adjoint de l’unité Grains et sucre, soulignait pour sa part que le suivi des flux n’est pas évident. Évoquant ainsi la forte part de l’origine polonaise dans les importations françaises de maïs à sept mois de campagne, il interroge : « Quid de la quantité de maïs ukrainien qui passe par la Pologne ? ».
De leur côté, la Hongrie et la Slovaquie n'ont pas été jugées suffisamment affectées pour bénéficier du soutien de la Commission européenne.
Concernant les mesures commerciales en faveur de l'Ukraine et leur possible prolongation, « il sera plus facile d'activer une clause de sécurité » pour freiner certaines importations si elles « augmentent de façon disproportionnée », a ajouté M. Wojciechowski. « Nous continuerons à surveiller de près l'effet sur la volaille, la viande, les œufs, comme pour les céréales », a-t-il relevé.
La guerre en Ukraine a également contribué à l'envol des prix des engrais et des carburants. Mais l'aide annoncée lundi ne vise pas à compenser cette inflation des coûts pour les exploitants, contre laquelle des possibilités d'importantes aides d'États sont déjà prévues, a insisté le commissaire.