Les circuits courts sont une thématique développée par les producteurs depuis quelques années. Ainsi, ils sont plus proches des consommateurs et peuvent augmenter la valeur ajoutée de leurs produits. Cependant, vendre en circuit court est un vrai métier et implique parfois des contraintes : temps, disponibilité, coûts de transport… Des producteurs se sont réunis, en Loire-Atlantique, pour mutualiser les coûts de transport de leurs produits et par là-même faire un geste pour l’environnement.
Gagner du temps et de l’argent
En 2008, plusieurs producteurs de l’association Terroirs 44 se rendent compte qu’ils parcourent les mêmes routes, livrent aux mêmes points de vente. Certains, pratiquant la vente à la ferme, étaient intéressés par la vente des produits d’autres exploitations en complément de leur gamme. Ils imaginent donc un camion qui, dans une même tournée, récupère les produits chez les agriculteurs ou sur des points « relais » et livre (autres magasins de producteurs, boutiques, épiceries, restaurants scolaires…).
En 2009, avec l’aide de trois étudiants de l’IUT de logistique de Saint-Nazaire, l’association mène une étude sur la logistique des producteurs de Terroirs 44 et de ceux de l’atelier de découpe de la Cuma « De la terre à l’assiette », basée à Nozay (Loire-Atlantique). Les étudiants recensent les besoins et proposent différents scénarii. Durant l’été, les producteurs expérimentent deux tournées hebdomadaires. Un test concluant, avec toutefois un coût trop élevé.
Une embauche pour lancer les tournées
En 2010, Terroirs 44 saisit l’opportunité d’un contrat aidé pour embaucher une salariée. Les tournées démarrent avec le camion frigorifique de 12 m3, mis à disposition par la Cuma, moyennant une contrepartie financière (0,50 €/km). De la terre à l’assiette et Terroirs 44 mutualisent le coût du camion prenant en compte l’essence, l’entretien et l’amortissement. Terroirs sur la route est né.
Au départ, c’est l’association Terroirs 44 qui assume le portage du projet (salariée, facturation) jusqu’en 2012, même si le projet est mené conjointement par les deux structures. Il est soutenu financièrement par l’Ademe et l’Europe (Feader) en phase exploratoire dans le cadre d’un projet européen 341 B, le Conseil régional et le Conseil général (aide à l’emploi).
La création d’une section logistique au sein de la Cuma
Fin 2012, les 12 agriculteurs ressentent le besoin de formaliser ce fonctionnement, en créant une section logistique au sein de la Cuma « De la terre à l’assiette ». La Cuma étant l’utilisateur principal, c’est finalement elle qui porte l’embauche.
Cette année là, les produits transportés sont des produits laitiers, de la viande et charcuterie, des légumes, des fruits, du pain et du miel. Le camion parcourt environ 32 000 km au lieu des 41 000 km qu’auraient parcouru les producteurs s’ils livraient individuellement. La réduction des émissions de CO2 atteint 30 %.
Une logistique bien rodée
Aujourd’hui, le camion est mis à disposition par la Cuma et la salariée effectue trois tournées par semaine : deux pour la collecte et la livraison, ainsi que l’approvisionnement de magasins fermiers et de cantines scolaires le mardi et le jeudi sur Nantes et l’ouest du département ; une le vendredi pour la livraison des produits aux éleveurs depuis l’atelier.
Le chiffre d’affaires transporté en 2014 est de 386 000 €, soit en moyenne 32 200 € par mois. Chaque producteur reçoit une facture mensuelle de 7 % de la valeur des produits transportés, auxquels s’ajoutent 5 € par point livré. Le calcul ne prend pas en compte les kilomètres parcourus car les tournées sont bien équilibrées.
Il n’y a aucune gestion commerciale de la part de la Cuma, les producteurs gèrent leurs commandes et remontent chaque semaine leurs besoins logistiques à la salariée, qui organise et réalise les tournées. Chaque producteur et chaque point de vente a des horaires et des exigences différents, notamment selon les produits : date limite de consommation, températures de conservation, fréquences de livraison… La souplesse est de mise : les tournées sont modifiées au cas par cas en fonction des besoins.
De nombreux avantages économiques, environnementaux et sociaux
Le service de livraison a d’abord un avantage économique. Il a aussi permis aux producteurs de dégager du temps sur leur exploitation. Certains ont professionnalisé leur organisation : ils ont des horaires fixes et conditionnent leurs produits pour pouvoir faire livrer par autrui. D’autres ont accédé à de nouveaux marchés. Sur le plan environnemental, l’impact carbone de chacun est diminué. Sur le plan collectif, ce projet a favorisé le partage et une forte collaboration entre adhérents.
Il est pourtant difficile de convaincre de nouveaux producteurs de rejoindre le projet « Terroir sur la route ». La réception d’une facture mensuelle pour le service rebute certains agriculteurs qui y voient une démarche commerciale. D'autres ont le sentiment de rompre le contact avec leurs clients. Par ailleurs, les producteurs ne connaissant pas forcément leurs coûts de distribution, il n’est pas facile de comparer la plus-value du collectif. Enfin, ce système oblige à adapter son organisation et respecter des impératifs horaires pour l'organisation des tournées ce que certains ne sont pas disposés à faire.
Bilan et perspectives
Aujourd’hui, Terroirs 44 est à la croisée des chemins. Malgré le grand intérêt de la démarche, il faudrait pour développer et pérenniser, une plus grande souplesse.
Pour cela diverses solutions sont possibles :
- intégrer de nouveaux producteurs et points de vente,
- favoriser les regroupements entre producteurs,
- changer de statut : le statut Cuma limite l’entrée de nouveaux membres et freine l’augmentation de l’activité[1]. Le groupe réfléchit au statut de Sica.
Avant de mettre en place ce type de projet, il faut impérativement :