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MéthanisationUne voie d’avenir en quête de rentabilité

Une voie d’avenir en quête de rentabilité

Les résultats des premières unités de biogaz témoignent d’une rentabilité encore fragile. Les acteurs de la filière sont plus que jamais en quête de solutions pour améliorer l’efficience des nouveaux projets.

Dix ans après la mise en service de la première unité de méthanisation à la ferme en Meurthe-et-Moselle, l’heure est au premier bilan économique pour les 140 installations agricoles recensées fin 2013. Dans une étude conjointe, Biomasse Normandie, la Semaeb (société d’économie mixte pour l’aménagement et l’équipement de la Bretagne) et Apesa (centre technologique en environnement basé en Aquitaine), en collaboration avec l’Ademe, ont fait le point sur 18 sites mis en service depuis un peu moins de quatre ans. En moyenne, l’investissement observé se chiffre à 5.610 €/kW. 

Avec une installation de 75 kW pour 420.000 €, Grégoire Forzy, polyculteur-éleveur à Gamaches-en-Vexin, est dans cette moyenne. Mais la tendance est à l’inflation. Selon la Cavac, coopérative vendéenne, qui accompagne ses adhérents dans leur projet de méthanisation, l’engagement financier varie plutôt entre 7.000 et 10.000 €/kW installé. En 2013, le Club biogaz (interprofession regroupant tous les acteurs de la filière en France) évaluait à 9.200 €/kW l’investissement nécessaire pour un projet de type "petit collectif agricole". Malgré l’expertise accrue des constructeurs, les coûts d’étude et de construction sont à la hausse. D’après Alain Guillaume, président de l’Association des agriculteurs méthaniseurs de France (Aamf), les devis réalisés ces derniers mois ont augmenté de 30 à 50 %. Le coût du gros œuvre n’est pas négligeable, autour de 38 % du montant total. Le retour sur investissement, lui, est très variable selon les projets, et peut dépasser 10 ans dans certains cas. 

Entre 7.000 et 10.000 €/kW

Face à ces premiers résultats contrastés, la filière biogaz reste en quête d’une meilleure rentabilité. Les solutions existent. A Mortagne-sur-Sèvre en Vendée, par exemple, les éleveurs à l’initiative d’Agribiométhane, ont fait le choix de l’injection directe du gaz dans le réseau Gdf. En raison d’un process complexe pour fournir un gaz naturel aux normes, leur projet territorial a coûté 3,4 M€. Le prix à payer pour obtenir une efficacité énergétique de 83 %, taux qui n’aurait pas pu être atteint avec la cogénération. 

« Pour les unités en cogénération, l’objectif est bien d’arriver à 70 % d’efficacité énergétique pour bénéficier du bonus de 4 cts €/kW sur le tarif de rachat de l’électricité », explique Denis Ollivier, animateur à l’Aamf. D’un point de vue technique, de nombreux porteurs de projet améliorent parallèlement la rentabilité de leurs cultures intermédiaires à vocation énergétique, qui offrent un pouvoir méthanogène nettement supérieur aux effluents d’élevage. Forts de cinq ans d’expérience dans le domaine, Mauritz et Pierre-Jacques Quaak parviennent à récupérer 8 à 12 t de matière sèche selon les espèces choisies. Ces agriculteurs ont également opté pour l’injection directe du gaz. 

Des solutions existent

Pour y voir plus clair, des simulateurs en ligne existent. A destination des porteurs de projet, ils livrent un premier diagnostic sur la faisabilité de l’installation. Citons parmi eux, Méthasim, un outil gratuit développé par sept organismes agricoles (1). Il permet d’évaluer l’intérêt technico-économique des unités en phase liquide de cogénération, de 50 à 500 kW de puissance électrique environ. 

Grâce à une base de données sur le pouvoir méthanogène de plus de 200 produits et déchets organiques, il peut déterminer les besoins thermiques dans de nombreuses configurations : séchage, digestat, chauffage de la maison d’habitation ou de serres… Est également proposée une évaluation du dimensionnement des équipements, selon le gisement de déjections et de cosubstrats disponibles. De même qu’une estimation du montant de l’investissement, de l’excédent brut d’exploitation ou du temps de retour sur investissement. 

Malgré les progrès continus en termes de valorisation de l’énergie produite et de sources d’approvisionnement, la rentabilité des unités de méthanisation reste très dépendante de la fiscalité. S’il veut atteindre son objectif très (voire trop) ambitieux de 1.000 unités agricoles en fonctionnement à l’horizon 2020, le gouvernement ne doit pas décourager les agriculteurs par une fiscalité trop lourde. 

Ainsi, le projet de loi de finances pour 2015 prévoit, non pas pendant cinq ans comme initialement annoncé, mais sept ans, des exonérations de taxe sur le foncier bâti et de cotisation foncière des entreprises pour toute nouvelle unité de méthanisation agricole installée à partir du 1er janvier 2015. 

Pour l’association des agriculteurs méthaniseurs de France, c’est un premier signe qui doit être complété par d’autres dispositifs incitatifs. C’est tout l’enjeu, notamment, de la loi sur la transition énergétique pour la croissance verte, actuellement en débat.

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